Je termine ici l’extrait de ce Mémoire de M. * * *
qui m’eft venu voir de fort loin pour m’en certifier les
faits; c ’eft un homme bien fait, très-vigoureux de corps
& en même temps fpirituel, honnête & très-religieux ;
je ne puis donc douter de fa véracité. J ’ai vu fous mes
yeux l’exemple d’un autre eccléfiaftique qui, défefpéré
de manquer trop fouvent au devoir de fon état, s’eft
fait lui-même l ’opération d’Origène : La rétention trop
longue de la liqueur féminale peut donc caufer de grands
maux d’efprit & de corps, la demence & 1 epilepfie,
car la maladie de M. * * * n’étoit qu’un délire épileptique
qui a duré fix mois. La plupart des animaux entrent en
fureur dans le temps du rut, ou tombent en convulfion
lorfqu’ils ne peuvent fatisfaire ce befoin de Nature ; les
perroquets, les forins, les bouvreuils & plufieurs autres
oifeaux , éprouvent tous les effets d’une véritable épilepfie
lorfqu’ils font privés de leurs femelles. Ôn a fouvent
remarqué dans les ferins que c ’eft au moment qu’ils
chantent le plus fort. O r , comme je l’ai dit (a), le chant
eft dans les oifeaux l’expreffion vive du fontiment d’amour ;
un ferin féparé de fa femelle qui la voit fans pouvoir
l ’approcher, ne ceffe de chanter & tombe enfin tout-
à-coup faute de jouiffance ou «plutôt de l’émiffion de
cette liqueur de vie, dont la Nature ne veut pas qu’on
renferme la furabondance , & qu’au contraire elle a
(a) Hiftoire Naturelle des Oifeaux, tçme I. Difcours fur la nature
des Oifeaux- ,
deflinee
deflinée à fe répandre au dehors, & paffer de corps
en corps.
Mais ce n eft que dans la force de l ’âge & pour les
hommes vigoureux, que cette évacuation eft abfolument
neceflaire, elle n eft meme fàlutaire qu’aux hommes qui
favent fe modérer; pour peu qu’on fe trompe en prenant
fes defirs pour des befoins, il réfulte plus de mal de la
jouiflance que de la privation ; on a peut-être mille
exemples de gens perdus par les excès, pour un foui
malade de continence. Dans le commun des hommes,
des que 1 on a palfe cinquante-cinq ou foixante ans,
on peut garder en confidence & fans grand tourment
cette liqueur, qui, quoique auffi abondante, eft bien
moins provocante que dans la jeuneffe, c ’eft même un
baume pour 1 âge avance ; nous finiffons à tous égards
comme nous avons commencé.1 L ’on fait que dans l ’enfance,
& jufqu’à la pleine puberté, il y a de l ’éredion
fans aucune emiffion, la meme chofo fo. trouve dans la
vieilleffe, l ’éredion fo fait encore fentir affez long-temps
après que le befoin de l’évacuation a cefte, & rien ne
fait plus de mal aux vieillards que de fo laifler tromper
par ce premier ligne qui ne devrait pas leur en impofor,
car il n eft jamais aufti plein ni auffi parfait que dans la
jeuneffe, il ne dure que peu de minutes, il n’eft point
accompagné de ces aiguillons de la chair, qui fouis nous
font fentir le vrai befoin de nature dans la vigueur de l’âge;
ce n’eft ni le toucher ni la vue qu’on eft le plus preffe
de fatisfaire, c ’eft un fens différent, un fons intérieur
Supplément. Tome IV D d d