183.3.
Octobre, maree haute. Dès-lors je suis forcé de mouiller pour
porter secours à ma conserve et de remettre au lendemain
ma sortie des récifs.
Williams m’apprend que Bureau a été tué par le
fils même et non pas le neveu de Nakalassé, qui m’a
été désigné sous le nom de Franck, mais que l’on connaît
mieux sous celui de Moussou-Nidou. Déjà Lat-
chika et Tanoa me l’avaient désigné simultanément
sous ce même nom.
Le navire anglais le Conway a mouillé dernièrement
près de Berata, dont le peuple est indépendant. Ce
navire est venu là pour tirer vengeance de l’enlèvement
d’un schooner dont l’équipage a été massacré il
y a six mois environ. En face des canons delà corvette
anglaise, les habitants en alléguant que leur chef, qui
seul était coupable, avait été tué, se sont empressés
de.demander leur pardon, qu’ils ont obtenu pour
quelques cochons qu’ils ont livrés comme offrande expiatoire.
Le capitaine Drinck-Water est allé ensuite mouiller
a Lebouka, d’où il est parti pour opérer son retour. Il
y a a Lebouka une quinzaine d’Européens qui s’y sont
établis, et ils y possèdent une petite goélette prove-
nant du navire le Wgilby. Ces renseignements s’accordent
avec ceux que m’avait donnés M. Thomas à
Vavao.
Dès le matin nous remettons sous voiles. Malheureusement,
XAstrolabe en appareillant, vient en dérivant
s’accoler sur le même banc de corail que déjà la
Zélée a signalé avec sa quille. Mais après avoir mouillé
une ancre, un coup de cabestan nous en dégage, et
nous pouvons enfin continuer notre route directe sur
la pointe occidentale de Motou-Riki.
Cette fois, instruits par l’expérience et guidés par
Williams, nous opérons notre sortie par des canaux
qui paraissent très-profonds ; mais à cause des vents
qui régnent ici, et qui soufflent presque constamment
de l’est, le port de Pao restera toujours peu commode
pour les grands navires. On ne peut en effet sortir de
ces immenses récifs que par un long louvoyage dans
un canal très-étroit ; et nos corvettes sont déjà trop
grandes pour ce genre de navigation, attendu que
dans leur virement de bord, elles perdent presque
tout ce qu’elles ont gagné de terrain à l’aide de leurs
bordées toujours très-limitées.
A quatre heures seulement nous arrivons dans la
mer libre; jusqu’à la nuit nous prolongeons la bande
des brisants. A neuf heures nous sommes près de la
pointe orientale de Leva ; c’est là que nous embarquons
notre grand canot, et ensuite nous continuons
notre route un moment interrompue par le calme qui
pourrait nous donner de vives inquiétudes s’il y avait
des courants dans l’ouest.
Ce n’est que le lendemain à onze heures que nous
laissons tomber l’ancre dans la baie de Lebouka,
grâce à notre pilote Williams qui avait peine à en reconnaître
l’entrée de la m e r, et q u i, par une fausse
manoeuvre, nous a retardés de plus de deux heures.
L’île Obalaou est haute et accidentée, une ligne
de brisants lui forme une ceinture, et deux coupées