Ce que nous venons de dire des petites îles est tellement vrai
que la Nouvelle-Zélande elle-même est aujourd’hui, à peu de
chose près, parfaitement connue, quoiqu’elle possède une innombrable
quantité de lieux où l’homme civilisé n’a point encore
mis le pied. On ne l’a étudiée que sur quelques points, et cepend
an t, exception faite des animaux ou des végétaux propres à
quelques cimes, on a déjà sur tout des notions exactes. Combien
de précieuses dépouilles l'île de Bornéo, la Nouvelle-Gui-
née, l’Australie, n’ont-elles pas déjà fournies par l ’intermédiaire
de la marine ! Sans doute, il faudrait des expéditions spéciales
pour pénétrer les secrets qu’elles nous cachent encore, mais
il y aurait ingratitude à oublier que c’est précisément aux voyages
entrepris sur la plus vaste échelle que l’histoire naturelle
doit ses plus nombreuses et ses plus belles découvertes. Pour
soutenir cette assertion, il suffit de rappeler les noms de Cook,
de Lapérouse, d eB aud in , d’Entrecasteaux, de Kotzebue et de
Dumont d’Urville. Soutiendrait-on cette hypothèse erronnée que
tout est maintenant connu et qu’il faut longuement s’appesantir
sur la moindre localité pour espérer trouver du nouveau ? Ce
serait une erreur : le nouveau abonde partout , en tout genre , et
parmi les choses les plus vulgaires, qui sont aussi les plus négligées,
il reste beaucoup à étudier. Les expéditions conçues sur
les plans les plus étendus seront longtemps encore les plus fructueuses,
parce qu’au milieu de la multitude d’objets, il en
échappe toujours quelques-uns ; parce qu’enfin un fâcheux hasard
a inévitablement conduit les navigateurs dans les mêmes archipels
à la même époque de l’année. Mais revenons à nos Polynésiens.
Comme en toutes choses il faut un point de départ, en d’autres
termes, un point de comparaison, nous allons décrire d’abord
les habitan ts des îles Marquises ; ils seront le type autour duquel
nous réunirons les caractères des naturels de chaque archipel.
Les îles que nous avons visitées dans la Polynésie intertropicale
sont aux Marquises, Nouka-Hiva ; aux Pomotou, Manga-
Reva; dans l’archipel de T a ïli, l’île du même nom; aux Samoa,
Opoulou; aux Tonga, Vavao, Lefouga une des îles du groupe
Hapaï.
Nous choisissons les Noukahiviens comme type, parce qu’ils
sont les mieux faits des insulaires que nous avons été à même
d’étudier ; les défauts d’un tableau ressortant d’autant mieux
qu’on les oppose au plus parfait modèle du genre.
Les Mendoces sont de taille moyenne ; un mètre soixante-dix
centimètres est parmi eux la taille le plus ordinaire. Ils frappent
tout d’abord par l’élégance de leur habitude extérieure , leur démarche
pleine d’aisance, leurs mouvements gi’acieux; leurs muscles
ne sont point très-fortement marqués, cependant l’oeil peut
en dessiner facilement les contours; il en résulte que leur apparence
est plus agréable que vigoureuse ; cependant, on ne saurait
leur reprocher des formes trop arrondies, en un mot, trop efféminées
: leur corps et leurs membres sont parfaitement proportionnés
; leurs articulations minces semblent donner à leurs
mouvements une prestesse, une facilité admirables. Un bassin
étroit, dont les moindres saillies osseuses disparaissent cette fois
sous des muscles véritablement très-vigoureux, ainsi que cela
s’observe toujours chez les montagnards; une poitrine arquée,
évasée supérieurement, arrondie intérieurement, contribuent à
leur donner la taille la plus svelte possible, et à répandre sur
leur personne une légèreté qui décèle une respiration abondante.
Leurs b ra s , quoique un peu minces relativement à leurs membres
inférieurs, parce qu’ils les exercent p e u , ne les déparent
point; ils prennent en effet une part constante aux délicieuses
poses de leur corps. Leurs mains sont petites et bien faites ; leurs
pieds mériteraient les mêmes éloges si la marche pieds nus ne les
déformait.
La fi gure de ces hommes porte aussi tous les signes d’une
amélioration de race : elle est plus ovale que ronde; leur front