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328 V O Y A G E S
1705
8. De-
L'Hic de
Ceilon.
Pic d'Adam.
toujours, avec un vent variable,
apperçûmes l'IUe de Ceilon le
dixûme au marin , avec une haute
montagne en pain de fucre , qu'on
nomme le Pic d'^iiii!»;. On ne voit
ce Pic que de tems entems , par-170^.
ce qu'il eft preique toujours enve- 8. Dec.
lopé des nues, qui defcendent jufques
au bas. En voici la repreientation.
P I C D ' ADAMNous
mouillâmes à 8. heures du
foir, fur 39. braflcs d'eau, & remîmes
à la voile le onzieme, à la pointe
du jour i de forte que nous avançâmes
en peu de tems à la vue de
la ville de Gale-, mais fans en pouvoir
approcher jufqu'au foir à caufe
du calme. Cela nous obligea à
jetter l'ancre une lieuë & demie en
deçà fur 17. braifes d'eau. Le lendemain
matin notre Capitaine s'y
rendit dans fa chaloupe , pour y
rendre les lettres,dont ilétoitchargé.
Nous levâmes l'ancre fur les
10. heures, mais le vent étantcon.
traire & aflez violent, nous ne pii
mes entrer dans le port.
Lors qu'on approche de la baye
de Gale, on tire de demi heure en
demi heure , un coup de canon
pour avertir les pilotes de fe rendre
â bord, parce qu'on ne fauroits'en
paiTer fans s'expofer à un péril évident,
à caufe des écueils dont cet.
uns à 17. pieds de la furface , les
autres à 15 , quelques-uns à 1 2 , &
plufieurs à moins.
te baye eft remplie, fous l'eau,, les
Je me rendis fur le foir àia ville,
avec le pilote, & fus loger dans une
hôtellerie. Lelendemainj'allairendre
vifite au Commandant, nommé
ÎVelters, qui me reçut fort honnêtement
, & m'offrit tout ce qui dépendoit
de lui. Il n'y avoir guère
qu'il étoit arrivé de Krin, où il
avoir été Directeur. Comme j'avois
deiïein de relier quelque tems
en cette ville pour me remettre Se
rétablir ma fanté,je quitai mon hôtellerie
, & allai loger chez un fergeant
de la Compagnie. Il tomba
continuellement de la pluie , jufques
au Mx-feptième , quoi qu'elle
eût déjà duré plus de deux mois,
& que l'année precedente eût été
des plus feches : mais le tems fe remit
au beau après cela.
Je trouvai 5. vailTeaux de la Compagnie
dans le port , dont 3. s'en
retour-
D E C O R N E I L L E LE B R U N . 329
retournoient en IhlUnde. Il en ar-
•VDcV.riva 2. autresenfuitedetona/e. Le
dix-hmlùme le Commandant regala
ceux qui s'en retournoient dans
la patrie , & il s'y trouva plus de
60. pcrlonnes ; mais mon indifpofition
ne me permit pas d'être de la
partie.
Accident H penfa arriver un grand malheur
Jne perfonne quiavoit
t: le feu, par accident.
Crocodile
pris
à nîinuit. Une
trop bû, mit
à un des vaideaux de retour ; mais
on eut le bonheur de l'éteindre avant
que la flime , qui avoir déjà
gagné les cordages , pût parvenir
julques aux poudres , fans quoi le
vaiifeau auroit péri avec l'équipag
e , & les autres auroient été expof
e z à un peril évident.
Le vingtième, deux de ces vaiffeaux
fortirent du port ic allèrent
mouiller à la rade, & le 3. les fuivit
le crane, les pieds & les mains, 170^.
une quantité prodigieufede graiile, 25. Dcc.
dont on fe fert dans la medecine,
& qui eft admirable, à ce qu'on dit,
pour la paralylie , les nerfs retirez
& les rhumatifmes. On pretend De^npqu'il
le lendemain. Je me fervis de
cette occafion pour écrire à mes amis
en Hollande. Cependant, on
fit battre la caille dans la v i l le pour
fommer les matelots de fe rendre à
bord, fous peine d'être mis aux fers,
& après avoir fait la revue des équipages,
on mitàlavoileleWK^fquatriim.
Le même jour il arriva
un vailTeau S Amjlerdam , & deux
jingláis paffércnt devant le port
failânt route à l'oueft. La fievre me
reprit en ce tems-là, avec une diarrhée
qui m'affoiblit extrêmement.
Le jour de Noel on prit un crocodile
en vie , qui avoit 16. pieds
& demi de long, & 5 . & demid'épaiffeur.
On favoit qu'il avoit détruit
32. perfonnes fur cette côte,
fans ceux qu'il avoit apparemment
devoré ailleurs. C'étoit un
mâle, qu'on eftime les plus dangereux.
On lui avoit fouventdonné
y a des endroits oil ces ani- „ t animaux
là ne font aucun mal. Lors mal.
qu'ils font leurs oeufs , ils les pofent
dans un grand trou en terre, oil
ils fe couvent fans aucune autre affiftance.
Aulll-tôt qu'ils font éclos
le crocodile s'y rend,ouvre la gueul
e , & avale'tous les petits qui y
entrent, les autres fe jettent à l'eau.
Il s'en trouve qui font une fois plus
grands que celui dont on vient de
parler 6c davantage. Au refte ils
n'ont point de langue, de forte que
lors qu'ils ouvrent la gueule on voit
un trou affreux. Lors qu'ils font à
terre fur un terrain fablonneux, ils
courent avec une célérité inexprimable
, & il n'y a point d'homme
qui les puiife éviter à la courfe:
mais lors que le terrain eft ferme &
pierreux , ils ne le fauroient faire,
aiant la plante du pied fort tendre.
Ils enlevent le bétail fans peine,
même jufques aux bufles ; & leurs
dents font fi longues qu'on en fait
des cornets â poudre. Cependant
leurs oeufs ne font guère plus gros
que ceux des poules,Scaufll blancs.
Leur verge n'eft pas grande non
plus , à proportion de leur maiTe,
& eft fendue par le bout avec une
efpece de petite langue par-deiTous.
On fit fecher celle de celui-ci pour
m'en faire prefent , avec un des
tefticules , qui avoit une odeur
d'ambre. On me donna aufil une
petite bouteille de la graiffe fondue
de ce monftre.
On prend ces crocodiles avec Mar
1 il
la chalfe, mais inutilement jufques 1 un gros crochet , qu'on attache à
alors. Après l'avoir tué, on letrai-! un échevau coupé de gros fil,comna
.à la maifondu Commandant,le- | pofè de 40. ou 50. filets , qui s'atquel
l'envoya aux chirurgiens de, tachent autour des dents de ce
l'hôpital pour en faire la difTeaion. i monftre, de maniéré,qu'il ne fail-
La curiofirè m'y fit aller pour voir i roit s'en débaraffer, ni couper le
rinterieur de ce monftre, & s'il n'au-| crochet, qui pénétré jufques dans
roit pas par accident quelque créa- , l'eftomac & s'y fixe ; au lieu que
ture humaine dans le corps. On y; fi on l'attachoit à une groffe cortrouva
efféaivement le tronc , les de ou à une chaîne , il n'en feroit
bras&lesjambesd'unhomme,avec:pas plus de cas que d'une alluÏ
O M . II. I Vv mette.