latroublent beaucoup, lorfqu’elles ne peuvent pas fe réunir
entièrement; au refte cette impoflibilité de réunion parfaite
des, images des deux yeux dans les vues courtes comme
la mienne, .vient fouvent moins de l’inégalité de force
dans les yeux, que d’une autre caufe; c ’efl la trop grande
proximité des deux prunelles , ou, ce qui revient au
même, l’angle trop ouvert des deux axes optiques, qui
produit en partie ce défaut de réunion. On fent bien
que plus on approche un petit objet des yeux, plus aufti
l ’intervalle des deux prunelles diminue; mais comme il
y a des bornes à cette diminution, & que les yeux font
pofés.de façon qu’ils ne peuvent faire un angle plus
grand que de foixante degrés tout au plus par le;s deux
rayons vifuels, il fuit que toutes les fois qu’on regarde
de fort près avec les deux yeux, la vue eft fatiguée &
moins diftinéte qu’en ne regardant que d’un feul oeil,
mais cela n’empêche pas que l’inégalité de force dans
les yeux, ne produifo le même effet, & que par conféquent
il n’y ait beaucoup d’avantage à écarter l’oeil foible,, &
l ’écarter de façon qu’il reçoive une image différente de
celle dont l’oeil le plus fort eft occupé.
S ’il refte encore quelques fcrupules à cet égard, il eft.
aile de les lever par une expérience très-facile à faire; je
fuppofe qu’on ait les yeux égaux ou à peu-près égaux,
il n’y a qu’à prendre un verre convexe & le mettre à
un demi-pouce de l ’un des yeux, on rendra par-là cet
oeil fort inégal en force à l ’autre; fi l ’on veut liré avec
les deux yeux, on s’apercevra d’une confufion dans les
À l ’H i s t o i r e N a t u r e l l e . 429
lettres , caufée par cette inégalité , laquelle confufion
difparoîtra dans l’inftant qu’on fermera l’oeil offufqué par
le verre, & qu’on ne regardera plus que d’un oeil.
Je fais qu’il y a des gens: qui prétendent que quand
même on a les yeux parfaitement égaux en force , on ne
voit ordinairement que d’un oeil, mais c’eft une idée
fans fondement qui eft contraire à l’expérience ; on a
vu ci-devant qu’on voit mieux des deux yeux que d’un
fèul lorfqu’on les a égaux, il n’eft donc pas naturel de
penfèr qu’on chercheroit à mal voir en ne fe fèrvant
que d’un oeil lorfqu’on peut voir mieux en fe fèrvant
des deux. Il y a plus, c ’eft qu’on a un autre avantage
très-confidérable à fe fervir des deux yeux lorfqu’ils font
de force égale ou peu inégale ; cet avantage confifte à
voir une plus grande étendue, une plus grande partie
de l’objet qu’on regarde; fi on voit un globe d’un feul
oeil on n’en apercevra que la moitié, fi on le regarde
avec les deux yeux on en verra plus de la moitié, &
il eft aifo de donner pour les diftances ou les grofteurs
différentes, la quantité qu’on voit avec les deux yeux de
plus qu’avec un feul oeil; ainfi on doit fe fervir, & on
fe fort en effet dans tous les cas des deux yeux lorfqu’ils
font égaux ou peu inégaux.
A u refte, je né prétends pas que l ’inégalité de force
dans les yeux foit la foule caufe du regard louche, il
peut y avoir d’autres caufes de ce défaut, mais je les
regarde comme des caufos accidentelles, & je dis feulement
que l ’inégalité de force dans les yeux eft une