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Octobre. n’ayant aperçu que des plantations de bananiers, d'arbres
à pain et de taro entremêlées de broussailles dans
lesquelles il eût été imprudent de s’engager, il nous a
ralliés à 7 heures. Aussitôt après j ’ai donné l’ordre de
la retraite, et après avoir incendie le reste des cases,
les deux détachements se sont embarqués à 7 heures
et demie, et nous avons fait route sur les corvettes,
emportant avec nous le peu d’objets qu’on avait pu recueillir
dans les cases, tels que des poteries, un boulet
de 36, une gueuse en fer et un rabot qui paraissent
avoir appartenu au brick capturé. J’évalue à environ
soixante maisons, dont plusieurs très-grandes,
ce que nous avons détruit. Nous n’étions pas encore
à un mille au large, que les naturels se dirigeaient sur
les cases en feu qu’ils n’avaient pas eu le courage de
défendre ; en faisant revirer les canots je leur ai vu
prendre de nouveau la fuite, alors pour les intimider
davantage, j ’ai fait décharger les espingoles dont ils
ont vu les projectiles tomber à terre au milieu des
arbres. Ainsi s’est terminée le plus heureusement possible,
la mission que vous m’aviez confiée; quoique
nous n’ayons rencontré aucune résistance, le sang-
froid déployé par tous les hommes de l’expédition est
digne d’éloges; tous ont marché constamment unis,
ont exécuté ponctuellement tous les ordres, et les
deux détachements, attentifs à la voix de leurs chefs,
ont suivi constamment leur exemple et ont concouru
avec le même zèle au succès de l’expédition.
« E. Du Bouzet. »
Ainsi la vengeance du nom français, quoique un
peu tardive, a été exécutée avec une grande rapidité
; si je dois en croire les assertions des hommes du
pays, les Nakalasséens sont des hommes perdus; car
aujourd’hui, réduits à l’état de fugitifs, ils n’ont plus
de lieu où ils puissent se réunir. Tous leurs ennemis
vont se mettre à leur poursuite, et déjà Latchika
et Tanoa se disposent à prendre les devants; ce dernier
surtout se réjouit d’avance des succulents repas
que semblent lui promettre ses ennemis qu’il considère
comme déjà à sa merci.
Du reste, cette expédition n’a rapporté de Piva,
comme trophées de la victoire, que fort peu d’objets
d’industrie sauvage, déposés au musée maritime. Nos
hommes y ont rencontré peu de poules, encore elles
ont fui à l’approche de nos gens ; un cochon a été tué
et fera bon profit à l’équipage. Il paraît que parmi
les habitations qui ont été détruites, il y en avait
quelques-unes fort belles; celle de Nakalassé surtout,
était un chef-d’oeuvre vitien.
Latchika est maintenant tout fier de son expédition,
mais il m’informe qu’il va me quitter pour retourner
immédiatement à Laguemba et revenir ensuite au
premier jour avec ses pirogues, faire la chasse à Nakalassé
et à ses gens. Comme je me plains à Latchika
de son départ précipité, il me fait observer qu’il
n’avait jamais dû m’accompagner plus loin que l’île
Leva, et c’est alors seulement que je découvre que la
terre de ce nom est celle qui est à l’est de Pao, et qui
n’est pas éloignée de plus de quatre à cinq milles de