nombre, qu’en très-peu de temps leur corps en fourmille
; en forte que ces hommes qui ne fe nourri fient
que d’infèètes , font à leur tour mangés par ces mêmes
infeétes. Quoique ce fait m’ait toujours paru dans l ’ordre
de la Nature, il feroit incroyable pour bien des gens, û
nous n’avions pas d’autres faits analogues & même encore
plus pofitifs.
Un très-habile Phyficien & Médecin de Montpellier,
M. Moublet, a bien voulu me communiquer , avec fès
réflexions , le Mémoire fuivant, que j ’ai cru devoir
copier en entier.
Une perfonne âgée de quarante-fix ans, dominée depuis longtemps
par la paffion immodérée du vin , mourut d’une hydropilie
afcite, au commencement de mai 1750 . Son corps refta environ
un mois & demi enléveli dans fa fbffe où il fut dépofé.& couvert
de cinq à fix piêds de terre. Après ce temps., on l’en tira pour
en faire la tranflation dans un caveau n eu f, préparé dans un endroit
de l ’égîife éloigné de la fofTe. L e cadavre n’exhaloi t aucune
mauvaife odeur; mais quel fut l’étonnement des âffiftans, quand
l ’intérieur du cercueil & le linge dans lequel il étoit enveloppé ,
parurent abfolument noirs, & qu’il en fortit par la fecouffe &
le mouvement qu’on y avoit excité , un éffaim ou une nuée de
petits infeétes ailés , d’une couleur noire , qui fe répandirent au
dehors. Cependant on le tranfporta dans le caveau qui fut Scellé
d’une large pierre qui s’ajufloit parfaitement. L e Surlendemain! on
vit une foule des mêmes animalcules qui erroient & voltigebient
autour des rainures & fur les petites fentes de la pierre Où ils
étoient particulièrement attroupés. Pendant les trente à quarante
jours qui Suivirent l ’exhumation , leur nombre y fut prodigieux,
quoiqu’on en écrafât une partie en marchant continuellement
delTus. Leur quantité conlidérable ne diminua enfuite qu’avec le
temps,
temps, & trois mois s’étoient déjà écoulés qu’il en exiftoit
encore beaucoup.
Ces infeétes funèbres avoient le corps noirâtre; ils avoient
pour la figure & pour la forme une conformité exaéfe avec les
moucherons qui fucent la lie du v in ; ils étoient plus petits, &
paroilîoient entr’eux d’une groffeur égale ; leurs ailes étoient
tiffues & deffinées dans leur proportion en petits réfeatix, comme
celles des mouches ordinaires ; ils en faifoient peu d’u fage, ram-
poient prefque toujours, 6c malgré leur multitude ils n’excitoient
aucun bourdonnement.
Vus au microfcope, ils étoient hérilfés fous le ventre d’un
duvet fin , légèrement fillonné & nuancé en iris , de différente
couleur, ainfi que quelques vers apode-s, qu’on trouve dans des
plantes vivaces. Ces rayons colorés étoient dûs à des petites
plumes fquammeufes, dont leur corcelet étoit inférieurement
couvert 6c dont on auroit pu facilement les dépouiller, en fe
fervant de la méthode que Swammerdan employoit pour en
déparer le papillon de jardin.
Leurs yeux étoient luftrés comme ceux de la mujcacryjophis
de Goëdaert. Ils n’étoient armés ni d’antennes, ni de trompes,
ni d’aiguillons; ils portoient feulement des barbillons à la tête, 6c
leurs pieds étoient garnis de petits maillets ou de papilles extrêmement
légères, qui s’étendoient jufqua leurs extrémités.
Je ne les ai confidérés que dans l ’état que je décris: quelque
foin que j ’aie apporté dans mes recherches * je n’ai pu reconnoître
aucun indice qui me f ît préfumer qu’ils aient palfé par, celui de
larve & de nymphe; peut-être plufieurs raifons de convenance
& de probabilité, donnent lieu de conjeéturer qu’ils ont été des
vers microfcopiques d’une efpèce particulière, avant de devenir
ce qu’ils m’ont paru. En les anatomifant, je n’ai découvert aucune
forte d’enveloppe dont ils puffent fe dégager, ni aperçu fur le
tombeau aucune dépouille qui ait pu leur appartenir. Pour éclaircir
& approfondir leur origine, il auroit été nécelfaire, 6c il n’a pas
Supplément. Tome IV. X x