
ïource des Peuples de l’Ég ypte, de l'Éthiopie , & des Indes, méritoit d’être
choilie par preference pour caracftérifer le fymbole de celui, qui, avec la vie
donne les foutiens de la vie. Revenons à d ’autres fymboles.
Pour annoncer les Vent s l es mêmes Égyptiens ,■ ou leurs Prêtres, crurent
ne pouvoir choifir rien de plus fimple, ni de plus propre que les oifeaux , à
uaule de leurs ailes, dont l’Écriture Sainte même donne le nom aux Vents •
•mais comme il eut été peu utile d’annoncer du vent en général, fans le carac-
-teriler, d fallut choifir certains oifeaux parmi les autres, pour faire connoître
la qualité du Vent qui devoir régner en Egypte dans tels & tels temps, dans
tels & tels mois, dans telle & telle M o n , afin que le Peuple pût apprendre
parda ce qu il avoir a efperer ou à Craindre, à faire ou à‘ éviter
O r parmi les Vents il y en avoir deux fur-tout, dont les Égyptiens étoient
tort mterefles a obferver le retour ; c’étoit ce retour que leurs Prêtres aftro-
nomes s apphquoient a leur faire connoître, par l’affiche des fymboles propres
a 1 annoncer L un de ces Vents étoit le Fent Étéfien Septentrional : à l ’entrée
de 1 Eté ce Vent chaffe les Vapeurs vers le Midi : ces vapeurs couvrent l ’Éthiopie
de nuages épais que ce meme Vent réfout en pluies, & qui font enfler le
■ Ntl plus ou moins, félon qu elles font abondantes. O n fait de quelle importance
etoit le débordement du Nil pour l’Egypte, dont il fertilifoit les terres. Plus
les eaux de 1 inondation annuelle étoient hautes, plus la récolte étoit abond
a n t e , pourvu neanmoins quelles ne s’élevaffent point au-deflus de feize
coudees , ou vingt-quatre pieds ; car alors elles caufoient un grand dommage
.Le Vent Etefien annonçoit donc, ce, débordement , mais de loin.' car il
■ commençoit a regner au mois d’Avril ; les pluies qu’il amenoit en Éthiopie
y tomboient jufqua la fin du mois d’Août r ies eaux du N il fortoient de leur
lit des le mois de Juin ; & fur la fin de ce mois l'inondation étoit à fa plus
,grande force. r
Le fécond Vent intéreffant pour l’Égypte , eft le Vent Méridional. C ’eft
c e k i qui fait retirer les eaux du Nil dans leur, l i t, qui defféche les terres &
qui femlflê les limons gras & abondans, dont l’inondation le? a couvertes.
V etoit apres le retour de ce vent que l’on faifoit tous les ans un nouvel’
arpentage & un nouveau partage des terres, que chacun enfemençoit & cul-
uvoit enluite.
L annonce ou la prédiéfion du premier de ces vents, qui précédoit de
quelques mois Iinondation, faifoit fentir au Peuple qu’il étoit temps de préparer
tout ce qui etoit neceflaire pour fe tenir en repos, & comme en retraite
pendant les trois mois que devoir durer l ’inondation. L ’annonce du fécond *
1 avemfloit de fe tenir prêt aux travaux de la campagne, c’eft-à-dire, aulabou-
rage, aux femailles, & enfuite aux moiflons.
Pour faire connoître le retour de ces deux V en ts , les Prêtres choifirent la
figure de deux oifeaux les plus propres à en devenir les fymboles ; ces oifeaux
etomnt l Epervier &ch Huppe. Ces fymboles étoient fimples, naturels &
fort intell^bles. L ’Epervier fe plaît au Nord ; mais lorfqîau Printemps il
commence a muer, il s’avance vers le M id i, afin qu’à la1 faveur des Vents
chauds, il pmlTe plus aifement fe renouveller par la chute de fes vieilles
N n r^ F l] 111 f° nt:P ace nouvelles. La Huppe au-contraire, va du Midi au
Nord. EUe va en Egypte à la fuite du N i l , à mefure que fes eaux fe refirent
parce queUe.trouve fur les terres, que ces eaux abandonnent, une infinité
de moucherons , de vermifleaux , & d’autres infeétes dont elle vit H S
naiffient aux premiers rayons du Soleil, des oeufs que fa chaleur fu t
dans
dans le limon du Nil où ils étoient dépôfés. Ai'nfi dès que les Égyptiens
voyoient la figure de l’un ou de l’autre de ces oifeaux expoféè à leurs yeux, avec
leurs ailes étendues, ils ne doutoient point que celle du premier feroit bientôt
fui vie du Vent qui produit les pluies, & celle du fécond de la chaleur qui
defféche les eaux ; & en confequence, ils fe préparaient ou au repos , ou au
travail, félon que le fymbole leur faifoit comprendre que le temps de l’un olr
de l’autre approchôit.
On ne fe contentoit pas de repréfenter unê certaine efpèce d’ôifeau pour
préfager un certain Vent ; mais on plaçoit encore fur la tête ou dans les pattes
de ces oifeaux des fymboles, que M. Plitche appelle des fymboles fubal-
ternes-, parce qu’ils étoient fubordonnés aux autres. Les premiers annonçoient
de quel côté viendraient les Vents; les féconds enfeignoient quelles feraient
les qualités de ces vents ; favoir, s’ils feraient impétueux, orageux, fecs ,
pluvieux, froids ou brûlans, &c. O n voit à la planche IIIe. numéros ê. & y.
deux de ces oifeaux, qui o n t , entre leurs pattes, quelque chofë, qui , à Ce
que l’on croit, fignifie la qualité du vent que ces oifeaux fymbôliques annoncent
; mais on ne peut pas dire au jufte quelle eft cette qualité de Vents
que ces fymboles fubalternes pronoftiquent. Il y a un de ces inftrumerts
plus élevé que l’autre , & il eft terminé par une efpèce de dard. La différence
qui eft entre l’un St l’autre marque fûrement celles des Vents, dont ils font
les pronoftics.
Un autre fymbole, que l’on expofôit aux yeüx du Peuple, pour lui apprendre
beaucoup de chofes très-intéreffantes, étoit celui de l’Étoile de la Caniculè.
Dès que cette Etoile venoit à paraître, & que le Soleil s’avançoit fous le
figne du Lion , On étoit certain que le débordement du Nil alloit füivre de
près, & l’on en donnoit auffi-tôt avis au Peuple, en lui en’montrant le fymbole,
fous là figure d’un corps humain à Une ou à deux têtes de chien aboyant.
Les fymboles fubalternes qu’on donnoit à cette figuré étoient pour faire
connoître quelque chofe de plus particulier, que le Peuple àvôit à faire dans
ce temps-là. Quand il paroifloit avec deux têtes humaines, l’une de vieillard ,
& l’autre de jeune homme tournées l’une devant & l’autre derrière, il annonçoit
par la première, l’année expirante, & par la fécondé, l’année commençante.
Si on lui mettoit une clef à la main, c’étoit pour lui donner la
fonéhon d’un portier qui ouvre l’année ; car chez les Égyptiens on cOmptoit
le mois de la Canicule pour le premier de tous. Lorfqu’on lui attachôit une
marmite au bras, des ailes aux talons, une plume fur la main, c’étoit pour
avertir que le débordement du Nil étant prochain, il falloit fuir & fé retirer
dans les maifons avec la légéreté & la vîteffe des oifeaux, & y renfermer avec
foi tout ce qui étoit néceffaire à la v ie , pour tout le temps que durerait
1 inondation. La figure d’un Lézard, ou celle d’une Tortue, animaux qui fe
plaifent & fe nourriffent le long des eaux, annonçoit aüffi aux Égyptiens qu’ils
alloient être dans la même pofition. C e fymbole de la Canicule f je veux
dire le principal, qui étoit la figure humaine à tête de chien ) , étoit appellée
1 Aboyeur, le Moniteur, 1 Aflre-chien, le Portier , l ’Ajlre qui ouvre ôC qui
f e rme[annJe ; & c eft ce que fignifioit en Langue Égyptienne le nomd’Anuhis ,
fous lequel nous connoiffons par les Médailles, &c par d'autres Monumens ,
cette figure que l’Égypte adora. O n ne donnera point ici un plus grand
nombre d exemples de ces fymboles principaux & acceffoires. O n en trouvera
d autres dans la fuite, quand il s’agira de chacune des principales Divinités.
Commençons à préfent à montrer comment M. Pluche fait naître tous