parlé, ensuite nous pénétrons dans de majestueuses
forêts que traverse un sentier bien protégé des
rayons du soleil. La promenade y est des plus agréables.
Nous quittons la forêt pour passer sur une verte
esplanade où se trouve le village de Falé-Ata. Le chef,
Mate-Hia, qui le commande, s’était rendu à Apia
avec la plupart des hommes dans le dessein de trafiquer
avec les Français. Nous avons en effet rencontré
sur la route de nombreux groupes transportant au
marché de la plage, des cochons, des poules, des
corbeilles de taros, des cocos et des bananes. Ces
hommes ont en général un air doux et paisible, mais
ils paraissent peu communicatifs, ils semblent même
conserver un sentiment marqué de défiance, et
peut-être que les missionnaires ne sont pas étrangers
à ces dispositions méfiantes, surtout s’ils ont appris
à ces peuplades que nous appartenons à cette
nation qui a eu jadis querelle avec eux à Tou-tou-
ila.
Nous ne trouvons presque personne à Falé-Ata. Cependant
la femme de Mate-Hia m’offre sa maison pour
m’y reposer et déjeûner, et sur ma demande elle me
fait apporter quelques cocos. Je m’empresse de reconnaître
ces politesses par quelques objets que je donne
à notre hôtesse, et je remarque qu’elle m’adresse ses
remerciements à la manière des Tonga, c’esfc-à-dire
en élevant l’objet donné au-dessus de sa tête et en
s’inclinant légèrement. J’aime à retrouver dans ces
îles cette coutume qui, pour moi, place déjà les Tonga
si fort au-dessus des autres peuples polynésiens, car
elle annonce au moins des sentiments de gratitude qui
se manifestent par un acte extérieur.
Le village de Falé-Ata est bien plus grand que celui
d’Apia, ses maisons sont plus grandes, mieux tenues,
et bien plus confortables. Une grande place gazonnée
occupe le centre du village, et les cases régulièrement
situées à l’entour, forment un tableau charmant. Je
suis agréablement surpris de trouver dans la plupart
des cases de belles pirogues qui atteignent quelquefois
une longueur de 15 mètres, et qui sont abritées
avec soin. Frazior m’apprend cependant, qu’une
distance de plus d’un mille sépare le village de la mer,
et il faut que les naturels les conduisent par terre jusque
là.
Les nombreux pieds de tabac plantés autour des
maisons, attestent le goût que les naturels ont pris
pour ce narcotique qu’ils demandent avec instance à
nos matelots.
Nous opérons notre retour par un autre chemin,
mais toujours au travers de magnifiques forêts, qui
si elles étaient défrichées, offriraient des terrains excellents.
Je crois pouvoir assurer que les plantations de
sucre et de café y prospéreraient à merveille. Tous
les animaux s’y propageraient rapidement, et la
nature pourrait pourvoir à leur nourriture sans que
l’homme ait hesoin d’arroser la terre de sa sueur. En
parcourant ce pays si riche par sa végétation,. on se
reporte involontairement vers notre vieille Europe où
des millions d’hommes se disputent souvent quelques