dans le grand Océan, ne l’aident pas à se constituer différemment
il est a ci aindre que le sort de devenir une colonie anglaise ne
lui soit réserve avant peu, et je crois que le plan est depuis longtemps
arrêté dans les vues de la Grande-Bretagne, et qu’elle n’attend
qu’un prétexte pour le mettre à exécution.
( M. Duèouzet.')
N o te 14, page 8 5 .
Taïti n’est plus ce qu’elle était au temps des W a llis , des Bou-
gainville et des Cook. À voir ces rivages toujours verts , arrosés
d’une multitude de ruisseaux d’une eau fraîche et limpide, à vo ir
ces ravins profonds couronnés d’arbres jusqu’aux sommets, on
croirait retrouver encore la reine de l’Océanie. Mais un coup
d’oeil jeté sur cette population sale et déguenillée, qui a échangé
sa douceur, sa naïveté, ses vertus premières, pour l’astuce, l’ivrognerie
et la prostitution, ce coup d’oeil suffit pour désabuser
le voyageur. Les Taïtiens semblent avoir oublié le petit nombre
d’industries qu’ils tenaient de leurs aïeux. La construction et
l’entretien des grandes pirogues de guerre, la fabrication des
étoffes en écorce, l’édification des moraïs ou monuments funéraires
, enfin les corvées pour le service des chefs entretenaient
parmi le peuple une activité salutaire. Mais aujourd’hui l’art naval
des Taïtiens semble avoir rétrogradé vers la petite pirogue formée
d’un simple tronc d’arbre creusé ; les étoffes d’écorce moins
estimées des naturels que les tissus d’Europe, n’occupent plus
qu’un petit nombre de bras. Les moraïs ont fait place à la modeste
sépulture protestante. On sait d’ailleurs quel respect la
cendre des morts inspire au révérand M. Wilson. Les chefs ne
sont plus là pour prescrire les jours de travail et de repos, les
corvées pour 1 édification des grandes salles d’assemblées, ni les
autres travaux qui intéressaient la communauté. Ainsi, l’on peut
dire que les Taïtiens doivent aux Européens et surtout aux missionnaires
anglicans, sinon le mal vénérien, du moins la paresse
qui pour l’humanité est une véritable lèpre. Ainsi, à part un petit
nombre de cases dont la construction est assez soignéq, et les petites
barrières dont elles sont entourées , on cherche vainement ici les
traces de la main de l'homme pour lequel la nature se montra s i
prodigue. Encore une fois,, les missionnaires ont manqué à’ leur
mandat, et n ont rien fait depuis ,4o ans pour se faire pardonner
l’usurpation du pouvoir temporel qu’ils ont exploité d’une manière
étroite et égoïste........
Nous fumes bientôt à l’entrée de la baie de Papeïfi qui est parfaitement
couverte par la ceinture de récifs où il n’existe qu’une
passe étroite. Un îlot couvert d’arbres est assis à l’entrée de la
b a ie , semblable a un pot à fleurs. La reine a une habitation sur
cet îlot où le vieux Pomaré II travaille à la traduction delà bible-
La frégate la V én u s, mouillée au centre de la baie, épouvante
encore de ses canons la pauyre reine qui a eu la faiblesse d’écouter
les.conseils de l’homme qui,est à la fois consul, ministre,
boucher et brocanteur. Deux baleiniers américains et un brick
péruyien appartenant au général Freire, réfugié, sont mouillés
dans la baie. Ici du moins, avant de mettre pied à terre, on peut
arrêter ses regards sur une apparence de ville. Papeïü est en effet
une v ille , et même une ville royale. On y trouve un et même plusieurs
palais , des consulats anglais, français et améi’icains, avec
les pavillons des nations qu’ils représentent; un môle ou quai de
débarquement, des hôtels, des boutiques, des enseignes, e tc .,
en un mot, tout ce qui constitue une ville. Il faut dire aussi que
d’un coup d’oeil on embrasse l’ensemble de cette ville qui n’a
guère qu’une seule file de maisons ou cases qui bordent la grève.
Le nombre de maisons pourvues de portes et de fenêtres, n’est pas
considérable. La plupart ne diffèrent en rien des cases ordinaires
construites en paille et en roseaux. Chaque habitation a du côté de
la campagne un assez grand enclos ou jardin palissadé, ayant une
issue sur la grande route de Matavaï, cette oeuvre des femmes pé