donne beaucoup qui font plus que fufpe&s î il admet 6c
avance ces faits, dès qu’ils peuvent favorifer fon opinion ;
il veut qu’on le croie fur parole & fans citer de garans.
Par exemple, fur ces grenouilles qui beuglent, dit - il,
comme des veaux ; fur la chair de l’iguane qui donne le
mal vénérien à ceux qui la mangent ; fur le froid glacial
de la terre à un ou deux pieds de profondeur, &c. II
prétend que les Américains en général font des hommes
dégénérés; qu’il n’eft pas aifé de concevoir que des
êtres au fortir de leur création , puiffent être dans
un état de décrépitude ou de caducité ( f ) , & que
c ’eft - là l’état des Américains; qu’il n’y a point de
coquilles ni d’autres débris de la mer fur les hautes
montagnes, ni même fur celles de moyenne hauteur (g);
qu’il n’y avoit point de boeufs en Amérique avant fà
découverte (h); qu’il n’y a que ceux qui n’ont pas alfez
réfléchi fur la conftitution du climat de l’Amérique, qui
ont cru qu’on pouvoit regarder comme très-nouveaux
les peuples de ce continent ( i) ; qu’au-delà du quatre-
vingtième degré de latitude, des êtres conftitués comme
nous, ne fauroient refpirer pendant les douze mois de
l’année, à caufe de la denfité de i’atmofphère (k ); que
( f ) Recherches fur les Américains, tome I, page 24,
(g ) Idem, ibidem, page 25.
(h) Idem, ibidem, page 133.
( i ) Idem, ibidem, page 238.
(k ) Idem, ibidem, page 296,
les
À l ’H i s t o i r e N a t u r e l l e . 529
les Patagons font d’une taille pareille à celle des Européens,
&c. ( I ) ; mais il eft inutile de faire un plus long
dénombrement de tous les faits faux ou fufpeéts que cet
Auteur s’eft permis d’avancer avec une confiance qui
indifpofèra tout Leéleur ami de la vérité.
L ’imperfeétion de nature qu’il reproche gratuitement
à l’Amérique en général, ne doit porter que fur les animaux
de la partie méridionale de ce continent, lefquels fo font
trouvés bien plus petits & tous differens de ceux des
parties méridionales de l’ancien continent;
E t cette imperfection, comme le dit très-bien le judicieux &
éloquent Auteur de l’Hiftoire des deux Indes, ne prouve pas la
nouveauté de cet hémifphère, mais fa renai(Tance ; il a dû être
peuplé dans le même temps que l’ancien, mais il a pu être fub-
mergé plus tard ; les offemens d’éléphans, de rhinocéros que i’on
trouve en Amérique, prouvent que ces animaux y ont autrefois
habité (m).
II eft vrai qu’il y a quelques contrées de l’Amérique
méridionale , fur-tout dans les parties baffes du continent,
telles que la Guyane, l’Amazone, les terres baffes de
l ’Ifthme, &c. où les naturels du pays paroiffent être moins
robuftes que les Européens; mais c ’eft par-des caufès
locales & particulières. ACarthagène, leshabitans, foit
Indiens, foit Etrangers, vivent pour ainfi dire dans un
bain chaud pendant fix mois de l ’été ; une tranfpiration
trop forte & continuelle leur donne la couleur, pâle &
livide des malades. Leurs mouvemens fe reffentent de la
( l) Recherches fur les Américains, tome I , page J j £•
MH Hiftoire philofophique & politique, tome V I>page 2ç2.
Supplément. Tome IV. X x x