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V O Y A G E S
1701. dales. Cela s'entend des marclian-
M. Oflo. difes de dehors. Les principales de
iljfc'""'celles, qu'on apporte ici font, les
étofes d'or & de foie , les draps,
les ferges, les dentelles d'or & d'argent,
&c. L'or t r a i t , l'indigo &
d'autres teintures. Mais "pour retourner
aux droits , dont les marchandifes
font chargées, on a payé
depuis l'année lôé/jufques en 1699,
la fomme de vingt rixdales , de
chaque barique ou muid de vin, au
lieu qu'on n'en paye plus que cinq,
depuis 3 ans. On paye cependant
encore 36 rixdales de la barique
d'eau de vie , & 40 de la pipe de
vin A'Effagne , qui contient deux
bariques.
On tranfporte de Ruße dans les
pais étrangers , du Potas , ou des
cendres de Mofio-vie ; du IVeedas,
ou cendres, dont on fait le fa von ;
du cuir, du chanvre, du f u i f , des
peaux d'élan , & plufieurs autres 1701.
iortes de peleteries ; toutes marchan-19. oa.
difes du crû du pais. On ditaulli,
que les rivieres d e / i s k , JVarfigha,
IVnfma, & J'î/m produifent des moules,
dans lefquelles on trouve affez
de perles. Il y en a qui valent jufques
à 25 flonns la piece, & deux
fois autant aux environs d'Ombaej.
.Voda ce que j'ai pû remarquer
i c i , où j'ai employé le tems que
j'avois de refte en la compagnie
de Meflieurs Brunts & Lup , qui
fe font fait un plailir de m'obliger.
On s'y divertit au jeu , à
la danfe , à boire & à manger,
& même affez avant dans la nuit.
Mr. Brants ne contribuoit pas
peu à ces divertilTemens , étant
grand amateur de la mufique , &
joiiant parfaitement bien du claveffin.
701
. Dcc,
C H A P I T R I V .
II. Dcc
Départ
d'Ar.
changel.
L'Auteur pciYt ¿5?'Archangel. Maniéré de voyager en Ruiîie peiu
dant l'hyver. Defcrïption de W o l o g d a , ir du monajîere
de T r o o y t s . Son arrivée a Mofcou.
, J E partis A'Archangel le vingt-
Mai
de,
gcr.
mieme Décembre, à trois heures
après midi , avec Mr. Kinfms,
qui étoit accompagné de deux foldats
& pourvu d'un Poàisoden,
c'eft-à-dire d'un ordre pour qu'on
lui fournît des chevaux fans payer,
dont les conduftenrs ne lailient
)as de tirer une certaine fomme.
1 avoit iix traineaux , auxquels
j e joignis le mien , aiant difpofé
de mon bagage parmi celui
de Mr. Brants. C^iand on fait ce
voyage,il faut fe pourvoir de traineaux
à Archangel, parce qu'on ne
trouve que des chevaux en chemin.
C ^ traineaux font faits de maniere
qu'une perfonne peut s'y coucher
commodément. Il faut avoir
fon propre l i t , des fourures & de
bonnes couvertures pour fe garantir
du froid , qui eft fort violent
en ce pajs-là; & on fait couvrir le
derriere du traîneau de nattes, &
doubler le refte de drap ou de cuir.
On couvre enfuite le deifus d'une
peau, doublée de drap ou de cuir,
pour fe mettre à couvert de la pluie
& de la neige. On marche jour
& nuit, chaque traineau étant tiré
par deux chevaux, qu'on change
de quinze en quinze werftes,
dont cinq font une lieuë d'Allemagne.
Les Ruffiens s'écrient werjia
au bout de chaque tuerfie. Elles contiennent
à préfent 100. braffes, &
chaque braife trois arfiennes , ou
aunes de Hollande. On ne fort du
traineau qu'une fois par jour pour
manger. Après avoir traverfé plufieurs
villages nous arrivâmes le
vingt-denxieme, fur les trois heures
après midi, à Kolmogora, qui eftKoImo.
environ à ^o. werjles d'Archangel.
Cette
Civilité
de l'Archevéqui
de Kolmogora.
¡í'C
D E C O R N E I L
. Cette ville eft aflez grande, & fituée
au fud oiieft de la Dwina, qui eft
une des premieres rivieres de Ruße.
Elle a la fource dans.la partie méridionale
de la Province de Wologda,
& après un aftez long cours,
pendant lequel elle reçoit pluiieurs
antres rivieres, elle va fe décharger
par deux embouchures dans la
mer blanche , un peu au deiîbus
dL Archangel. Comme Mr. Kmfins
connoiiToit le f^ladtka, c'eft-àdire
l'Archevêque de cette ville,
. nous allâmes lui rendre vilite. Il
nous reçut fort honnêtement, &
nous regala d'eau de canelle , de
vin rouge, & d'une biere admirable,
boiflbn ordinaire du pais. Il
nous prefenta aniîi des dattes d'Egyfte,
& plufieurs autresrafraichiffemens.
C'étoit un homme de 50.
^ns, nommé Affonaß. Il étoit logé
dans fon propre Palais, qui eft affez
grand joint au monaftere.
Apres avoir paiTé deux heures de
tems fort agréablement avec ce Prélat
, homme de bon fens & amateur
des belles lettres, il nous mena dans
une falle baffe remplie d'armes. Il
y avoit entr'autres, deux petits canons
de bronze, de fa propre font
e , & deux pieces de fer, tirées des
barques Suedoifes , dont on a parlé
ci-deiTus. Lors que nous primes
congé de l u i , il nous fit accompagner
jufques à notre auberge par
cinq Ecclefiaftiques,dontl'nnétoit
chargé de cinq pains, & les autres
de poiifon fee & d'autres proviüons.
Nous partîmes fur les 10.
heures du foir avec des chevaux
frais, que nous obtînmes avec bien
de la peine, parce qu'il venoit de
paffer plufieurs autres voyageurs,
pourvus comme nous de Podwodens,
qui avoient pris la plùpart des chevaux
de la ville.
Le vingt - troißme nous eûmes
un tems favorable , & traverfàmes
plufieurs boccages remplis de fapins
de deux fortes, dont les uns
pouffent des branches le long de la
tige, & les autres n'en font qu'à la
tête. Il y avoit auffi des aunes &
des bouleaux. An fortir de là,
nous paffàmes par plufieurs villa-
L E LE B R. U N. 19
ges ,&entr'autres à j i î i f e , qui eft le 1701.
dernier de la J u r i f d i a i o n d ' ^ r c A « -
gel. De Là nous nous rendîmes le 24,.
a Briefnick, dans le pais de IVaeg,
où nous primes des chevaux frais,
& où il faut traverfer plufieursfois
la riviere de ce nom. Le vingt-cinmieme
nous arrivâmes â Schenkers- Sch™-
•e, capitale du pais de fVaeghala.
même riviere. Le vingt-Jîxiimenous
paffàmes par un grand village nommé
Firghowaesje, où l'on tient une
fois la femaine un grand marché.
Le 27. 3. Soloti. Le vingt-huitième
, après avoir paffé par plufieurs
villages, nous traverfàmes la
grande forêt dsKomenaf, qui a bien
20. werjlesdn large,& nous arrivâmes
i'Ûïuienitfe, fur la riviere de ce
nom , où nous apprîmes qu'il n'y
avoit guere que trois marchands
Ruffiens vehant d'Archangelzvoient
été pillez par 26 voleurs de grand
chemin : qu'un de ces voleurs avoit
pris au principal de ces marchands,
que je connoilfois, une croix d'argent,
qu'on porte ordinairement
fur l'eftomac en ce païs-là , bien
que fes compagnons euffent tâché
de l'en détourner, la croix y étant
en grande veneration : que ce coquin
enportoit une lui-même, qu'il
s'étoit ôtée du col & l'avoir mife •
autour de celui du marchand , en
lui difant, nous fommesfreres maintenant,
aiant changé de croix enfemble.
Cette nouvelle nous donna de
rinquietude ; cependant après y avoir
bien penfé, nous refolûmes de
pourfuivre notre voyage, fans attendre
la compagnie des marchands
qui pouroient venir d'Archangel,
& apprêtâmes nos armes pour nous
défendre en cas de befoin. Nous
arrivâmes le vingt-neuvieme à Rabanga
fur la riviere de Soegue, S<
nous rendîmes de là à Wologda, à wologtrois
heures après midi. Cette vil- da.
le paroit beaucoup de ce côté. Nous
allâmes defcendre chez le fieur Wouter
Ewouts de Jongh , marchand
Hollandois, que j'avois connu à
Archangel,nous reçut fort
honnêtement. Le lendemain j'allai
me promener par la ville, & vis la
grande églife , nommée Saboor. wôiog-'
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