il doit fuffire d’être admis pour être affez loué ! pourquoi
les voûtes de ce lycée, ne forment-t-eiles jamais que des
échos multipliés d’éloges retentiffans ! pourquoi ces murs,
qui devraient être facrés, ne peuvent-ils nous rendre le
ton modefle & la parole de la vérité l une couche antique
d ’encens brûlé revêt leurs parois & les rend fourds à cette
parole divine qui ne frappe que l’ame! S’il faut étonner
l ’ouïe, s’il faut les éclats de la trompette pour fe faire
entendre; je ne le puis ; & ma voix dut-elle fe perdre
fans effet, ne bleffera pas au moins cette vérité fainte que
rien n’afflige plus après la calomnie que la fàuffe louange.
Comme un bouquet de fleurs afforties dont chacune
brille de fe s couleurs, & porte fon parfum,. l ’éloge doit
préfenter les vertus, les talens, les travaux de l’homme
célébré. Q u ’on pafle fous filence les vices, les défauts,
les erreurs; c ’eft retrancher du bouquet les feuilles def-
sèchées, les herbes épineufes & celles dont l ’odeur ferait
défagréable. Dans l ’hifloire, ce filence mutile la vérité;
il ne l’offenfe pas dans l’éloge. Mais la vérité ne permet
ni les jugemens de mauvaife foi, ni les fauffes adulations;
elle fe révolte contre ces menfonges colorés auxquels on
fait porter fon mafque. Bientôt elle fait juftice de toutes
ces réputations éphémères fondées fur le commerce &
l ’abus de la louange; portant d’une main l’éponge de
l ’oubli & de l’autre le burin de la gloire, elle efface fous
nos yeux les caractères du preftige, & grave pour la
poflérité les fèuls traits qu’elle doit confàcrer.
Elle fait que l ’éloge doit non-feulement couronner le
mérite, mais le faire germer; par ces nobles motifs elfe
a cédé partie de fon domaine, le panégirifte doit fe taire
fur le mal moral, exalter le bien, préfenter les vertus
dans leur plus grand éclat, (mais les talens dans leur vrai
jour ) & les travaux accompagnés comme les vertus, de
ces rayons de gloire dont la chaleur vivifiante fait naître
le defir d’imiter les unes & le courage pour égaler les
autres : toutefois en mefurant les forces de notre foible
nature qui s’ effrayerait à la vue d’une vertu gigantefque
& prend pour un fantôme tout modèle trop grand ou
trop parfait.
L ’éloge d’un Souverain fera fuffifàmment grand, quoique
fimple, fi l’on peut prononcer comme une vérité
reconnue; notre R oi v e u t t e bien et dés iré
D’Être aimé ; la toute-puiffance compagne de fà volonté
ne fe déploie que pour augmenter le bonheur de les
peuples ; dans l ’âge de la diffipation il s’occupe avec
affiduité; fon application aux affaires annonce l’ordre &
la règle; l’attention férieufe de l’efprit, qualité fi rare
dans la jeuneffe, femble être un don de naiffance qu’il
a reçu de fon augufte Père, & la jufteffe de fon difcer-
nement n’efl-elle pas démontrée par les faits ! il a choifi
pour coopérateur le plus ancien, le plus vertueux & le plus
éclairé de fès hommes d’Etat * , grand Miniftre éprouvé
par les revers, dont l’ame pure & ferme, ne s’eft pas
plus affaiffée fous la difgrâce qu’enflée par la faveur : mon
coeur palpite au nom du créateur de mes Ouvrages &
* M. le Comte de Maurepas.