fons graves, comme ceux d’une große cloche ou d’une
longue corde ; l’expérience, comme l ’on vo it, au lieu
de donner ici un fait général, ne donne même pour les
oreilles muficiennes qu’un effet particulier, & encore cet
effet particulier fera différent de ce que prétend l’Auteur;
car un Muficien qui n’auroit jamais entendu parler du
fÿftème de M. Rameau, pourroit bien ne point entendre
la douzième & la dix-fèptième dans les fons graves ; &
quand même on le préviendrait que le fon de cette
groffe cloche qu’il entend n’eft pas un fon fimple,
mais compofé de trois fons, il pourroit convenir qu’il
entend en effet trois fons, mais il dirait que ces trois
fons, font le fon fondamental, la tierce & la quinte.
Il aurait donc été plus facile à M... Rameau de faire
recevoir ces derniers rapports, que ceux qu’il emploie,
s’il eût dit, que tout fon eft de fa nature compofé de
trois fons; fàvoir, le fon fondamental, la tierce & la
quinte, cela eût été moins difficile à croire, & plus aifë
à juger par l ’oreille, que ce qu’il affirme, en nous difant
que tout fon efl de fa nature compofé du fon fondamental,
de la douzième & de la dix - fèptième y mais
comme dans cette première fuppofition il n’auroit pti
expliquer la génération harmonique, il a préféré la fécondé
qui s’ajufte mieux avec les règles de fon art. Perfonne
ne l’a en effet porté à un plus haut point de perfedion
dans la théorie & dans la pratique que cet illuftre Muficien,
dont le talent fupérieur a mérité les plus grands éloges.
La fènûtion de plaifir que produit l ’harmonie, fèmble
À l ’H i s t o i r e N a t u r e l l e . 445
appartenir à tous les êtres doués du fens de l ’ouïe. Nous
avons dit, volume X I, in- j.? page j i , que l ’Éléphant a
le fens de l’ouïe très-bon, qu’il fe délede au ion des
inftrumens & paroît aimer la mufique ; qu’il apprend
aifément à marquer la mefure, à fe remuer en cadence,
& à joindre à propos quelques accens au bruit des
tambours & au fon des trompettes, & ces faits font
atteftés par un grand nombre de témoignages.
J ’ai vu auffi quelques chiens qui avoient un goût
marqué pour la mufique, & qui arrivoient de la baffe-
cour ou de la cuifine au concert, y reftoient tout le
temps qu’il durait, & s’en retournoient enfoite à leur
demeure ordinaire. J ’en ai vu d’autres prendre affez
exadement l’uniffon d ’un fon aigu qu’on leur faifoit
entendre de près en criant à leur oreille. Mais cette
efpèce d’inftind ou de faculté n’appartient qu’à quelques
individus; la plus grande partie des chiens font indifférens
aux fons muficaux, quoique prefque tous foient vivement
agités par un grand bruit comme celui des tambours,
ou des voitures rapidement roulées.
Les chevaux, ânes, mulets, chameaux, boeufs & autres
bêtes de fomme, paroiffent fopporter plus volontiers la
fatigue, & s’ennuyer moins dans leurs longues marches,
lorfqu’on les accompagne avec des inftrumens; c ’eft par
la même raifon qu’on leur attache des clochettes ou
fonnailles : l’on chante ou l ’on fiffie prefque continuellement
les boeufs pour les entretenir en mouvement dans
leurs travaux les plus pénibles, ils s’arrêtent & paroiffent