1838. eu d’abord grand peur en voyant arriver nos deux
Septembre. .
corvettes, ils ont cru que nous venions pour les
prendre entre deux feux ; mais ensuite en apprenant
que j’en étais le commandant, ils ont repris courage,
et même ils ont espéré que comme ancien ami des
missionnaires anglais, je pourrais bien ne pas approuver
la conduite de M. Du Petit-Thouars; aussi,
ajoute-t-on qu’ils avaient formé le projet de me porter
plainte le lendemain contre lu i, comme étant plus
ancien en grade (ce qu’ils appellent senior officer).
Mais la manière dont je me suis déjà exprimé vis-à-vis
de MM. Rodgerson et Wilson les aura sans doute désabusés.
io. Pour en finir avec ces propos et ne laisser de doutes
à personne sur le but de ma visite, dès six heures et
demie je m’embarque dans ma baleinière et M. Jacquinot
dans la sienne, et je me rends à Papeïti pour y
faire mes visites.
Nous arrivions devant Papa-Wa quand une baleinière
passe à quinze pas de distance à notre, droite,
elle porte sur l’arrière un individu qui détourne la
tête en arrivant par notre travers. Je soupçonne aussitôt
que ce peut être M. Pritchard lui-même qui se
rend à Matavai pour voir de quoi il s’agissait.
Un peu plus loin je rencontre M. Du Petit-Thouars
qui venait avec M. Moerenhout me faire visite. Le capitaine
Jacquinot et moi, nous passons dans son canot,
et lorsque je lui ai dit que je désirais me rendre
à Papeïti, il rebrousse chemin et revient avec nous à
ce mouillage.
M. Du Petit-Thouars me confirme que c’est bien
M. Pritchard que je venais de voir passer, il allait sans
doute à mon bord pour porter plainte contre le capitaine
de la Vénus. M. Du Petit-Thouars me raconte
ensuite les événements tels qu’ils se sont passés, et
sur quel pied il se trouve actuellement à Taïti avec
la reine et les missionnaires. A bord de sa frégate
il me communique les pièces relatives au traité qu’il
venait de conclure, et je puis le complimenter franchement
sur le succès qu’il a obtenu, et surtout
sur la rapidité avec laquelle il a conduit cette négociation.
Oui, me dit-il, c’est une condition indispensable
à l’égard des demi-sauvages de Taïti, je
leur ai fait ouvrir les yeux sur les mensonges que
leur débitent leurs missionnaires sur la France et les
Français.
M. Moerenhout souffrait encore beaucoup des blessures
qu’il avait reçues, et sa femme était dans un état
désespéré. Les missionnaires anglais avaient à se reprocher
leur participation indirecte à cet attentat,
par les déclamations indécentes qu’ils se permettaient
envers lui. Les assassins étaient un Espagnol et un
autre individu qui passait pour être Français. Les
missionnaires avaient bien été obligés de les laisser
arrêter, mais d ’après les lois de leur fabrique, les
meurtriers ne pouvaient être passibles de la peine de
mort qu au cas où l’une des deux victimes succomberait
sous ses blessures. Du reste, les rapports calomnieux
des dignes missionnaires près du gouvernement
ties Etats-Unis, avaient réussi à ravir les fonctions de
IV. 5
Septembre.