changeant les courbes en polygones, dont les côtés font
indéfiniment petits.
X X X I ! I.
U ne autre difficulté qui tient de près à celle de la
quadrature du cercle, & de laquelle On peut même dire
que cette quadrature dépend , c ’eft i’ineommenfurabilité
de la diagonale du carré avec le côté; difficulté invincible
& générale pour toutes les grandeurs | que les
Géomètres appellent ïncommenfurables; il eft aile de faire
fentir que toutes ces difficultés ne viennent que des définitions
& des conventions arbitraires qu’on a faites, en
•pofant les principes de l’Arithmétique & de la G é o métrie
; car nous fuppofons en Géométrie, que les lignes
eroiffent comme les nombres 1 , 2 , 3, 4, 5 , &c. c ’eft-
à-dire’ ,-fuivant notre échelle d’arithmétique; & par une
correlpondance fous-entendue de l’unité de ffirface avec
l’unité linéaire, nous voyons que les furfaces des carrés
eroiffent comme 1 , 4 , 9 , 16, 2 5 , &c. Par Ces fuppo-
fitions, il eft clair que de la même façon que la fuite
1 , 2 , 3 , 4 , y , &c. eft l ’échelle des lignes, la fuite
1 , 4 , 9 , ï 6, 2 y , &c. eft auffi l’échelle des furfaces,
& que fi vous interpofez. dans cette dernière échelle
d’autres nombres, comme 2, 3 , 5 , 6, y, 8 , 1 0 , 1 1,
12, 13, 14, iy, 1 y , 18, 19, 20, 22, 23, 24, tous ces
nombres n’auront pas leurs correfpondans dans l ’échelle
des lignes, & que par conféqüent la ligne qui correfpond
à la furface 2 , eft une ligne qui n’a point d’expreffion
en nombres, & qui par conféqüent ne peut pas être
d ’A r i t h m é t i q u e mor a l e . 139
mefurée par l’unité numérique. Il feroit inutile de prendre
une partie de l ’unité pour mefure, cela ne change point
l’impoflibilité de l ’expreffion en nombres ; car û l’on prend
pour l’échelle des lignes IL i , f , 2,3-, 3 ,'!, 4 , &c. on
aura pour l’échelle correfpondante des furfaces^, 1, f ,
i l , p , ±1, iô , &c. ou plutôt on aura pour l’échelle
des lignes -}, f , | , £, | , | , f , f , &c, & pour celle des
furfaces tys £, &c - ce ftui retombe
dans le même cas que les échelles 1 , 2 , 3 , 4 , y , &c.
& 1, 4, 9, 16, 2y , &c. de lignes & de furfaces dont
l ’unité eft entière; & il en fera toujours de même, quelque
partie de l’unité que vous preniez pour mefùre, comme
- , ou j , ou j , &c. les nombres ïncommenfurables dans
l ’échelle ordinaire le feront toujours, parce que le défaut
de correlpondance de ces échelles fùbfiftera toujours.
Toute la difficulté des incommenfurables rte vient donc
que de ce qu’on a voulu mefùrer les furfaces comme les
lignes; or il eft clair qu’une ligne étant fuppofée l’unité,
vous ferez avec deux de ces unités, une ligne dont la
longueur fera double ; mais il n’eft pas moins clair qu avec
deux carrés, dont chacun eft pris de même pour l’unité ,
vous ne pouvez pas faire un carré. Tout cela vient de ce
que la matière ayant-trois différentes dimenfions ou plutôt
trois différens afpeéls fous lefquels nous la confidérons,
il auroit fallu trois échelles différentes d’arithmétique,
l ’une pour la ligne qui n’a que de la longueur, l ’autre
pour la fuperficie qui a de la longueur & de la largeur,
& la troifième pour le folide qui a de la longueur, de la
largeur & de la profondeur.
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