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V O Y A G E S
1 7 0 6 . a quelque cliofe de fort fin
J. Juin, gulier. 11 y en avoit plufieurs qui
couroicnt eii toute liberté avec des
lapins, & qui avoient leurs tanières
fous une petite coline, entourée
d'une baluftrade. Cet animal, que
j'ai reprefenté au num. 2 1 3 . a les
jambes de derriere beaucoup plus
longues que celles de devant, & eli
à peu près de la grandeurs du poil
d'un gros lievre. Il a la tête approchant
de celle d'un renard, &
la queue pointue : mais ce qu'il y
a de plus extraordinaire, c'ell qu'il
a une ouverture fous le ventre, en
forme de fac, dans lequel fes petits
entrent, & en refortent, même lors
qu'ils font affez gros. On leur voit
aflbz fouvent la tête & le col hors
de ce fac ; mais lorfque la mere
court, ils ne paroiffent pas & fe
tiennent au fond du f a c , parce qu'elle
s'élance fort en courant,
longis.- A quelques jours delà je vis faire
la revu e à une compagnie de Sdii.
g i i , en prefence du Gouverneur &
du General de mUt. Les officiers
les aiant faluez , fixèrent leurs piques
en terre, & tirerent leurs poignards,
avec lefquels ils fe donnèrent
de grands mouvemens, criant
à haute v o i x , qu'ils enperceroient
tous les ennemis, qui oferoientparoitre
à leurs yeux. Ils fe mirent
enfuite à fauter pour faire paroitre
leur vigueur & leur adreife, & firent
des contorfions de corps, qui
reflembloient bien plus à des exercices
de bateleurs , qu'à ceux des
gens de guerre. Ilsfefentoientauffi
animez d'une ardeur nouvelle, étant
bien chauifez, au lieu qu'ils avoient
accoutumé d'aller nuds pieds. Auffi
fe donnoient-ils en marchant des
airs à faire mourir de rire; furquoi
le General de Wtlde ne put s'empêcher
de me dire. On donne de l'argent
farmi nous four voir des comedies
é- des farces, enput-on voir de
{lus divertifantes?
Les foldats étoient tous habillez t. W.'
de diifercntes maniérés. Les uns a-tS"""
voient de grands bonnets, de petits °
jutte-au-corps, & des culotes courtes
: les autres des chapeaux à grands
bords, faits de certaines tiges de
plantes entrelacées : il y en avoit
qui avoient des bonnets en pains
de iucre ; d'autres qui n'avoienc
qu'un linge entortillé autour de la
tete; quelques-uns qui avoient des
machines aux deux côtez de la tête
, aifez femblables à des cornes
dorées; fpeftacle le plus comique
du monde. Il y en avoit mêmequi
étoient couverts d'un harnois. Au Lso'Jirrefte,
ils étoient tous armés de fufils,
depoig nards de picjuesjplus
longues que celles des officiers, qui
avoient tous le piftolet à la cein.
ture.
Pendant que ceux-ci étoient occupez
à faire leurs exercices, il paiTa
par-là quelques autres compagnies
de loldats, qui alloienc chercher
leurs armes, pour fe reiidre à bord
de quelques vaifleaux deftinez pour
le Royaume de Samaran, fiirlacôte
orientale de l'Ile de Java,Qnvi.
ron à 60. lieues de Batavia , fous
la domination du Roi Pangeranh^'n.m
Foega , qui avoit été depofé par^'"«""
fon neveu, & rétabli enfuite p a r i e s S S SS
forces de la Compagnie. Et
me le neveu de ce Prince, nommé
Ade-patti y s'étoit fauvé depuis & '^o™?»^
cherchoit à caufer de nouveaux®'"'-'
troubles à fon oncle , on envoioit
ces troupes à fa pourfiiite.
Monfieur le Gouverneur me iic
favoir peu après, qu'il partiroit dans
peu de jours un vaiiTeau pour Bantamy
où j'avois deiTein de me rendre.
Je profitai de l'occafion , &
il eut la bonté de me donner des
lettres de recommandation au Gouverneur
de cette place , & à l'Adminiitrateur
de la Compagnie.
C h ^
D E C O R N E I L L E L E B R U N : 349
1 7 0 6 .
II. Juin-
1706.
i i . J u i U .
C H A P I T R E L X V I I L ^
Voyage a Bantam. Dcfcrìption de ce Royaume. LAuteur ejl
admis il l'audience du Roi.
Iles
Hoon
d'Ainfvoyageàr
E onzïhm de Juillet 3 je pris
Bintam. X-î congé du Général, & me rendis
à bord du Miinjîer^ qui étoit
monté de 26. pieces de canon, &
avoit 6 7 . hommes d'équipage, tous
Europeans à la referve de 1 0 . Indiens.
Nous parvînmes fur le midi
à la hauteur de l'Ile de Hoorn.
Comme le vent étoit favorable nous
teíd'ám&paírámes peu après à côté de celles
<i'Amfieráam & de Middelbou
'que nous avions au fud, entre deux
rochers, qui font 5. ou 6. pieds
fous l'eau,6c qu'on ne laiiTe pas dt
voir clairement, étant grands comme
un vaiiTeau ordinaire. Nous
avançames à l'oueil vers les lies de
De Corn- Combuis, que nous vîmes à droite.
& parvînmes iur les 5. heures, pro-
'Menfch- clie de l'Ile de * UAnthropophage
à 4 . lieues de Bantam. La nuit,
qui étoit fort obfcure, nous obligea
de mouiller l'ancre 5 mais nous
continuâmes notre route à la pointe
du jour par un tems couvert &
humide. Nous doublâmes la pointe
de Tontang fur les 8'. heures
paiTàmes à côté du grand ~
••diy que
braffes <d 'eau, & un peu après, à
côté de la petite Ile du même nom,
où nous ne trouvâmes que 4 . braffes
d'eau j après avoir atteint les
De Poe- Iles de Poele-doa , nous arrivâmes
^ fur les 1 0 . heures à la rade deBantam,
&z fur le midi à la ville. J'allai
directement au logis du Commandant,
Monfieur de Rbeede, qui
me reçut avec beaucoup de civilité
jaufli bien que Monfieur de//^-j-,
Adminiftrateur de la Compagnie.
Le lendemain j'allai me promener
par la ville, & en vifiter les dehors.
Je fortis par la porte de l'eau,
où eft la garde avancée. C'eft une
petite porte, de la vieille muraille
Defaipde
proche de la pointe ou du baft ion
de Speelwick^ au nord. De là j'allai
fur le rivage de la mer, par un chemin
, qui eft fouvent inondé, lors
que la marée eft haute, & que je
trouvai fi humide que j'en pris un
autre, bordé d'arbres, entre des jardins.
J'y trouvai une rangée de maifons,
fort chetives , couvertes de
feuilles, habitées par des pêcheurs,
qui vont vendre leur poiflbn à Batavia.
Le premier endroit qu'on
trouve de ce côté-là, eft le baftion
de Caranganto i revêtu de pierre en
quarré , avec une batterie de 10. Caranpiéces
de canon. Il y a 6.
très baftions du côté de la mer i
un autre à l'eft , 3. petits à
l'oueft. De là on traverfe un pont
de pierre, avec un pont levis, fur
une riviere, qui vient des montagnes,
va fe jetter dans la mer.
11 eft à l'extremité de la ville, du
côté de la mer,&: donne fur le Bazar
, qui eft rempH de boutiques
Chinoifesy où l'on vend des fruits,
&: d'autres proviiîons. On trouve
côté de ce Bazar un grand édifice
ChifioiSi où demeure le Capitaine
ou chef de cette nation, & fur
le rivage de la mer un grand nombre
de huttes de pêcheurs, & des
falines. C'eft à peu près l'endroit,
où les HoUandois debarquérent le
7 . Avril 1 6 8 3 . En s'en rétournant,
m trouve entre les baftions de Carangantoy
& de Speelwick, un chemin
qui conduit à la place du Palais,
où il y a un pont de pierre,
nommé Kettemhourg^{us: la riviere,
dont on vient de parler. Le R o i fe
divertit ordinairement , le dernier
jour de la femaine, à courir la bague,
dans cette place Scfurcepont,
avec les Seigneurs de fa Cour. La
grande Mofquée, qu'ils nomment
y y 3 Mit^
l4 ^