vivement me voir tuer Nakalassé, et mettre l’île Pivâ
à feu et à sang; il regrette toujours de ne pouvoir
m’assister dans cette expédition, mais il est retenu
par les partisans de Nakalassé ; il paraît que la couronne
est déjà à charge à ce malheureux prince. Du
reste, il a donné l’ordre à tous ses sujets de rester
dans leurs foyers pendant la journée de demain, il
leur a défendu surtout de se porter sur Piva pour défendre
Nakalassé. Déjà plusieurs guerriers de celui-ci
ont abandonné leur chef ; un instant même Tanoa a
espéré pouvoir nous livrer notre ennemi commun.
Mais sommé de comparaître devant le roi de Pao, Nakalassé
a refusé, et a ajouté même qu’il ne quitterait
pas son île, et qu’il y attendrait les Français de pied
ferme. Que du reste il faisait ses préparatifs de défense;
que jamais aucun ennemi n’avait osé mettre le
pied sur l’île Piva, et que confiant dans sa renommée
et dans sa position qui est très-forte, il est persuadé
que les Français n’oseront jamais faire une attaque
contre sa personne.
Toutes ces bravades ont paru impressionner assez
fortement nos sauvages. Tanoa me fait dire qu’il désire
fort nous voir détruire Piva, mais qu’il craint
notre impuissance dans une pareille entreprise. Lai-
chika lui-même qui semblait si désireux d’assister à
l’attaque de Piva, commence à reculer. Sous le prétexte
que je ne dois point diriger moi-même la troupe
de débarquement, il se rejette sur son rang pour rester
à bord à mes côtés. Je cherche à lui faire honte et
je lui reproche sa pusillanimité en lui disant que j ’avais
compté sur lui pour me représenter dans cette
affaire, mais qu après tout je saurai bien me passer
d’un poltron.
Ces paroles produisent leur effet, elles piquent l’a -
mour-propre de Latchika qui enfin se décide à marcher.
Cependant ce n’est pas sans de nouvelles objections
fondées sur la grande réputation de Nakalassé,
la forte position de son village, et sur la témérité
de notre entreprise.
Mafi, qui aussitôt qu’il a appris que nous nous disposions
à combattre Nakalassé, est venu me demander
un mousquet pour être de la partie, paraît être
toujours dans les mêmes intentions.
MM. Gourdin et Gervaize ont été parfaitement ac-
cuillis par Tanoa. A chacun de ces messieurs le roi a
fait l’honneur d’un kava avec toute son étiquette; on
a même invité M. Gervaize à prendre sa part d’un festin
de cannibales et à manger un morceau de tangata
{homme). Ce mets provient d’un sujet de Nakalassé,
tué par un habitant de Pao, depuis deux ou trois
jours, et que ses ennemis n’avaient point encore
achevé de dévorer. M. Gervaize, prévenu par Latchika,
n a point voulu y goûter, et il a cru devoir s’éloigner
au moment où le kava était servi et prêt à être
‘distribué.
Ces deux officiers s’accordent à déclarer que notre
ami Latchika a été reçu par tous les habitants de Pao
et même par Tanoa avec de grandes démonstrations
d amitié et d’attachement. Du reste, je sais que Latchika
est fils de ce pauvre Tombo-Mouha, fils de Firtm