tent davantage; leurs yeux sont un peu brides en dehors; leur
nez est gros; en un mot, leur visage se rapproche tout à la fois
du Kalmouk et de l’Américain, les autres tribus de la Polynésie
tendent au contraire à s’en éloigner. Ce fut une femme d ’Opolou
qui frappa nos regards par sa ressemblance avec une jeune Pata-
gonne dessinée au hâvre Peckett par M. Goupil.
Si les insulaires d’Opolou sont les moins agréables des hommes
rouges du rameau polynésien, leurs femmes ne possèdent pas non
plus l’enjouement des agaçantes Taïtiennes, ni l’aisance des indépendantes
et gracieuses Noukahiviennes : leurs formes sont fortes
et peu gracieuses; elles sont toutes bien constituées, mais aucune
ne réunit l ’utile à Vagréable. Comme partout, il en est de gentilles,
mais elles manquent complètement de physionomie; et l’on
peut indifféremment les comparer, soit à charmes égaux, soit à
laideur égale, au type des femmes mangaréviennes ou à celui des
femmes patagonnes.
Les hommes de Samoa sont moins expressifs que ceux des
Marquises, des Tonga et de Taïti ; leur caractère est évidemment
plus triste; ils sont surtout moins communicatifs que ceux de
Tonga-Tabou, et sous ce rapport, ils sont peut-être moins four,
bes, quoiqu’au fond ils ne soient point meilleurs. Les voyageurs
ont beaucoup parlé de l’affabilité des Tongaens, mais chez eux
ce n’est qu’une apparence trompeuse, ce n’est qu’une ruse, qui
suppose un peu plus de civilisation : on ne saurait mettre la bienveillance
au nombre des qualités de gens qui, comblés de bienfaits
par C o o k , projettent de l’attaquer, au moment même où ils
semblent 1 environner de respect et de reconnaissance. Enfin, le
désastre de Port-au-Prince, l’attaque de l’Astrolabe ne mettent-
ils pas entièrement à nu les véritables sentiments de ces sauvages?
Les insulaires de Samoa se sont empressés de nous prouver
qu’ils étaient aussi les mêmes hommes : le massacre du capitaine
de Langle et de onze Français est l’exploit qu’ils jettent dans la,
balance phrénologique !
La convoitise est dans le coeur de tous les hommes ; ils se livrent
à ses fâcheuses inspirations toutes les fois que la culture de leur
esprit, ou que la religion, ou que des lois sévères ne les rendent
point maîtres d’eux-mêmes. Aussi, quel est le sauvage qui lui résiste
quand il croit être le plus fort? La bonté, l’hospitalité, la
bienveillante simplicité, la charmante candeur ne sont dans les
livres de voyage que des mots de remplissage. 11 serait bien à
souhaiter que tout auteur chargé d’écrire l’histoire, laissât de
côté l’âge d’or et ses souvenirs mythologiques, car l’étude de la
nature et du vrai leur promet un rôle bien autrement honorable
et solide que toutes ces redondances de rhétorique. Kerba et vo-
ces, proeterea nihil.
Nous attribuons l’espèce de dégradation que le rameau polynésien
éprouve à Opolou, aux nombreux marécages de la plaine
inclinée, qui du pied de la montagne descend doucement vers la
mer. Cette pente n’a pas moins de cinq milles de large sur certains
points de sa circonférence; elle a été successivement conquise
sur le récif qui l’environne, les forêts de sa partie basse
sont presque généralement marécageuses; une foule de ruis seaux
s’y perdent et les eaux de la mer y filtrent à travers les
coraux. Les vents pénètrent difficilement sous les grandes forêts
qui couvrent le pays jusqu’à la plage , aussi l’humidité est-
elle, sans aucun doute , extrêmement nuisible à la constitution
des habitants; il faut la compter au nombre des causes prédisposantes
de l’éléphantiasis, si commun dans cette île. Oïalava et
Maouna, que nous avons prolongées , ont la même disposition,
géologique ; il en résulte nécessairement la même topographie et
les mêmes conséquences pathologiques. En général, parmi les îles
hautes, les plus saines sont celles qui plongent à pic dans l’Océan,
où aucune plaine ne s’étend du pied de la montagne à la mer.
Les îles Marquises surtout, Taïti et les autres îles de cet archipel
sont de ce nombre.
En résultat, les Océaniens de la Polynésie équatoriale constL