1838. pour venir se réfugier dans une misérable habitation
Septembre. , . . . , .
H. l x i v . du village a cinquante pas du rivage.
Au retour du messager et sur la réponse affirmative
qu’il nous apporta, nous nous mîmes en route.
Au milieu d’un petit bois de goyaviers, sous un modeste
hangar, se trouvait réunie la cour taïtiene; des
espèces de sénateurs nonchalamment assis, étaient
occupés à divers travaux ; une faible barrière les séparait
du reste du peuple. Sous sa tente nous trouvâmes
la reine Pomaré-Vahiné, vêtue simplement
d’un espèce de peignoir blanc, et tenant son enfant
dans ses bras ; elle était assise sur un espèce de tapis,
près d’elle se trouvait son époux, le prince Pomaré-
tané, sa tante Taré-moé-moé, sa soeur et ses cousines,
jeunes filles assez avenantes, enfin, l’orateur de la
reine, personnage grave et d’une bonne mine, chargé
de porter constamment la parole pour Sa Majesté;
car ainsi l’exige l’étiquette nationale.
Un petit escabeau me fut offert devant la reine,
MM. Moerenhout et Henry se placèrent comme ils
purent près d’elle, le capitaine Du Petit-Thouars alla
s’étendre sur une nate à côté de Pomaré-tané, et le
capitaine Jacquinot fit comme lui.
Après avoir salué la reine et l’avoir considérée un
instant en silence, d’un air un peu sévère, je lui
adresse la parole à peu près en ces termes : J’ai appris
à Manga-Reva les mauvais traitements qui ont
été infligés aux missionnaires français, par ordre de
la reine; j’ai cru devoir me déranger de ma route
pour venir lui demander des explications d’une conduite
si blâmable, et satisfaction s’il y a lieu. J’en
ai été d’autant plus surpris , que j ’avais vu la jeune
princesse Aimata 15 ans auparavant dans l’île Taïti,
et que nous Français, nous avions toujours traité
amicalement la reine et toute sa famille. Je sais que
celte malheureuse affaire a été entièrement arrangée
par le commandant de la Vénus, il est dès-lors inutile
de revenir là-dessus, mais à l’avenir, j ’espère que la
reine tiendra ses promesses et s’abstiendra de tout
mauvais traitement envers les Français.
Au bout d’un moment, l’orateur prend la parole^,
et dit que Pomaré se rappelle bien m’avoir vu lors-
que je passais à Taïti, qu’elle n’avait jamais eu en
effet à se plaindre de nous et que nous avions toujours
été amis; mais que lorsque les missionnaires
français étaient venus à Taïti, l’état du pays et la présence
de quelques rebelles, qui déjà avaient voulu
changer la religion du pays et y avaient semé des
troubles, avaient exigé que l’on prît des mesures,
pour les éloigner.
Je vis bien que la pauvre femme n’était que l’écho
des Anglais qui lui avaient soufflé ces pitoyables
raisons pour s’excuser. Je me contentai alors de répliquer
: Sans doute la reine est libre dans ses états,
et personne au monde, pas même le roi des Français,
ne peut lui demander de changer sa religion;,
aussi aurait-elle eu raison si elle s’était contentée dé
défendre aux missionnaires français tout signe public
de leur culte; mais les traitements cruels qui ont
été infligés à deux citoyens français, étaient tels