1888. Oetobre. civile sur celte malheureuse île; mais il ne peut y
avoir de combat entre ces différentes tribus, qu’autant
que le roi de Pao, leur sultan et maître, leur en a
accordé l’autorisation. Aujourd’hui elles sont en paix.
Toui-Neou qui était ici dernièrement et qui a été
rappelé par Tanoa à Pao où nous l’avons rencontré,
est le neveu de Tanoa par son père et du roi de La-
guemba par sa mère ; il n’a que le titre honorifique
de Toui-Lebouka. Le vrai chef de Lebouka se nomme
Tele-Bouka, et Lacedai n’est que son neveu. Du
reste', on m assure que les deux chefs sont bien disposés
en faveur des Européens.
Un des frères de Tanoa, appelé Lakatou-Boulè, s’était
joint à Nakalassé et à Mala, lorsque ceux-ci, après
une guerre opiniâtre, chassèrent Tanoa de son trône.
Lakatou fut tué par un des chefs de Pao. Un autre
chef nomme Touké, qui avait trempe dans le même
complot et était resté un des soutiens de Nakalassé, a
été tué il y a quelques jours par ordre de Tanoa.
Voici comment on raconte l’événement.
Tanoa avait déjà envoyé une première fois un chef
avec 1 ordre d assassiner Touké pendant son sommeil,
mais celui ci s eveilla au moment ou il allait recevoir
le coup fatal. En reconnaissant l’homme qui devait
le frapper comme l’envoyé de Tanoa, il s’écria :
Je sais que je dois périr prochainement, mais au
moins avant je me vengerai, et en effet, il se rendit
à Pao dans ce but; mais là, Tanoa sut si bien prendre
les dehors de 1 amitié, qu’il gagna la confiance de
Touké, qui plus tard, invité par Tanoa à venir prendre
un kava comme gage de réconciliation, eut l’imprudence
de s’y rendre et fut assassiné quelques jours
après. Ce qu’il y a de remarquable, c’est que ce manque
de bonne foi, et cette perfidie dont Tanoa fit
preuve en cette circonstance, sont tellement dans les
usages du pays, que pas un seul blâme ne s’est élevé
sur une pareille conduite.
Je suis à peine arrivé à bord q u e , fidèle à sa promesse
, Wippy m’apporte le journal du Jane. Williams
m’envoie quelques légumes frais de son jardin. J’éprouve
un véritable plaisir à penser que peut-être un
jour, par les soins de ces quelques hommes à demi-
civilisés et pour la plupart l’écume de notre société,
les navires trouveront à Lebouka un excellent port
de ravitaillement, si les nouveaux arrivants persistent
à se jeter dans une voie de progrès et à se livrer à une
vie plus active, qui semble leur promettre de vives
jouissances achetées par peu de fatigues.
Tous les travaux du bord se poursuivent avec activité;
notre provision d’eau est faite; MM. Goupvent
et de Flotte ont à peu près terminé le plan du port ;
M. Desgraz a pu réunir un grand nombre de mots de
la langue viti, et son vocabulaire est à peu près
complet.
Je passe ma journée à bord de l’Astrolabe où je reçois
la visite d’un chef d’une tribu de la montagne. Il
se distingue facilement des naturels de Lebouka par un
air plus sauvage et des manières plus réservées; moins
habitué que ceux-ci au contact des Européens, ce
n’est pas sans défiance qu’il monte à bord de nos na