d’Engis, dont il serait une copie féminine un peu réduite (1). Le tableau que nous reproduisons ci-dessous
tel que l’a publié le savant anatomiste d’Édimbourg, montre jusqu a quel point se ressemblent les
deux pièces qu’il a mises en présence (2).
L’auteur de ce rapprochement insiste d’ailleurs sur les belles proportions de la tête et. sur. l’absence
de toute trace de dégradation dans ses caractères. Il termine en signalant sur le crâne de Saint-Acheul
une anomalie d’ossification du lambda de même ordre que celles dont nous avons plus haut constaté la
très-grande fréquence dans la race de Cro-Magnon. Il s’agit, en effet, d’un os triangulaire dont M. Turner
n’indique pas les dimensions, mais auquel il donne le nom d'èpaetal, nom qui s’applique, comme on
sait, à une pièce osseuse correspondant plus ou moins exactement à la moitié supérieure de l’écaille occipitale
i x ;
M. Schaaffhausen a cité en 186.5. un autre crâne trouvé à Nieder-Ingolheim,-avec des débris néolithiques,
et qui rappelle, comme le précédent, celui d’Engis (3). •
Le parallèle établi par MM. Turner et Schaaffhausen entre les crânes de Saint-Acheul ou de Nieder-
Ingolheim et celui de la caverne d’Engis, est demeuré isolé jusqu’au jour où la découverte de Cro-
Magnon est venue permettre d’assigner aux pièces anatomiques trouvées par Schmerling leur véritable
signification anthropologique. Dans le courant des discussions qui ont suivi les communications de
M. L. Lartet à la Sorbonne et à la Société d’Anthropologie de Paris, plusieurs documents nouveaux ont
été produits par MM. Broca, Prüner-Bey et par nous-mêmes, documents bien insuffisants encore, -et
auxquels nous n’en avons malheureusement qu’un bien petit nombre d’autres à ajouter aujourd’hui, f
Par exemple, il‘nous est réoemment tombé entre les mains des crânes trouvés à Boulogne-sur-Mer par1
Bouchard-Chantereaux et M. Alph. Lefebvre qui les ont envoyés au' Muséum d’Histoire Naturelle de
Paris. Plusieurs de cès crânes découverts dans les fouilles du bassin à flot à' une profondeur de 8 mètres
et plus, nous semblent dériver de la souche quaternaire qui vient d’être étudiée. Il n’est pas sans intérêt
de remarquer que la mâchoire de Châtillon, supposée quaternaire et tout au moins fort ancienne ‘
recueillie par Dutertre-Delporte dans des tufs situés à quelques centaines de mètres du bassin sus-mentionné,
reproduit assez fidèlement les formes mandibulaires de la race de Cro-Magnon (4) : menton triangulaire
et saillant, angle inférieur arrondi, branche montante-très-large (transv. 0m,040), etc. A Paris !
les fouilles de l’Hôtel-Dieu, du boulevard de Port-Royal, etc., ont fourni des: crânes du même type,
dont le plus remarquable paraît avoir été inhumé au v° siècle dans la collégiale de Saint-Marcel.
Une autre pièce dont la description produite devant la Société d’Anthropologie a malheureusement été
écourtée au point de devenir inintelligible (.5), montre la race de Cro-Magnon se maintenant encore assez
pure dans l’Isère vers les temps néolithiques. En effet, le crâne de Béthenas, que MM. P. Gervais et
(1) Voyez plus haut, p. 72.
(2) I Longitud. Fr. breadth. Par.' breadth. Occ. breadth. Longit. arc. Interm. arc.
En gis; J 1.1’.;. ‘V . HH j: y>7 -- 4,4 ■ i 4‘,4 13,75 13
Saint-Acheul H . y.: . . .. 7,1 4,1 •5,1. 4,1 12,2 ; 1 1 ,'8 :
Si l’on réduit eu mesures françaises le s pouces et dixièmes de pouce du tableau ci-dessus, on remarquera que'lés1- dimensions
attribuées au crâne d’Engis, sont différentes de celles que nous avons assignées plus haut à cette pièce. Ces. différences résultent de
ce que M. Turner, comme M. Huxley et tant d’autres, a mesuré un moulageou un surmoulage delà pièce, tandis que l’un de nous
est allé étudier directement à Liège l’original.
• (3) Schaaffhausen. Description du crâne d’un ancien Germain (Bull. Soc. d’Anthrop. de Paris, t. VI, p. 50, 1865).— Ce crâne mesure
0“, 185 de diamètre antcrq-postérieur, 0m,135 de diamètre transverse maximum, son indice est par conséquent de 73,04.
« 11 ressemble au crâne d’Èngis... néanmoins ce dernier possède un front mieux conformé; son écaille occipitale est plus saillante
et plus pointue par en haut; enfin son sommet est moins élevé en ogive... Dans ces deux crânes, la saillie des bosses pariétales
donne une forme pentagonale... » (P. 52.)
(4) E.-T. Hamy. Précis de Paléontologie humaine, p. 277 et 285.
(5) Bull. Soc. d’Anthrop. de Paris, 2® s., t. III, p. 599.1868.
E. Chantre (1)ont figuré dans leurs atlas, reproduit un assez grand nombre de caractères relevés sur les
têtes.qui viennent de passer sous nos yeux. La remarquable collection
de crânes néolithiques que M. J. de Baye a recueillie dans les grottes
Courjonnet, Coizard, etc., contient quelques types du mémo genre.
Le crâne de Béthenas et celui de Nieder-Ingolheim marqueraient à
peu près la limite nord-orientale provisoirement assignable à l’extension
F'g- 87. — Crâne, n® 4 du tumulus de Gen-
tèud, près Genève, premier âge du fer. (Vw
.de profil, V* gr, nat. Mus. Hist. Mat, Coll,
Prüner-Bey. — Voir plus haut, fig. 29.) ’
de notre seconde race. Désireux de n’articuler que des faits qui
nqus semblent bien établis,' nous nous abstenons d’interpréter dans
notre sens certaines observations recueillies en Suisse, dans le nord
de l’Italie'et dans l’Allemagne du Sud, observations qui seraient de
nature à élargir assez considérablement vers l’est le domaine primitif
de la race de Cro-Magnon. Il nous paraît que cette race aurait des
représentants dans les parties méridionales du Jura français, mais
nous avouons que nos, idées sur ce sujet ne reposent que sur l’étude
des caractères extérieurs de quelques sujets de ces montagnes. ;
S'étendant au nord jusqu’en Picardie et jusqu’à la province de
Liège (2), à l’est jusqu’aux bords du Rhin,, en Franche-Comté, en ;
Dauphiné et dans le royaume de Naples, la race de Cro-Magnon n’a
jamais dû être fort dense, dans cette vaste étendue de terres; elle y
a, du moins, laissé assez peu de traces de son existence,, à en juger
par les collections importantes qui dans nos musées parisiens repré- j
sentent les terres-européennes enfermées au sud du demi-cercle
géographique que nous venons de tracer. M. Prüner-Bey n’avait pu
tout d’abord trouver parmi de nombreuses pièces anciennes provenant
de l’Europe occidentale qu’un seul maxillaire inférieur comparable
a celui du vieillard de Cro-Magnon, et ce maxillaire, remarquable
surtout par la largeur de sa branche montante, qui atteint
le chiffre extraordinaire de 0m,057 (3), était par malheur celui du
crâne n° 4 du tumulus de Gentoud dont il avait tout d’abord fait
son type celtique et qui appartient incontestablement à la race de
Cro-Magnon ;(fig. 29 et 87).
Depuis lors la découverte de l’antique charnier de Solutré a permis
Fig. 88 et 89. — Crânes de la caverne de l’Homme-
Mort, n®* 1 et 9. (*/* gr. nat. École pratique
des Hautes-Etudes.)
à M. Prüner-Bey d’élargir le cercle de ses recherches. Nous avons dit qu’un certain nombre des
| (l>) P. Gervais. L’Ancienneté de l’homme et la période quaternaire. Paris, 1867, in.r4°, p;; 414. et pl. XX.— E Chantre Éludes aléo
Ulmolofiques oit Recherches gMogieo-archùologiquçs sur l'imlmlne et les, moeurs de. l'homme des temps anlôhisloriqucs dans le m r i dw
Dauphiné el les environs de Lyon. Lyon, 1867, in-4°, p. 36 et pl. II.
§ . (2S?Sijle type Dalécarlien déterminé par Gaimard cil 1833 est bien choisi, il y nantit probablement lien de taire rentrer celte popn j
ktion, généralement si différente de celles qui ïentourent, dans lé groupe ethnique que nous nous efforçons de .circonscrire et dont
l’extension septentrionale .serait alors beaucoup plus grande que nous no l’indiquons ci-dessus. Lo Dalécarlien de Gaimard présente
presque tons les caractères crânions et faciaux importants que nous avons relevés sur les crénesj fossiles, qui viennent d'être passés
ejt revue. H est grand (circonf. hork 535) et relativement allongé (d. a. p. 133; d. tr. max. 143, ind. céph. 74,09), sa voûte lé-êrement
surélevée dans son,plan médian est sub-pentagonale,. et la race que surmonte ce crdne franchement dolichocéphale est disharmo-
niquet sa- hauteur étant 93 millimètres, son diamètre bizygomaliquo mesure.135 millimètres, et son indice est par conséquent dé
.68)88. L’indice nasal reste au-dessous de 49, et-l'indice orbitaire dépasse à peine 75. L'un des deux types Dàlécarliens de Hctzius
conservés a l’Institut Carolinien de Stockholm, rappelle celui ,de ; Gaimard, Nous croyons devoir eu rapprocher le chine de femme
trouve dans la célèbre sépulture de l'âge du hronze de Borûm Eshôi à Aarhus (Jutland), que nous, venonsd'étudier au Musée des
Antiquités du Nord, à Copenhague. .• .
(3) Prüner-Bey. -Sur les ossements humaitis des Eyzies. (Bull, Soc. d’Anthrop. •clè Paris,-2e s., t. Efl, p. 417. 1868