îles Nouka-Hiva, toutes ces peuplades sont constamment en
guerre; dans les occasions solennelles lorsqu’il faut sacrifier un
homme à la divinité ou aux mânes d’un chef vénéré , la tribu fait
irruption sur les terres de son voisin, et là le premier malheu—
leux que 1 on rencontre est pris , garotté et amené sur le lieu du
sacrifice, où après toutes les cérémonies d’usage il est mis à mort
et dévoré par les gros bonnets de l’endroit, attendu que c’est un
mets trop friand pour la canaille. On pense bien que l’ennemi ne
demeure pas en leste et qu à son tour il trouve le moyen de voler
un homme. J’avoue que tout cela m’a un peu l’air de Barbe-Bleue
ou du Petit-Poucet. Deux Européens qui depuis longtemps vivent
parmi ces sauvages, me l’ont positivement assuré ; cependant
je voudrais le voir.
(il/. Demas.')
Noie 5, page 34«
Le 28, avant le jour, je partis dans le grand canot denotre corvette
pour aller lever le plan de la baie ou port Tai-Hoa ( Tchi-
chacoff). Le port situé a 4 milles a l’ouest du port Anna-Maria,
est resserré entre des montagnes escarpées, qui le mettent à
l’abri de tous les vents. Mais il est d’un accès plus difficile que
celui d Anna-Maria, surtout pour les grands navires qui préféreront
toujours ce dernier, fort bon aussi. Au jour je me trouvai
à l’entrée de ce port et je vis immédiatement des habitants courir
de toutes parts de la baie vers la plage de débarquement, sur laquelle
je me dirigais. La vue des espingoles qui armaient mon
canot me parut les effrayer d’abord. Mais ils furent bientôt rassurés
quand ils me virent descendre sans armes au milieu d’eux,
accompagné de mon interprète; je le chargeai de leur dire que
nous venions en amis pour leur acheter des vivres et exécuter un
travail, qu ils eusséntàêtre bons et honnêtes avec nous, sans
quoi ils seraient sévèrement châtiés. Le chef de cette partie de la
baie me présenta sa main en signe d’amitié et je commençai immédiatement
mon travail, laissant nos deux commissaires faire
leurs marchés de vivres. Cette baie, l’une des plus jolies que l’on
puisse voir, n’a plus que 260 mètres d’ouverture. Elle s’élargit
à mesure que l’on s’y enfonce , et se trouve divisée en deux par
une pointe qui avance au sud et forme ainsi dans le fond deux
baies on ne peut plus gracieuses ; celle de l’ouest surtout. Celle-
ci est l’embouchure d’une vallée délicieuse encaissée entre une
chaîne de montagne à l’est et des montagnes qui s’élèvent perpendiculairement
à une hauteur de 3oo à 4°o mètres. Cette petite
vallée qui n’a pas plus de 4oo mètres de large, remonte au nord
à la distance de trois milles et est fertilisée par une petite rivière
qui coule doucement vers une épaisse forêt de bananiers, de cocotiers,
d’arbres à pain, de pandanus, etc. Des cases Semées sur
ses bords dans des positions habilement choisies, concourent à
en faire une vallée enchantée. Les personnes chargées de l’achat
des vivres eurent beaucoup de peines à arriver à leurs fins, soit inhabileté,
soit mauvaise volonté de la part des naturels, ils ne purent
se procurer que dix cochons, au lieu de vingt qu’ils désiraient
avoir. Ils faillirent se faire une mauvaise affaire qui cependant
s’arrangea amicalement. L’un d’eux entrant en chasseur dans la
•vallée, s’amusa, à l’instigation de quelques jeunes naturels, à tirer
sur d’innoffensives poules que l’on ne voulait pas nous vendre sous
le prétexte qu’elles étaient tabouées. Quelques vieillards plus superstitieux
que les jeunes qui poussaient des cris de joie à chaque
coup de fusil, allèren t se plaindre ap roi qui accourut furieux sur
le lieu du délit. Il cria, gesticula en plein vent pendant une de-
mi-heure, mais il se calma quand l’interprète lui dit que nous
ignorions le tabou et que le délinquant était prêt à payer le dommage.
Il répondit que ça n’était pas avec des présents que l’on
pouvait effacer un crime, qui ne trouvait d’excuse que dans notre
ignorance,, et il s’en fut. Mon domestiqne grenoblois, à idées fan