de paille, une veste de peu de valeur et de vieilles
épaulettes bien noires. Dès ce moment, ceux des naturels
qui m’ayant vu en 1827, m’avaient reconnu
comme le premier chef, avaient voulu me désigner
comme tel à leurs camarades qui, ne jugeant que sur
les signes extérieurs, s’étaient montrés tout-à-fait
incrédules.
Le sol de Lefouga est couvert d’une admirable végétation,
et paraît d’une singulière fertilité, et si,
comme me l’assure notre hôte, la population n’est
maintenant que de 500 à 600 habitants, mieux cultivé
il pourrait sans aucun doute en nourrir dix fois
autant. Du reste, il n’y a pas la dixième partie de l’île
qui se trouve défrichée, et cette partie elle-même
est assez mal cultivée. Bien que les productions végétales
des îles Hapai se rapprochent beaucoup de
celles de Yavao et surtout de celles des Samoa, cependant
j’ai remarqué des arbres que je n’avais point
encore vus dans les autres îles.
Les hommes sont en général bien faits et d’une
belle tournure ; les femmes ont des traits réguliers,
une belle poitrine, des seins parfaits ; mais elles tendent
de bonne heure à l’obésité. Toutefois, je trouve
cette population bien supérieure à celle d’Opoulou.
Il est environ deux heures lorsque, songeant à nous
retirer, nous allons faire nos adieux aux missionnaires.
M. Thomas m’apprend qu’un Anglais nommé
Brown a été enterré sur la pointe Kousa. Brown était
le nom du capitaine du navire le Port-au-Prince dont
la catastrophe sanglante, en 1806, dut avoir lieu en
effet, à l’endroit même où nous sommes mouillés.
Mais M. Thomas ignore si c’est le même individu. Ensuite
ces Messieurs nous font accepter quelques mauvaises
coquilles et quelques objets d’industrie sauvage
assez pauvres, tout en s’excusant sur ce que déjà
ils ont donné tout ce qu’ils avaient de bon en ce genre.
Du reste, M. Thomas me promet de m’envoyer demain
Seteleki pour me piloter jusqu’à la mer libre, et
c’est là réellement le cadeau le plus agréable qu’il
puisse me faire.
Enfin nous prenons congé de ces Messieurs. Favorisés
par un temps magnifique, je renvoie la baleinière
nous attendre devant les navires et nous opérons
notre retour à pied. Un sentier charmant, bien
entretenu, rend cette promenade des plus agréables.
Seteleki qui nous accompagne nous tient lieu d’un
excellent janissaire. Il est connu de tout le monde,
et il semble jouir d’un grand crédit; car sur toute la
route il est fêté par les habitants des nombreuses maisonnettes,
qui, jetées au milieu de ces forêts magnifiques,
produisent sur toute la route des paysages enchanteurs.
Il a été décidé que le roi Yiti Lea, que m’avait proposé
M. Thomas, ne pouvant nous être bon à rien ,
resterait à Lefouga. Seteleki ne me quitte qu’à la
plage et je retourne à mon bord.
Tous les travaux sont terminés, et tout est prêt
pour appareiller demain de bon matin, aussitôt l’arrivée
de Seteleki. Mai!, qui après le départ des missionnaires
avait fait fièrement son apparition sur le