CHAPITRE XXVIIE
Traversée de Taïti à Apia.
o1838v Dès sepl heures du matin nos corvettes ont relevé 16 Septembre. r
leurs ancres et se sont couvertes de toile pour continuer
leur marche dans l’Océanie.
J’avais l’intention de passer dans le canal qui
sépare Taïti de l’île Eimeo, sa voisine, et la brise qui
soufflait directement de l’est, semblait d’abord favorable
à mes projets , mais à midi les vents sautent
au S. 0 ., et dès-lors je dus complètement y renoncer.
Je viens contourner Eimeo par le nord dont je longe
îa côte à une distance de deux à trois milles, et dont
nous distinguons facilement tous les accidents de
terrain. Cette vue est des plus gracieuses et paraît tout
aussi délicieuse et souvent plus pittoresque que celle
de Taïti même.
Quand nous nous trouvons dans l’ouest du port de
Talou, nous appercevons un grand édifice en pierres
et à plusieurs étages, percé de nombreuses fenêtres et
qui a une certaine apparence lorsqu’on le voit de la 1838-
, , . . . Septembre mer. C est 1 établissement auquel les missionnaires
anglais ont donné le nom pompeux de South-Sea
academy. Il y a longtemps que je présumais que ce
titre fastueux ne serait justifié par aucun résultat. En
effet, cet établissement est en ce moment à peu près
abandonné.
Nous avions perdu de vue les terres d’Eimeo, lorsque
à six heures et demie du soir, à travers la brume, nous
apercevons vaguement les terres de l’île Tabou-Ema-
nou. Je n’avais en aucune manière l’intention de
recommencer sur cet archipel un travail qui déjà avait
été fait en 1823 par la Coquille, commandée par le
capitaine Dtiperrey ; c’est pourquoi, poussé par une
brise très-fraîche du S. E., je continue à courir toute
la nuit pour passer au sud de l’île Raiatea.
Au jour, je mets le cap au N. £ 0 . , et bientôt nous i t .
sommes en vue des hautes terres des îles Raiatea et
Tahaa ; et ensuite je rallie de près les brisants qui
forment la ceinture de l’île Bora-Bora. Cette dernière
île avait été visitée par laCoquille en 1823,et jerecon-
nais avec bonheur ce sommet sourcilleux, nommé
Pahia, qui domine ces vertes forêts et ces riantes
plages que j’avais alors si souvent parcourues, et où
j ’avais recueilli tant de plantes curieuses et souvent
nouvelles. C’était là aussi que j’avais pour la
première fois commencé sérieusement mes études
ethnographiques.
Après avoir dépassé la pointe septentrionale de
Bora-Bora, je continue encore à courir au nord pour