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A D D I T I O N
A l ’article q ui a p o u r titr e , V a rie'te's dans
l ’ejpèce humaine, vol. III, in-4..0 page 3 7 1*
D ans la fuite entière de mon Ouvrage fur i’Hiftoire
Naturelle, il n y a peut-être pas un fèul des articles qui
foit plus fufceptible d’additions & même de corre&ions
que celui des variétés de l’efpèce humaine; j’ai néanmoins
traité ce fujet avec beaucoup d’étendue, & j’y ai donné
toute l ’attention qu’il mérite; mais on lent bien que j’ai
été obligé de m’en rapporter, pour la plupart des faits,
aux relations des Voyageurs les plus accrédités; malheu-
reufement ces relations fidèles, à de certains égards, ne
le font pas à d’autres; les hommes qui prennent la peine
d’aller voir des chofes au loin, croyent fe dédommager
de leurs travaux pénibles en rendant ces chofes plus
merveilleufes ; à quoi bon fortir de fon pays fi l ’on n’a
rien d’extraordinaire à préfenter ou à dire à fon retour !
de-là les exagérations, les contes & les récits bizarres dont
tant de Voyageurs ont fouillé 'leurs écrits en croyant les
orner. Un ejfprit attentif, un Philofophe inftruit reconnoît
aifément les faits purement controuvés qui choquent la
vraifemblance ou l’ordre de la Nature; il diftingue de
même le faux du vrai, le merveilleux du vraifemblable,
& fe met fur-tout en garde contre l’exagération. Mais
dans les chofes qui ne font que de fimple defcription,
a l ’H i s t o i r e N a t u r e l l e . 4 5 5
dans celles où l’infpeétion & même le coup-d’oeii foffiroit
pour les défigner, comment diftinguer les erreurs qui
fembient ne porter que fur des faits aulfi fimples qu’in-
différens ! comment fe refufer à admettre comme vérités
tous ceux que le relateur allure, lorfqu’on n’aperçoit pas
la fource de fes erreurs, & même qu’on ne devine pas les
motifs qui ont pu le déterminer à dire faux.' ce n’elt qu’avec
le temps que ces fortes d ’erreurs peuvent être corrigées,
c ’elt-à-dire, lorfqu’un grand nombre de nouveaux témoignages
viennent à détruire les premiers. Il y a trente
ans que j ’ai écrit cet article des variétés de l’elpèce
humaine; il s’eft fait dans cet intervalle de temps plufieurs
voyages, dont quelques-uns ont été entrepris & rédigés
par des hommes inftruits ; c ’ell d’après les nouvelles
connoiffances qui nous ont été rapportées que je vais
tâcher de réintégrer les chofos'dans la plus exaéle vérité,
foit en fupprimant quelques faits que j ’ai trop légèrement
affirmés for la foi des premiers Voyageurs, foit en confirmant
ceux que quelques critiques ont impugnés & niés
mal-à-propos.
Pour fuivre le même ordre que je me fois tracé dans
cet article, je commencerai par les peuples du nord.
J ’ai dit que les Lappons, les Zembliens, les Borandiens,
les Samojedes, les Tartares foptentrionaux, & peut-être
les Oftiaques dans l ’ancien continent ; les Groënfandois
& les Sauvages au nord des Elquimaux dans l’autre continent,
fembient être tous d’une feule & même race qui
s’eft étendue & multipliée le long des côtes des mers