mençaient leurs mouvements de mains et leurs chants. Leurs
mesures étaient de trois temps, et ces voix insulaires, qui paraissaient,
du reste, s’accorder assez bien , trouvèrent des admirateurs.
Quant à moi, qui ne suis pas musiciep, il m’a semblé que
c’était une symphonie abominable.
La danse qu’elles exécutèrent ensuite est tout simplement et
tout bonnement une bonne chika de nègres de la côte d’Afrique.
La seule différence qu’on peut y trouver, c’est qu’au cynisme des
gestes, elles joignent encore celui des paroles. Dans cette danse ,
du reste, elles observent un ensemble qui est assez curieux et qui
n’est même pas à mon sens sans mérite......
Après avoir causé un instant avec Kapoua, la tante de la reine,
je me résignai à lui offrir de petits présents en rapport avec mes
moyens ; mais elle me refusa, en me faisant entendre qu’elle était
tabouée pour les gens qui n’étaient pas chefs, et qu’elle ne pouvait
par conséquent rien accepter de moi. J’avais cependant une
grande envie de gagner ses bonnes grâces , car je désirais vivement
faire son portrait. Cette femme avait un bras charmant, et
sa main aurait pu servir de modèle dans un atelier d’étude. Un
tatouage gracieux et bizarre garnissait son épaule et descendait le
long de l’humérus en présentant à l’oeil des dessins de poissons,
d’instruments divers, pour se resserrer ensuite vers le milieu de
1 avant-bras en lignes circulaires et rapprochées, et couvrir toute
la main. Je ne puis exprimer l’effet de ce tatouage qu’en le comparant
à un gant de soie noire et à jour que les dames espagnoles
portent quelquefois.
(M. Marescot.)
Note 7, page 34-
Le t 4 août i 838 nous quittons le groupe de Manga-Reva ; le
i 61 archipel des Marquises s’élève devant nous; le lendemain
nous prolongeons de très-près l’île d’O-Hivaoa, et nous contemplons
à notre aise cette belle montagne exhumée des profondeurs
de la terre et de l’Océan. De grandes forêts couronnent
les hauteurs d’O-Hivaoa, se pressent sur les revers de ses ravins,
s’étendent jusque sur ses promontoires et bordent toute cette côte
escarpée. Çà et là lé passage des torrents a creusé la falaise ; de
ses découpures sortent des cascades ; elles apparaissent sous des
voûtes de branches et de feuilles ; des lianes enlacées les accompagnent
dans leur chute. Le pic principal s’élance du milieu de
la plus riche végétation, où son aridité de ruine contraste de la
manière la plus pittoresque : il porte encore les traces du feu qui
jadis s’échappait de son cône brûlé, mais il est aujourd’hui une
source de fécondité : il conjure les nuages de son vaste horizon,
il en condense les vapeurs comme par un contact üiâgique, l’eau
ruisselle de toute part et ses flots écuineux dessinent au loin les
rives de ce front séculaire q u i, malgré son grand âge, alimente
une nature toujours jeune. Ainsi, d’imposantes scènes de désordre
préludèrent au calme et à la fertilité d’O-Hivaoa : sous ce
rapport cette île, ainsi que toutes celles qui couvrent la vaste
étendue des mers,-ne fit que subir la loi commune, puisque partout
de grandes révolutions préparèrent les harmonies de la
physique du globe ; mais toutes ces terres isolées doivent-
elles précisément leur formation à la même cause que les
grandes terres ? Les habitants en sont-ils primitivement aborigènes,
ainsi que tout porté à le croirè pour chacun des continents?
La puissance qui remania notre planète et lui donna sa configuration
actuelle, s’est successivement épuisée à partir du moment
où commencèrent à se former les nombreux volcans d’où
s’échappèrent ou s’échappent encore les vapeurs et les gaz du
sein de la terre : de cette époque datent lés périodes successivement
témoins des diverses modifications de la vie et de
ses étonnants phénomènes. Le squelette du globe devint plus
stable et les perturbations générales ne furent plus le ré