gloire. Nulle prétention malgré fon mérite éminent, nui
empreffement à fe faire valoir, nul penchant à parler de
fo i, nul defir, ni apparent, ni caché de fe mettre au-deffus
des autres, fes propres talens :n’étoierit à fes yeux que
des droits qu’il avoit acquis pour être plus modefle, &
il paroiffoit n’avoir cultivé fon efprit que pour élever
fon ame & perfectionner fes vertus.
Vous , Monfieur, qui jugez fi bien de la vérité des
peintures, auriez-vous faifi tous les traits qui vous font
communs avec votre prédéceffeur dans lefquiffe que je
viens de tracer ! fi l’art que vous avez chanté pouvoir
s’étendre jufqu’à peindre les âmes, nous verrions d’un
coup-d’oeil ces reffemblances heureufes que je ne puis
qu’indiquer; elles confident également & dans ces qualités
du coeur fi précieufes à la foeiété, & dans ces talens de
i’efprit qui vous ont mérité nos fuffrages. Toute grande
qu’eft notre perte, vous pouvez donc, Monfieur, plus
que la iréparer : vous venez d’enrichir les arts & notre
langue d’un ouvrage qui fuppofe , avec la perfeétion du
goût, tant de connoiffances différentes, que vous feu!
peut-être en poffédez les .rapports & l’enfemble ; vous
feul, & le premier, avez ofé tenter de repréfonter par
des fons harmonieux les effets des couleurs; vous avez
effayé de faire pour la peinture ce qu’Horaçe fit pour
la poëfie, un monument plus durable que le bronpe. Rien
ne garantira des outrages du temps ces tableaux précieux
des Raphaël, des Titien, des Corrège; nos arrières-neveux
regretteront ces chefs-d’oeuvres, comme nous regrettons
nous-mêmes ceux des Zeuxis & des Appelles; fi vos
leçons favantes font d’un fi grand prix pour nos jeunes
artiftes, que ne vous devront pas dan;s les fiècles futurs
l ’art lui-même, & ceux qui le cultiveront J Au feu de
vos lumières ils pourront réchauffer leur génie, ils retrouveront
au moins, dans la fécondité de vos principes &
dans la fàgeffe de vos préceptes, une partie des fecours
qu’ils auraient tirés de ces modèles fublimes, qui ne
fubfifteront plus que par la renommée.