Août. surt(>ut dirigées contre ma personne et mon peu de
galanterie. J’en suis enchanté, car ce soir tout est
paisible à bord, et le silence incompatible avec la
présence des femmes, nous promet une excellente
nuit. Du reste, je prévois que plus d’un de mes compagnons
de voyage aura plus tard à se repentir d’avoir
cédé si facilement aux charmes de ces belles.
Déjà dans ma promenade, en passant près de notre
aiguade, je n’avais pas vu sans quelque dégoût une
troupe d’indigènes se baigner dans le bassin où nos
matelots puisaient leur eau. Il était peu gracieux, en
effet, de penser que nous allions boire l’eau qui, quelques
instants auparavant, avait servi à laver les plaies
horribles qui rongent le corps de la plupart de ces
malheureux. D’un autre côté, tous les jours le matin
les nymphes nouka-hiviennes allaient y faire leurs
ablutions ordinaires; mais l’homme qui vit à bord
d’un navire, ne doit pas se montrer trop délicatj
aussi je rejetai la proposition qui me fut faite
d’imposer le tabou sur les eaux de l’aiguade pendant
tout le temps que nous y ferions notre eau.
28. Quelques naturels arrivent en pirogue le long du
bord pour nous vendre quelques cocos et de mauvais
fruits; mais ils sont trop exigeants. Pour la moindre
chose, ils demandent des fusils et de la poudre, et
rejettent tous les autres objets qu’on leur présente ;
aussi les marchés sont peu animés, les cochons et
les poules sont rare s, nos cuisines en souffrent, et
je n’ai d’autres ressources que le peu de poisson que
nous pouvons prendre, et du pourpier qui fait d’ex-
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cellentes salades et qui se trouve en abondance sur
la colline où Porter avait établi sa citadelle.
A S heures du soir, je vais faire un tour à terre,
et je me munis d'une ligne de sonde pour prendre
les dimensions du grand Ficus dont j’ai déjà parlé. A
2 mètres de terre je trouve qu’il mesure 77 pieds
de circonférence ( environ 25 mètres). Le tronc est
composé de grosses tiges entrelacées, il conserve
presque la même largeur jusqu’à environ 13 mètres
de hauteur, puis il se divise, forme à peu près une
quinzaine de grosses branches dont plusieurs ont
jusqu’à 2 à 3 mètres de contour. Ces dernières s’étendent
horizontalement de manière à couvrir de leur
ombre un espace circulaire de plus de 100 mètres de
diamètre.
Le ruisseau principal de la vallée, vient couler sous
ce végétal majestueux, et c’est avec délices que je
viens chaque soir m’asseoir là sur un roc de basalte,
et j’y respire un air frais, tandis que mes
pieds trempent dans l’eau limpide du torrent.
Près de là s’élève un petit moraï. Auprès du catafalque
où est déposé le corps d’un homme mort
récemment, sont plantés debout et en ligne, plusieurs
faisceaux de rameaux blancs au bout desquels
flottent de longues banderolles blanches.
A cent pas de là environ, une douzaine d’individus
montés sur la plate-forme qui supportait une assez
belle case, récitaient des espèces de litanies en 1 bonheur
du défunt. Quatre ou cinq vieillards faisant
une mine assez piteuse, chantaient par moments en
r i. l u i .
Pl. LVG