La culture des terres n’a fait aucun progrès, on ne trouve plus ces
gigantesques pirogues, ces cases monumentales ; plus d’ornements
, plus de sculptures ; toute industrie paraît s!étre éteinte
chez eux. Indolents , voleurs, débauchés comme autrefois, ce ne
sont plus ces beaux sauvages à l’allure libre et fière ; de misérables
lambeaux européens ont remplacé leurs vêtements si pittoresques.
C’est une chose tristement risible que devoir ces pauvres
sauvages, affublés d’une manière si grotesque, celui-ci d’une
chemise, celui là d’un pantalon, d’autres enfin d’un habit ou
d’un chapeau. Les femmes ne sont pas plus gracieusement vêtues;
elles portent une chemise ou fourreau d’étoffe de couleur,
auquel elles joignent, dans les grandes circonstances, un chapeau
de papier de forme anglaise, ordinairement tout bosselé. Us sont
néanmoins très-fiers de leurs nouvelles parures. Celui qui a le plus
de chemises est un grand chef. Toutes leurs actions ont donc
pour but de se procurer de l’argent pour acheter les beaux vêtements
européens que des missionnaires leur vendent à des prix
exorbitants.
O r , comme la vente de quelques volailles et de quelques fruits
ne leur procure pas de fortes sommes, ils ont recours à un autre
moyen,, c’est-à-dire à la prostitution de leurs filles ; celui qui a
le plus de filles est le plus riche. A in s i, cette licence de moeurs ,
qui fit donner à cette île le nom de Nouvelle-Gythère par Bou-
gainville, n’a point cessé, seulement elle se cache et profite des
ténèbres, car les espions des missionnaires surveillent sans cesse
les jeunes E lle s , et lorsqu’elles sont surprises;, elles ne sont plus
comme autrefois condamnées à travailler aux roules , mais bien à
une amende d’une ou plusieurs piastres,, toujours bien entendu
au profit des.missionnaires ; de sorte que tout l’argent introduit
dans le pays leur, revient inévitablement, soit par la vente des
étoffes et des chapeaux de papier, soit par les fréquentes
amendes,!......
Gertes, loin de moi l’idée de déverser le blâme sur tous les missionnaires
en général, je sais que chez les méthodistes , comme
chez les catholiques, il se trouve des hommes d’une conviction
profonde , d’un dévouement aveugle, capables de tous les sacrifices
pour gagner quelques âmes à leur religion ; mais malheureusement
des hommes se sont cachés derrière ce masque sacré
dans des vues toutes d’intérêt matériel etde spéculation, et pour
les satisfaire ils exploitent honteusement ces pauvres sauvages.
Mépris et opprobre sur eux ! . . .__
De même que Gambier et que Nouka-Hiva, Taïti ne nourrit
point de mammifères ; les seuls qui y existent y ont été importés ,
ce sont le cochon, le chien, le chat et le rat. Les missionnaires y
possèdent aussi quelques boeufs et quelques chevaux.
Quelques oiseaux qui se trouvaient lors de la découverte, semblent
avoir disparu, Ce sont 1 ' heorotaire, qui se trouve encore aux
îles Sandwich , la perruche verte et la colombe bleue. Peut-être
ces charmants oiseaux existent-ils encore dans l’intérieur de l’île.
On doit attribuer leur disparition à la destruction qu’en faisaient
les habitants pour se fabriquer des ornements de leurs plumes.
La jolie perruche evim est en revanche très-commune sur les
cocotiers dont elle suce les fleurs; de la grosseur d’un moineau
fran c , elle est d’un beau bleu , avec sa gorge blanche, le bec et
les pattes rouges. La colombe kurukuru est ici moins belle qu’à
Nouka-Hiva, ses couleurs sont moins vives, sa calotte purpurine
est surtout très-pâle.
Les autres oiseaux sont un martin-pécheur, le gobe-mouche-
Pomaré, la sittelle o-tataré, et de petites salanganes.
Comme dans toute l’Océanie, les rivages nourrissent des hérons
gris et blancs, des chevaliers, une espèce de canard.
- En reptile, c’est toujours le petit scinqae à queue azurée, et
un petit guko de couleur sombre, qui se cache sous les pierres.
Nous n’avons pointretrouvé ici le petit boa de Nouka-Hiva, mais
il est fort probable qu’il doit y exister.
Les récifs de coraux qui bordent la pointe Vénus jusqu’à Papéiti