Sans nous arrêter pour rendre raifon de ce phénomène à tant
de fyftèmes incomplets de ces Philofophes , étayons nos idées de
réflexions phyfiques d’un favant Naturalifte qui a porté dans ce
fïècle le flambeau de la fciencé dans le cahos de la Nature. Les
élémens de notre corps font compofés de particules fimilaires &
organiques qui font tout-à-Ia-fois nutritives & productives, elles
ont une exiftence hors de nous, une vertu intrinfèque inaltérable.
En changeant de pofition, de combinaifon & de forme, leur
tiflù ni leur mafle ne dépériflent point, leurs propriétés originelles
ne peuvent s’altérer; ce font de petits reflorts doués d’une force
aélive en qui réfident ies principes du mouvement & de la vitalité,
qui ont des rapports infinis avec toutes les chofes créées, qui
font fucceptibles d’autant de changemens & de réfultats divers qu’ils
peuvent être mis en jeu par des caufes différentes. Notre corps
n ’a d’adhérence à la vie qu’autant que ces molécules organiques
confervent dans leur intégrité leurs qualités virtuelles & leurs
facultés génératives, qu’elles fe tiennent articulées enfemble dans
une proportion exaéle,’ & que leurs aétions raflemblées concourent
également au mécanifme général ; car chaque partie de nous-mêmes
eft un tout parfait qui a un centre où fon organifation fe rapporte,
& d’où fon mouvement progreflîf & fimultané, fe développe, fe
multiplie & fe propage dans tous les points de la fubftance.
Nous pouvons donc dire que ces molécules organiques, telles
que nous les repréfentons, font les germes communs, les femences
univerfelles de tous les règnes, & qu’elles circulent & font déterminées
en tout lieu : nous les trouvons dans les alimens que
nous prenons, nous ies humons à chaque inllant avec l ’air que
nous refpirons; elles s’ingèrent & s’incorporent en nous, elles
réparent par leur établiflement lo c a l, lorfqu’elles font dans une
quantité fuflifante, les déperditions de notre corps, & en conjuguant
leur aétion & leur vie particulière, elles fe convertilfent en notre
propre nature Si nous prêtent une nouvelle vie & des forces
nouvelles.
Mais C leur intufufception Sc leur abondance font telles que
leur quantité excède de beaucoup celle qui eft nécefiaire à l ’entretien
& à l ’accroiffement du corps, les particules organiques
qui ne peuvent être abforbées pour fes befoins, refluent aux
extrémités des .vaifleaux, rencontrent des canaux oblitérés, fe
ramafient dans quelque réfervoir intérieur, & félon le moule qui
les reçoit, elles s’aflimilent, .dirigées par les loix d’une affinité
naturelle & réciproque, & mettent au jour des efpèces nouvelles,
des êtres animés & vivans, & qui n’ont peut-être point eu de
•modèles & qui n’exifteront jamais plus.
E t quand en effet font - elles plus abondantes, plus ramaffées
que lorfque la Nature accomplit la deftrudlion fpontariée & parfaite
d’un corps organiféî Dès i’inftant que la vie eft éteinte, toutes
les molécules organiques qui compofent la fubftance.vitale de notre
corps, lui deviennent excédantes & fuperflues ; la mort anéantit
leur harmonie & leur rapport, détruit leur combinaifon, rompt
•les liens qui les enchaînent & qui les unifient enfemble; elle en
• fait l ’entière diflëétion & la vraie analyfe. L a matière vivante fe
fépare peu-à-peu de la matière morte; il fe fait une divifion réelle
des particules organiques & des particules brutes; celles-ci qui ne
font qu’accefloires, & qui ne fervent que de bafe & d’appui aux
-premières, tombent en lambeaux & fe perderft dans la pouflière,
Candis que des autres fe dégagent d’elles-mêmes, affranchies de
tout ce qui les captivoit dans leur arrangement & leur fituation
particulière ; livrées à leur mouvement i intellin , elles jouiflent
d’une liberté illimitép & d’une anarchie entière, & cependant
difciplinée, parce que la puiflance & les loix de la Nature,
furvivent à fes propres ouvrages. Elles s’amoncèlent encore,
s’anallomofent & s’articulent , forment de petites maffes & de
•petits embryons qui fe développent, & produifent, félon leur
afiëmblage & les matrices où elles font recélées , des corps
mouvans, des êtres animés & vivans. L a Nature, d’une manière
également fa c ile , régulière & fpontajiée , opère par le