femblables ou identiques; ou plutôt c ’eft la perception
immédiate de leur identité.
I I T.
D a n s les fciences phiyfiques, l ’évidence eft remplacée
par la certitude; l'évidence n’eft pas fufceptible de
mefure, parce quelle n’a qu’une feule propriété abfolue,
qui eft la négation nette ou l ’affirmation «de la chofe qu’elle
démontre; mais la certitude n’ étant jamais d’un pofitif
abfolu, a des rapports que l’on doit comparer & dont on
peut eftimer la mefure. La certitude phyfique, c’eft-à-dire,
la certitude de toutes la plus certaine, n’eft néanmoins
que.la probabilité prefque infinie qu’un effet, un évènement
qui n’a jamais manqué d’arriver, arrivera encore
une fois; par exemple, puifque le Soleil is’eft toujours
levé , il eft dès-lors phyfiquement certain qu’il fe lèvera
demain; une raifon pour être, c ’eft d’avoir été;,: mais
une raifon pour, ceffer d ’être, c’eft d’avoir commencé
d’être; & par confisquent l’on.ne peut pas dire qu’il foit
également certain que le fbleil le lèvera toujours, à moins
de lui ffippofer une éternité antécédente, égale à la
perpétuité ffibféquente * autrement il finira puifqu’il a
commencé. Car nous ne devons juger de l’avenir que
par la vue du paffé; dès qu’une chofe a toujours été,
ou s’eft toujours faite de la même façon, nous devons
être affurés qu’elle lèra ou fe fera toujours de cette même
façon: par toujours, j’entends un très'-long temps, &
non pas Lune éternité abfolue, le toujours de l ’avenir
n’étant
D’A r ithmé t iq u e morale . 49
n’étant jamais qu’égal au toujours du paffé. L ’abfolu
de quelque genre qu’il foit, n’eft ni du reffort de la
Nature ni de celui de i’elprit humain. Les hommes ont
regardé comme des effets ordinaires & naturels, tous les
évènemens qui ont cette efjjèce de certitude phyfique;
un effet qui arrive toujours ceffe de nous étonner: au
contraire un phénomène qui n’auroit jamais paru, ou qui
étant toujours arrivé de même façon , cefferoit d’arriver
ou arriveroit d’une façon différente, nous étonneroit avec
raifon , & feroit un évènement qui nous paroîtroit fi extraordinaire,
que nous le regarderions comme furnaturel,
I Y.
C es effets naturels qui ne nous furprennent pas, ont
néanmoins tout ce qu’il faut pour nous étonner; quel
concours de caulès, quel affemblage de principes ne
faut-il pas pour produire un leul inlèéle, une feule plante !
quelle prodigieufe combinaifon d’élémens, de rnouve-
mens & de refforts dans la machine animale ! Les plus
petits ouvrages de la Nature font des fujets de la plus
grande admiration. C e qui fait que nous ne fommes point
étonnés de toutes ces merveilles, c ’eft que nous lommes
nés dans ce monde de merveilles, que nous les avons
toujours vues, que notre entendement & nos yeux y font
également accoutumés; enfin que toutes ont été avant &
feront encore après nous. Si nous étions nés dans un
autre monde avec une autre forme de corps & d’autres
lèns i nous aurions eu d’autres rapports avec les objets
Supplément. Tome IV. G