la situation des anses appliquées latéralement au-dessus des oreilles. Un troisième nous montre un
Nègre accroupi formant le corps du vase tout entier. Il existe enfin, au Musée du Louvre, à côté des
statuettes dont nous venons de parler, une grande applique en terre cuite dont le centre est une tête de'
Nègre d’une fort remarquable exécution.
Mentionnons encore, en terminant, la statuette de Nègre découverte à Marzabotto, et que nous reproduisons
(fig. 192) d’après la gravure publiée par les Matériaux pour F histoire de F homme (1).
Plusieurs de ces modèles ont survécu à la ruine de l’art étrusque. On en Connaît des imitations romaines
et le Louvre en possède quelques-unes. Les artistes romains ont d ’ailleurs
fréquemment représenté les Nègres dans les derniers siècles de l’Empire. Les
recueils de monuments en contiennent un certain nombre. Les plus connus sont
ceux qu’a publiés Caylus, une tête de Nègre qui forme le corps d’une lampe en
bronze, et une statuette de bronze massif, d’une certaine élégance, découverte à
Châlonrsur-Saône (2).
Les Assyriens et les Perses ont connu et dessiné aussi la tête du Nègre, mais en
lui donnant des caractères spéciaux. Le type négroïde que l’on trouve à Koyundjik
représente, comme nous Pavons déjà indiqué, l’élément anthropologique primitif
de la Susiane, et nous serions disposés à voir dans les Nègres des monuments Persans
une population semblable, analogue à l’ancien peuple qu’Hamilton Smith a
signalé sous le nom d’Hubbashee dans le Mekran et le Laristan (3). Est-ce à la
même race qu’il faut rapporter le prototype des Bouddhas nègres de l’Inde ? Jusqu’à
quel point peut-on rattacher ces représentations à l’histoire des Habbashis ou Hasya-
silas dont les Puranas font mention (4) et qui semblent avoir été des Négritos?
L’ethnologie n’a pas encore de réponse à ces difficiles questions.
Fig. 192. — Statuette de
Nègre découverte à
Marzabotto.
Quoi qu’il en soit, en combinant l’examen de tous les monuments que nous a laissés l’antiquité, on
parvient à constater que ses notions sur les Nègres de l’Afrique et de l’Asie étaient très-étendues, mais
que ni l’une ni l’autre de ces branches du tronc noir n’a été l’objet d’une étude Vraiment scientifique.
Quelques descriptions pittoresques, parmi lesquelles nous ne voulons pas omettre celle qu’on attribue à
Virgile, sont, avec les représentations que nous ayons passées en revue, tout ce que les anciens nous ont
laissé sur cette matière.
Le Moyen-Age perd de vue ces brefs enseignements de l’antiquité, la notion de couleur lui reste seule.
Lorsque, dans ses peintures religieuses, il veut représenter l’un des Rois Mages, par exemple, sous la forme
d’un Nègre, il lui donne tous les traits d’un Blanc peint en noir. C’est sous cet aspect que, jusqu’au
quinzième siècle, les Nègres se montrent à nous dans les Épiphanies, etc.
Luca délia Robia rompt le premier avec cette routine absurde, et exécute, en se conformant à la nature,
la curieuse Négresse en faïence du Musée de Cluny (5). L’exemple de délia Robia ne porte pas de suite
tous ses fruits. Guido Reni et Rubens, Carlo Maratti et Van Tempel, Sebastiano Ricci, Coypel, Vanloo,
etc., ont continué à peindre des hommes noirs pour des Nègres, comme avaient fait Signorelli ut ses
contemporains.
(1) Matériaux pour Vhistoire primitive et naturelle de l’homme, 2° sér., t. III, p. 253, fig. 22,1872.
(2) De Caylus. Recueil d’Antiquités Égyptiennes, Étrusques, Grecques, Romaines et Gauloises. i762, in-4°; 1. Y, p. 252etpl. 90; t. VII,
p. 285 et pl. 82.
(3) H amilton Smith. The natural history of the human species. Edinburgh, 1846, in-16, p. 199.
(4) W ilford. On Egypt and other counlries adjacent to the Gali’River from the ancientbooks of the Hindus (Asiatic Researches, vol.IIl,
London, 1799, in-4°, p. 355). ’ ^ Symes. Relation de l'ambassade anglaise envoyée en 1795 dans le royaume d’Ava,tra.d. franç. Paris,
an IX, in-8,1.1, p. 243. — Etc.
(5) Musée des Thermes et de l’hôtel de Cluny. Catalogue, elc., n° 1151. Édit, de 1-874, p. 165;
L’illustre Albert Dürer, dans son Traité des Proportions (1 ), avait cependant esquissé un profil nigri-
lique encadré de lignes destinées à montrer que la tête étant placée dans une attitude telle que le plan
passant sous la cloison du nez et les lobules des oreilles soit horizontal, la projection de la face équivaudra
au quart de la projection totale. Le long du profil oblique de cette face inclinée en avant, Dürer traçait
une ligne affleurant les sourcils et le lobule du nez, et faisant avec son horizontale un angle de 69 à 70 degrés.
C’est là Y angle de Dürer, dont celui de Camper fut peut-être une imitation. Dürer a rendu avec beaucoup
d’exactitude sur la figure que nous lui empruntons, non-seulement le profil supérieur que nous venons
d’étudier, mais aussi celui de la moitié inférieure, et particulièrement le
menton oblique, que nous aurons fréquemment à signaler dans les pages
qui suivent.
Camper mesure à son tour l’angle facial du Nègre; puis il étudie sur son
profil la distance auriculo-jugale, la hauteur alvéolaire, la situation des
maxillaires, la position du trou occipital, en même temps qu’il détermine
sur la vue de face les proportions générales de la largeur à la hauteur,
la distance des orbites et leur grandeur relative, le rapport de la largeur
du squelette nasal à sa longueur, les formes générales de la mâchoire
inférieure, et trace son intéressant triangle naso-dentaire (2).
Mülder trace sur le crâne du Nègre son angle de conjonction, qu’il
compare, coinme avait fait Camper, à celui du Kalmouk, de l’Européen,
etc. Cuvier détermine sur le Nègre en même temps que sur le Jaune et le
Blanc, l’aire comparée du crâne et de la face (3). Crull adapte à l’étude des races humaines et du Nègre
en particulier, les recherches de Daubenton sur l’angle occipital(4) et.celles de Walker, deDoornik, etc.,
sur les angles spéciaux, dont ces anatomistes avaient préconisé l’application (5).
Toutes ces recherches, aussi bien que celles déjà mentionnées de Riolan, de Soemmering, deWhite, etc.,
portent exclusivement sur le Nègre africain, ou, comme on disait alors, Éthiopien, sans que l’on songe à les
utiliser pour arriver à distinguer les uns des autres les divers types nigritiques, que les grands voyages
ont fait connaître à l’Europe.
Le seizième siècle avu découvrir la Nouvelle-Guinée et ses Papouas, les Philippines et leurs Négritos, etc.;le
dix-septième siècle etle dix-huitième y ont ajouté l’Australie, la Tasmanie, la Nouvelle-Zélande, etc., et leurs
populations spéciales. Les Hottentots, lesBosjesmans, certains Cafres, une partie des Nègres des deux côtes
africaines, les Malgaches, etc., etc., se sont trouvés tour à tour en rapport avec les explorateurs. Et cependant
il faut arriver à Blumenbacli pour lire là description anatomique encore un peu vague de quelques
crânes, appartenant à des races nigritiques ou négroïdes. Quatre Nègres créoles, un mulâtre, un Nègre du
Congo, une Négresse de Guinée, quatre Bosjesmans, deux Australiens, sont étudiés et comparés par le
fondateur de la crâniologie (6), et neuf de ces individus figurent dans l’Atlas qui accompagne ses Décades.
Quoy et Gaimard, Desmoulins, Lesson, Garnot, Vimont, Dumoutier, MM. Jules Cloquet (7), Serres, Milne
•«.;(I)’A. Durer. Op. cit., f° 85 r#.
(2) P. Camper. Op. cit., trad. fr., p. 40-53.
(3) Cuvier. Anat. comp., t. II, p. 9-10.
,ïf(4) Crull. Mém. cit., p. 62-63.
(5) Id. Ibid., p. 86-88, etc.
(6) J. F. Blumenbach. Décades, n°* vi, vu, vin, xvii, xviu, xix, xxyii-.xf,J|æ|fr
(7) J. Cloquet. Anatomie de l'homme ou description et figures lithographiées de toutes les parties du corps humain. T. I, pl. XXVIII-
XXX. Paris, 1821 in-I°. — Quoy et Gaimard. Voy. autour du monde... sur les corvettes l’Uranie et la Physicienne. Zoologie , p. 1, et
pl. I et II, 1824, in-4, in-f°. — A. Desmoulins. Histoire naturelle des races humaines du nord-est de l’Europe, de l’Asie Boréale et
Orientale et de l’Afrique Australe. Paris, 1826, in-8, ch. iv, p. 295 et suiv. Lesson et Garnot. Voy. autour du monde... sur la corvette
la Coquille. Zoologie, t. I, p. 114, etc., etpl. I. Paris, 1826, in-4°et in-f°. — Mémoire sur les Papouas ou Papous (Ann. Sc. Nat., t. X,