224. V O Y A G E S
1704. en poiTefllon de ce douairC)
19. Mai! quand même fon mari Ìe lepareroic
d ' e l l e , chole permife en cepais-là.
Et lors qu'il vient à mourir fes héritiers
Ibnc obligez de lui payer cett
e ibmme, avec la huitième partie
des biens qu'il laiiTe après lui. De
plus, lì la femme meurt la premier
e , fie qu'elle laifle des enfans , le
mari eft o b l i g é , au cas qu'il fe remarie,
ôc qu'il ait des enfans d'un
Iccond l i t , de donner à ceux du
premier le bien de leur mere', ^
une portion égale des fiens, qu'ils
doivent partager avec les autres.
Lors qu'un Chrétien, ou quelqu'autre
perfonne , dont la Religion
difere de celle des Perfes ¡embraffe
leur croyance, il hérite de
tous les biens de fes parens, à l'excUiilon
de tous les autres, qui n'ont
pas apoilafié comme lui. Et au cas
que deux Chrétiens embraffent: la
foi Perfamie en même t e m s , l e p l us
proche héritier des deux , hérite
feul tous les biens de fes parens
Chrétiens , qui viennent à deceder.
Concubi- Il eft permis aux Perfes deprendre
autant de concubines q u ' i l l e ur
p l a i t , o u qu'ils en peuvent entretenir
:6c lors qu'ils en renvoyant une,
i l ne lui eft pas permis de connoitre
un autre homme avant l'expiration
de 40. j o u r s , de crainte qu'elle
ne foit enceinte> car en ce cas,
i l faut que c e l u i , dont elle eft greff
e , l'entretienne jufques après fes
couches, fie qu'il f e charge de l'enfant.
Au refte tous les enfans de
ces concubines font reputez legitimes,
ôc ont leur part du bien de
leur pere comme les autres.
Dot des Les parens qui donnent une fille
en mariage, lui donnent en dot ce
qu'ils jugent à propos, & cette fille
s'engage, par écrit , à ne rien
prétendre, dans la fuite, au refte
de leur fuccelÏÏon, dont elle a reçu
fa part j fans pouvoir en venir à un
autre partage avec fes freres ou foeurs
encore à marier.
Lors qu'on déhvre fa dot à fon
mari, on charge tous fes habits &
fes biens meubles fur des chevaux,
& le refte eft porté par plufieurs
perfonnes, qui font auHÎ chargées 1704,
de confitures 6c d'autres friandi-19. Mai.'
fes. Cela reiTemble aflez à uneproceiIion,
qui eft plus ou moins grand
e , à proportion de la qualité des
perfonnes} & cela fe fait au fon
de plufieurs inftrumens. Cette ceremonie
fe pratique quelques jours
après la confommationdu manage,
Se l'on prepare pour cela un appartement
bien illuminé dans la maifon
du mari, car c'eft toujours le foir.
Les hommes y entrent les premiers
5c font fuivis des femmes engrande
ceremonie.
Les grands Seigneursontaufli ordinairement
une femme , laquelle
eft fervie par leurs concubines, ôc
qui eft honorée du titre de Chanat
qui répond à celui de Chan, que
portent leurs maris. Elle mange
feule, £c eft fervie à table, comme
ailleurs, par quelques-unes des concubines.
Les enfans des unes Se des
autres font legitimes &: partagent
également le bien de leur pere -,
lors qu'il nait un enfant d'une de
ces concubines, la femme legitime
témoigné une j o y e toute particulière
de rhonneurqu'enreçoitfonmari.
Lors que celui-ci veut fe rendre
auprès d'une de celles-là, il envoya
un de fes eunuques à fon appartement,
car elles en ont chacune un
particulier, lequel lui donne ordre
de fe rendre au bain pour fe purifier.
Elle ne manque pas d'obéir
fur le champ, & de fe parer pour
recevoir fon Seigneur. Ces concubines
mangent enfemble fans autre
compagnie.
Le R o i prend autant de femmes
qu'il lui p l a i t , & choifit pour cela
les plus belles filles Géorgiennes,
Armenienesy & autres Chrétiennes,
qu'il peut trouver. Elles font toutes
égales entr'elles, & le premier
fils, qui en naît, eft héritier de la
couronne, fans aucun égard pour
la mere dont il eft né ; 6c fans que
cela lui donne aucun avantage fut
les autres. Lors que ce Prince en
veut mettre u n e h o r s d u f e r r a i l , q ui
n'a pas eu d'enfant, il la marie comme
il lui p l a i t , êc fouvent à une perfonne
d'un rang fort inférieur.
V o i c i
D E C O R N E I L
V o i c i ce que j'ai obfervé à l'c-
19. Mai. g^i'd- ^^s morts fie des entcrremens.
Enterre- UcLix OU trois heures après le décès
mens. perfonne , on envoye cherclier
un M(?/^ouEcclcfiaftiquc,qui
fait quelques pricres& quelques ceremonies.
Enfuite on pofe le corps
dans un c e r c u e i l , qu'on porte au
lavoir, hors de la maifon, dans un
lieu deftiné à cela , pour l'y laver
& l'y purifier. 11 eft porté parles
porteurs ordinaires , 6c précédé de
chanteurs , 6c d'autres perfonnes,
aiant à la main des bâtons, des houfiines
6c de petites enfeignes. Les
parens qui le fuivent fe dechirent
les habits, s'arrachent les cheveux,
f e frappent la poitrine , 6c font
cous les autres a£tes de defefpoir.
Le corps des perfonnes de condition
eft entouré d'Ecclefiaftiques fie
d'autres perfonnes , qui entonnent
des chants lugubres. Les amis qui
l'accompagnent font de grandes lamentations,
peut-être plus par coutume,
que par la douleur quifemblc
les animer. Leurs habits, ni ceux
des parens, ne diiferent nullement
de ceux qu'ils portent d'ordinaire,
à la rcferve de ceux qui precedent
le corps , fi ce n'eft qu'il y en a qui
dctachent un bout de leur turban.
A u refte ils ne vont pas deux à deux,
comme parmi nous, mais tumultueufement
6c fans ordre.
Lors qu'on eft arrivé au lavoir,
6c qu'on a lavé le c o r p s , on lui bouche
toutes les ouvertures, ou les conduits,,
de cotton, favoir la bouche
&CC. T o u t e la difference qu'on obferve
entre les cadavres des hommes
& des femmes, eft que des hommes
lavent les hommes, 6c que les
femmes lavent les femmes, 6c les
Auvent à la foife ; car on les conduit
du lavoir au tombeau, oùl'on
fait dc5 prieres 6c quelques ceremonies.
Enfuite on envelope le corps
dans un drap mortuaire , 6c on le
met en terre fur le côté gauche, la
tête à l ' o r i e n t , 6c les pieds à Toccident
, la face du côté où eft le
tombeau de leur Prophcte Mahomet.
Puis on fait uae demi arcade de
terre ou d'argile au-deiTus du corps,
& on acheve de remplir l a f o f l e.
L E L E B R U N . 22^
au-deiTus de laquelle on pofc une 1704.
pierre, ou on eleve une tombej 6c 19. Mai",
Ibuvent un dôme fur celles des perfonnes
de condition. Le Roi les
honore même quelquefois d'une
tombe R o y a l e , qu'on eftime facrées,
Ôc pour lefquelles on a une vénération
toute particulière. 11 y a auffi
de ces tombeaux en forme de temples
, couverts de beaux dômes bleus
g l a c e z , qui font un effet admirable
à la vue.
Qiiant à la monnoye Perfane, la Monnoyé
plus grahde efpece de celle d'argent,
eft le Hafaer denarie, ou une
piece de dix Mamoedjes , lefquels
valent à peu près huit fols de notre
monnoye. O n y SiZM^iàQsDaezajie
ou pieces de cinq Mamoedjes-, des
Paenszajie, de deux 6c demi) des
pieces de deux Mamoedjes, nommées
Abbaasjes j & d'autres d'un
Mamoedje, dont il s'en trouve de
deux fortes , frapées par les Rois
predeceifeurs de celui qui regne à
préfent. On les nomme Mamoedjes
haviefe. Le païs eft remph de cette
monnoye, parce que les marchands
ne trouvent pas leur compte à la
tranfporter ailleurs. On s'en fert
dans le negoce par tout le Royaume
, tant pour les marchandifes de
dehors, que pour celles de dedans,
fiHs qu'on y en employe d'autre.-
Il y a encore des Zaejies ou demi
Mamoedjes. Le Roi ne fait guère
frapper les deuxpremieresefpeces,
dont on vient de parler , 6c même
ce n'eft que pour lés pauvres, 6c
dans un certaintemsdel'année. Elles
ont aulli fi peu de cours, qu'on
n'en trouve que parmi les curieux,
parce qu'elles different un peu en
valeur £c en poids des Abbasjies, des
Mamoedjes ¡èc des Zaejies qu'on fabrique
aujourd'hui. La raifon de cela
eft que cestroisdernieresefpeces
furent réduites à un jufte aloi en
1684. 6c 1685. mais les officiers de
la monnoie n'ont pas laiiTé d'en diminuer
la valeur par le delirinfatiable
qu'ils ont de s'enrichir, à quoi
la négligence du Gouvernement n'a
pas peu contribué. On n'y auroit
même apporté aucun remedc, fi le
peuple, qui en murmuroit, ne s'en
F f fùï
II!