même quand la mer eft agitée. Leurs canots font fi légers qu’ils
les portent d’une feule main.
o.° Quand les Américains voient fur leurs côtes des gens qu’ils
ne connoiflent point, ils rament vers eux & font un grand difcours ;
mais on ignore fi c’efl quelque charme ou une cérémonie particulière
ufitée parmi eux à la réception des étrangers, car l ’un &
l ’autre ufage fe trouvent auffi chez les Kurdes. Avant de s’approcher
ils fe peignent ie vifage avec du crayon noir, & fe bouchent
les narines avec quelques herbes. Quand ils ont, quelque etranger
parmi e u x , ils paroiffent affables 8c veulent çonverfer avec lu i,
fans détourner les yeux de deffus les fiens. Us le traitent avec
beaucoup de foumiffion 8c lui préfentent du gras de baleine,
8c du plomb noir avec lequel ils fe barbouillent le vifage, fans
doute parce qu’ils croient que ces chofes font auffi agréables aux
étrangers qu’à eux-mêmes frf.
J ’ai cru devoir rapporter ici tout ce qui eft parvenu
à ma connoiflance de ces peuples fèptentrionaux de la
partie occidentale du nord de l’Amérique, mais j’imagine
que les voyageurs Rudes qui ont découvert ces terres en
arrivant par les mers au-delà de Kamtfchatka, ont donné
des defcriptions plus précités de cette contrée, à laquelle il
femble qu’on pourrait également arriver par l’autre côté,
c ’eft-à-dire, par la baie de Hudfon ou par celle de Baffin.
Cette voie a cependant été vainement tentée par la plupart
des nations commerçantes, & fur-tout par les Anglois
& les Danois ; & il eft à préfumer que ce fera par l’orient
qu’on achèvera la découverte de l ’occident, foit en partant
de Kamtfchatka, foit en remontant du Japon ou des îles
des Larrons, vers le nord & le nord-eft. Car l’on peut
M Journal étranger, mois de Novembre 176
préfumer, par plufieurs raifons que j’ai rapportées ailleurs,
que les deux continens font contigus, ou du moins très-
voifins vers le nord à l’orient de l ’Afie.
Je n’ajouterai rien à ce que j’ai dit des Efquimaux,
nom fous lequel on comprend tous les fauvages qui fe
trouvent depuis la terre de Labrador jufqu’au nord de
l’Amérique, & dont les terres fe joignent probablement
à celles du Groenland. On a reconnu que les Efquimaux
ne diffèrent en rien des Groënlandois, & je ne doute
pas, dit M. P. que les Danois, en s’approchant davantage
du p ô le , ne s’aperçoivent un jour que les Efquimaux
& les Groënlandois communiquent enfëmble. C e même
Auteur préfume que les Américains occupoient le Groën-
land avant l’année yoo de notre Ere, & il appuie fa
conjeéture fur ce que les Iflandois & les Norvégiens
trouvèrent, dès le huitième fiècle, dans le Groënland
des habitans qu’ils nommèrent Skralins. Ceci me paraît
prouver feulement que le Groënland a toujours été
peuplé, & qu’il avoit comme toutes les autres contrées
de la terre fes propres habitans , dont l’efpèce ou la race
fe trouve femblable aux Efquimaux, aux Lappons, aux
Samojedes & aux Koriaques, parce que tous ces peuples
font fous la même zon e, & que tous en ont reçu les
mêmes impreffions. La feule chofë fîngulière qu’il y ait par
rapport au Groënland, c ’eft comme je l’ai déjà obfervé,
que cette partie de la terre ayant été connue il y a bien
des fiècles, & même habitée par des cdlonies de Norv
è g e du côté oriental qui eft le plus yoifin de l’Europe,;