V O Y A G E S D E C O R N E I L L E LE B R U N .
M..Fcvr.
Accident
fâcheux.
bûmes largement au bniit du canon.
Pendant routes ces rejouïiTances,
un m.irelot Ru/Jien eut l'imprudcncc
de mettre la main à l'embouchure
d'un canon en reçut une blei'
bombardier étant prêt on donna le i^o^.
iîgnal, pour avertir ceux qui étoient 17. Tevr.
dans la plaine de fe retirer. Nous
Ibrtimes alors de la chaloupe, Se
on mit le feu à la fuice. La bombe
s'etant elevée allez haut éclata en
iure, qui le fit tomber du haut en tombant. Sa Majefte eut la bonté
b a s , où il fe caila apparemment ^ de me demander fi je Ibuhaitois d'en
quelques côtes. On tâcha de ca- voir tirer quelques autres, il quoi
cher cet accident au C z a r ; mais ^ j e repondis que cela n'étoit pas nece
Prince s'en étant apperçu alla ceilaire. Je l'accompagnai enfiiite
voir ce pauvre milerablcjic trouva jufques chez Mr. Sleits , & peu
qu'il tiroit à fil derniere heure,
Nous nous leparàmeslur les huit
heures du ibir, 5c arrivâmes à dix
heures à Feromfe 3 par un tems pluvieux.
'LcfeizÎeme 3 je me preparai
à retourner à i V ^ o « , avec mes trois
compagnons en aiant obtenu la
permiflîon du Czar. Mais comme
la pluie avoit rcnduleschemins
fort mauvais, nous fumes obligez
de nous pourvoir de 8. chariots,
dont nous fîmes ferrer les roues.
L'.'lutem L e ¿iix-feptieme au matin nous prî-
?on é du congé de fa M a j e f t é , q u i nous
Czar à donna fa main àbaifer,&:puisnous
après à fa demeure, qui n'en etoit
pas eloignée, où j'eus l'honneur de
prendre congé d'Èlle. Ce Prince
m'embralR, & me d i t , comme à
l'ordinaire. Dieu vousg^rde.
Il croit trois heures après midi
quand je revins à mon quartierj
d'où je me préparai à partir inceffamment,
après avoir fait un petit
repas, j e remerciai le Contre-Amiral
de rhonneur qu'il m'avoit f a i tj
5c de toutes fes honnêtetez, & le laiffai
en meilleur état que je ne l'avois
trouvé, dont j'eus bien de la joye.
C'eit un très-galant homme, fort
;-cmbrafiaen nous fouhaitant un bon eilimé de tout le monde, 6c partivoyage.
Elle nous recommanda en
même tems d'aller Voir quelques
mortiers, qui étoient fur le bord J tomba de la neige pendant la nuit,
de la riviere à deux vi'erjies de la j 6c en fuite une petite pluie. Le dix- °
•vùlle, ce que nous fîmes fans nous huitieme au matin nous nous trouvâmes
y arrêter. Ils étoient contre une coiine,
proche d'une grange, où ils
avoient été fondus. Sur le midi je
reçus ordre demerendreencoreune
fois auprès du Czar. Il fe divertiffoit
encore à faire voile fur la glace:
fa barque fut renvcrfée en tourglace.
du Czar.
Nous partîmes fur le foir, &: il Depart
à 58. li'erjles de f^eronifi,
aiant trois chevaux à chaque chariot
, qui nous menèrent par le
même chemin que nous étions venus.
Nous obfcTvâmes que la plupart
j des Kabacks ou maifons du Czar,
nant trop fubitementjmais il fere-1 du côté de Feronife, étoient habile
va d'abord. Une demi heure a-1 tées par des CircaJJiens. Ces gens-là Maniérés
près il m'ordonna de le fuivrefeul. | font fort propres, & tiennent leurs
II fe mit dans un traîneau de louage ^ maifons de même, ils font de bonne
à deux chevaux, dont il en tomba un ! humeur 6c vivent fort agréablement,
dans un trou, mais on l'en tira bien fe divertiÎTant tous les jours à jouer
tôt , l'autre étant demeuré fur la du violon , & d'un autre inftru-
Il me fit alTeoir auprès de | ment à corde,
lui en me difant,^//^?»^ à. la chaîoii- ' ' "
f e , je veux que vous voyiez tir ernne
bombe, parce que vous n'y étiez pas
lors qu^on les a déchargées. Y étant
arrivez, nous examinâmes la chaloupe
la machine de bois fixée
au milieu, où l'on met le mortier,
qu'on tourne comme on veut.
On trouve de ces
joueurs d'inftrumens , dans toutes
les maifons de fa Majefté, jufques
â celle du Prince Alexandre. Ils ne
manquent pas de jouer au(lî-tôt
qu'on arrive , & ils vendent ordinairement
de l'hydromel 8c de l'eau
de vie: il fe trouve même des fem-
Le j mes parmi eux , qui font des honnêteculierement
170^. nétetez aux étrangers. Leurs habits
18. Fevr. font linguliers 6c difterent entièrement
de ceux des RnJJicns , 6c fur
tout ceux des femmes. Leur habillement
ordinaire eft une chemife,
avec une ceinture, autour de laquelle
elles fraifent une piece d'étofe
rayée , qui leur ' pend jufques aux
pieds comme une jupe. Elles ont
un linge blanc entortillé autour
de la tête , ôc une partie du menton
couvert. Un bout de ce linge
efl: plaifamment r e t r o u f i e f u r l e c ô té
de la t ê t e , & l e s autres en font quelquefois
detachez. Elles ont auflî
un linge froncé fur le f r o n t , qui 1702.
leur palle par-deflùs la t ê t e , 6c qui 18. Fevil
eft plat par derriere , à la manière
des Arabes 8c des en Orient.
Leur chemife eft froncée deux
doigts de l a r g e a u t o u r d u c o l , c o m -
me on portoit anciennement les manchettes.
Mais on en jugera mieux
par la taille douce , que j'ai deiîînée
en p e t i t , d'après une des plus
agréables , de la maniéré que nous
la trouvâmes dans fon poêle. Il y
avoit auprès d'elle une fervante occupée
à paîtrir du pain > 6c quelques
i enfans aiTis fur le four à leur ma»
C l iU \ssrv,N"
niere. Il étoit 5. heures après-midi
lors que nous partîmes de ce lieulà
, par un tems humide mêlé de
neige. Une heure après il commença
à gêler avec un vent de nord violent.
Après avoir avancé 15. werjles^
nous arrivâmes à une petite riviere,
en partie dégelée, mais t r o p profonde
pour la paifer à gué. Nous en
cherchâmes pourtant un pendane
deux heures de tems , mais inutilement.
Enfuite nous la fîmes traverfer
à deux valets à cheval en
envoyâmes un troifième à unvilla-
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