
croient que c’eft Homère même qui eft repréfenté en forme de Jupiter;
cela efl; fort vraifemblable : ainfi Homère qui efl peint au bas de la montagne
, le fera auffi au fommet. Le milieu efl occupé par les Mujfes ; ce
qui marque que c’eft par la route des Mufes qu’Homère efl parvenu à
l’immortalité & à la Divinité. Des onze figures de femmes qui font au
fécond & au troifième étage, tous conviennent que neuf font les Mufes.
Pour les autres il y a une grande variété de fentimens : fans m arrêter à
les rapporter tous , je crois que celle qui efl la plus près d’Homere, &
le regarde, ii’eft point une Mufe, non plus que l’autre qui eleve un bras,
& Kaulfe un peu fa robe pour bien affeoirle pied, parce qu’elle va par une
defcente : prendre celle-ci pour une danfeufe, & pour Erato Mufe, comme
a fait un habile homme , c’eft ce qui efl hors de toute apparence. Je ne
fais qui repréfentent ces deux Images ; je n’oferois meme .hazarder une
conjecture là - deflus ; fi je les exclus du nombre des Mufes, c’eft
non feulement parce que je trouve les neuf Mufes fans celles-la ; mais
aufli parce quelles n’en portent aucune marque. J ’en trouve neuf, quatre
dans cet étage , & cinq dans celui de deflous. Nous avons déjà fait voit
la difficulté de diftinguer toutes les Mufes les unes des autres , non feulement
par la diverfité des defcriptions que les Auteurs en fo n t , mais aufli
par le peu d’uniformité dont les marbres & les bronzes les reprefentfent.
Ici la difficulté efl encore plus grande, parce que les mafques qui diftin-
guent Euterpe & Thalie des autres, ne s’y trouvent pas. O n reconnoît
fûrement Uranie par le globe quelle touche , & peut-être Terpfichore
par les flûtes. Quant aux deux qui font à la bouche de l’antre, j’y vois
deux Mufes fi parfaitement bien exprimées, que je les aurois mifes au
nombre des Mufes fans m’arrêter un moment, fi l’autorité d’un aufli habile
homme qu’eft M. Schùtt ne m’avoit obligé de pefer fes raifons. Il dit que
celle qui tient une guitarre efl un Apollon ; il fe fonde fur plufiêurs
Médailles où ce Dieu efl habillé en femme : il s’en trouve en effet de cette
manière; mais fur l’Image préfente, le fein de femme efl fi marqué, qu’il
n’y a nul moyen de la prendre pour Apollon : il efl encore plus marqué
dans-l’eftampe de Bellori, faite à Rom e , où fe trouve le marbre qui efl:
l ’original. Je m’en tiens donc à ce que j’ai d’abord d it, que les deux qui
fe tiennent à l’entrée de l’antre, font deux Mufes ; les fept autres font
forties de l’antre. Une efpèce de machine qui efl entre ces deux Mufes,
a la forme d’un bonnet ; & en effet M. Cuper l’a prife pour le bonnet
d’Ulyffe , & dit que celafignifie l’Odyffée d’Homère : il fonde fa conjecture
*fur ce que le bonnet d’Ulyffe efl de même forme dans certains
Monumens : l’arc & le carquois qui femblent appuyés fur ce bonnet,
marquent, dit-il, l’Iliade qui contient la guerre de Troye ; mais cette
machine, fi on la compare avec toutes les têtes de la planche , efl de
beaucoup trop grande pour être un bonnet. M. Schott la prife pour un
Vaiffeau, qu’il appelle Cortina. Il efl à remarquer que fur cette machine
il y a deux bandes ou deux courroies, qui fe croifent & qui paroiflènt
aboutir l’une au carquois & l’autre a. l ’arc ; enforte qu’il pourrait bien fe
faire que c’étoitune machine où l’on cenoit attachés l ’arc & Le carquois,
de peur qu’ils ne traînaffent à terre.
« C e t antre appuiele fentiment du P. Kircher, qui dit que cette montagne
efl le Parnaffe ; mais ; dit M. Cuper, celle-ci n’a qu une pointe, au
lieu que le Parnaffe en avoir deux : il vaut donc mieux dire que' c’eft le
» mont
mont Olympe. La montagne telle que la donnée M. Cuper, n’a en effet
qu’une pointe ; mais dans notre Eftampe & dans celle que le Bellori a
donnée a Rome même , il y a deux pointes bien marquées. Il efl vrai
1 que comme celle de devant couvre l’autre, on ne peut pas voir la diftance
* qui efl entre les deux ; mais la féparation des deux pointes y paraît évif
Les fentimens ont été encore plus partagés touchant l’homme qui efl à
côté de l’antre, fur un piedeftal, O n l’a pris pour un Engaftrimythe, pour
” un p rêtre d’H omère, pour L in , pour Lycurgue, pour Pififtrate, pour le
” précepteur Égyptien d’Homère. Je m’en tiens à M, Sphanheim qui croit
’» que c’eft Bias de Priène, l’un des fept Sages de la Grèce. C ’cft Archelaüs
I de Priène, fils d’Apollone, qui a fait ce Monument, comme porte l’Inf-
1 cription : il y a grande apparence qu’il aura voulu faire à fon Compatriote
I Philofophe l’honneur de le mettre en une compagnie fi célèbre ; il a en
effet tout l’air d’un Philofophe ; ce qui femble encore déterminer à le
| croire, c’eft qu’il a derrière lui un grand Trépied ; car c’en eft un véri-
” tablement, comme on peut voir en le comparant aux Trépieds que nous
” avens donnés ( à la planche X V I I e. ) ; or tout le Monde fait que le T répied
» que l’Oracle avoit ordonné de préfenter au plus Sage de la Grèce, fut
.. déféré à Bias de Priène.
„ O n a moins de difficulté à expliquer les figures qui occupent tout le
» bas de ce Monument, parce que chacune a fon Infcription. Il y avoit
» erreur dans les deux premiers mots , où on avoit lu m ÿ ld & «poncs;
„ c’eft ainfi qu’ont lu M. Cuper & d’autres, qui fe font donne la torture
« à expliquer le mot qui n’y fin jamais. M. Fabretti , qui a vu &
„ examine ce marbre, a rétabli la véritable leçon ; le premier mot eft
„ kotmïnh ; deux lettres fautées avec une pièce du marbre faifoient oikotmwh,
„ . qui veut dire , le Monde , ou la Terre , & le fécond « onos le Temps.
« La Terre & le Temps font côte-à-côte ; la première en forme de Gyb ele,
« qui eft la même que Tellus ou la T e r r e , a fur la tete une haute tour ,
„ elle met fur la tête d’Homère aflis devant elle, une couronne de laurier :
« cela veut dire que toute la Terre habitable couronne Homere comme le
» Prince des Poètes. Le Temps peint en homme a des ailes a fon ordinaire;
» il tient, ce femble, un rouleau qui d’un côté fe termine en demi cercle:
« le Temps marque qu’Homère eft le plus ancien des Poètes, ou qui! a
„ écrit l’hiftoire des anciens Temp s , ou que fes ouvrages dureront tous les
=> Temps, & qu’ils font confacrés à l’immortalité- Homere elt aflis entre
» deux jeunes filles, qui font l’Iliade & l’Odyffée ; cela eft marque par 1 Inf-
,, cription qui a .aux, ; l’Iliade Se l’Odyffee ont un genou
„ i terre : l’Iliade tient une efpèce d’épée, marque quelle a décrit la
guerre de Troye ; l’Odyffée tient l’ornement d’une pouppe de Navire ,
.. qu’on appelloit Aplufin, parce quelle décrit la navigation d Ulylle. Au
.1 bas de la cbaife, fur le côte, font deux Rats, qui marquent apparemment
» la Batrachomyomachia , ou le combat des Rats & des Grenouilles écrit
„ par Homère. D ’autres difent que c’eft Zoïle & fes femblables qui ont
». voulu ronger la réputation d’Homère. C e grand Poète, qui eft aflis lut
»» un trône, tient un fceptre & de l’autre main un rouleau : la rete elt
» ornée d’un diadème ; ce qui fe trouve dans d’autres Images d Homere.
» Après cela vient un Sacrifice qui fe fait fur un Autel rond, derrière le
»» quel eft un Taureau qui va être immolé. Les perfonnes qui concourent