diftinéte. Quand on paffe ces limites, foit au-deffus,
foit au - deffous , il fe forme une pénombre qui rend
les caractères confits & quelquefois vacilians, mais avec
dss yeux de force inégale, ces limites de la vue diftinéte
font fort refferrées; car fuppofons que l ’un des yeux foit
de moitié plus foible que l’autre, c ’eft-à-dire , que quand
avec un oeil on voit diftinétement depuis huit jufqu’à
vingt pouces, on ne puiffe voir avec l’autre oeil que depuis
quatre pouces jufqu’à dix ; alors la vifion opérée par les
deux yeux fera diftinéte & confufe depuis dix jufqu’à
vingt, & depuis huit jufqu’à quatre ; en forte qu’il ne
réitéra qu’un intervalle de deux pouces, lavoir, depuis
huit jufqu’à dix, où la vifion pourra fo faire diftinétement,
parce que dans tous les autres intervalles la netteté de
l ’image de l’objet vu par le bon oeil, eft ternie par la
confofion de l’image du même objet vu par le mauvais
oeil : o r , cet intervalle de deux pouces de vue diftinéte
en fe fervant des deux yeux, n’efl que la fixième partie
de l’intervalle de douze pouces, qui eft l ’intervalle de
la vue diftinéte, en ne fe fervant que du bon oeil; donc
il y a un avantage de cinq contre un à fo forvir du bon
oeil foui, & par conféquent à écarter l’autre.
On doit confidérer les objets qui frappent nos yeux,
comme placés indifféremment & au hafard à toutes les
diftances différentes auxquelles nous pouvons les apercevoir
; dans ces diftances. différentes il faut diftinguer
celles où ces mêmes objets fo peignent diftinétement à
nos yeux, & celles où nous ne les voyons que confufément ;
À l ' H i s t o i r e N a t u r e l l e . 421
toutes les fois que nous n’apercevons que confufément les
objets, les yeux font effort pour les voir d’une manière
plus diftinéte , & quand les diftances ne font pas de
beaucoup trop petites ou trop grandes, cet effort ne fo
fait pas-vainement. Mais en ne faifant attention ici qu’aux
diftances auxquelles on aperçoit diftinétement les objets,
on'font aifément que plus il y a de ces points de diftance,
plus aufïï la puiffance des yeux, par rapport aux objets,
eft étendue; & qu’au contraire plus ces intervalles de vue
diftinéte font petits, & plus la puiffance de voir nettement
eft bornée ; & lorfqu’il y aura quelque caufe qui rendra
ces intervalles plus petits, les yeux feront effort pour les
étendre , car il eft naturel de penfor que les yeux , comme
toutes les autres parties d’un corps organifé, emploient
fous les refforts de leur mécanique pour agir avec le
plus grand avantage; ainfî dans le cas où les deux yeux
font de force inégale, l’intervalle de vue diftinéte fo
trouvant plus petit en fe fervant des deux yeux qu’en ne
fe fervant que d’un oe il, les yeux chercheront à fo mettre
dans la fituation la plus avantageufe, & cette fituation la
plus avantageufe eft que l’oeil le plus fort agiffe foui, &
que le plus foible fe détourne.
Pour exprimer tous les cas, fuppofons que a ■— c
exprime l’intervalle de la vifion diftinéte pour le bon oeil ,
& b — ---- l’intervalle de la vifion diftinéte pour l’oeil
foible, b — c exprimera l’intervalle de la vifion diftinéte:
des deux yeux enfemble, & l’inégalité de force des yeuxfera.