jeau, par M. Piette (1), donnent, quoique généralement réduits en fragments de petit volume, des résultats
plus précis que ceux qui viennent d’être relevés.
Une description détaillée de chacune des nombreuses pièces découvertes par ce naturaliste distingué
nous entraînerait beaucoup trop loin sans grand profit pour nos études (2). Mais la belle collection qu’il
a réunie, contient quelques morceaux vraiment intéressants, parmi lesquels un frontal et quatre maxillaires
supérieurs et inférieurs méritent de fixer quelques instants l’attention de l’anatomiste. En effet, le frontal
(n° 9 du catalogue de M. Piette), quoique réduit à la région interorbitaire solidement unie aux os
propres du nez fracturés vers leur milieu, et à une partie de l’écaille comprenant la bosse frontale latérale
gauche, présente encore une telle ressemblance avec ceux de la Madelaine et de Laugerie-Basse
n° 4 précédemment étudiés, qu’aucune hésitation n’est possible à propos de sa détermination ethnique.
D’une épaisseur moyenne de 6“, 006 à 0m, 007, d’une structure assez rude, il est criblé comme celui de
la Madelaine dans ses bosses surcilières d’un grand nombre de trous vasculaires relativement, larges et
porte la courte dentelle sous-glabellaire dont il a été parlé plus haut. Les arcs surciliers, forts et bien
dessinés, décrivent de chaque côté une courbe semblable à celle des os ci-dessus représentés. Le front
est séparé des sourcils par une légère dépression, de forme identique à celle des frontaux déjà décrits,
et monte en s’inclinant jusqu’aux bosses frontales suivant une courbe qui nous est connue. Le diamètre
interorbitaire est relativement étroit (0m, 025 à 0m, 026), et les os du nez, minces et saillants, mesurent
seulement 0“, 009 à leur racine.
Tout cela rappelle, on le voit, les traits de la race de la Vézère; nous allons retrouver plusieurs autres
caractères assignés précédemment à cette race sur les maxillaires supérieurs. Ainsi la pièce n°* 8 et 8a
formée de la plus grande partie des deux maxillaires supérieurs d’un sujet qui n’a pas tout à fait atteint
l’âge adulte, nous montre réunies toutes les caractéristiques de cet os dans notre seconde race quaternaire
: le peu de hauteur de l’intermaxillaire (0m,016), un prognathisme alvéolaire léger, les dimensions
relatives des dents, la brièveté de leurs racines, l’usure de leurs couronnes très-accusée déjà sur les incisives
en particulier et sur les canines, quoique les dents de sagesse aient à peine commencé leur éruption,
les dimensions relatives de la voûte palatine et surtout son peu de profondeur et la saillie médiane
dont nous avons longuement parlé en décrivant notre n° 1 de Cro-Magnon.
Les deux fragments de voûte palatine n° 9, beaucoup plus réduits, ne présentent, à considérer Comme
caractères ethniques, le premier que son prognathisme alvéolaire assez peu accusé d’ailleurs, le second
que la rigole assez profonde qui longe sa rangée dentaire et dont le bord interne se relève de manière à
rappeler la disposition que montre notre planche Y. Ils ont en commun l’usure des dents portée aussi loin
que possible, les fûts des molaires sont réduits à 0“, 006 de hauteur sur l’une et sur l’autre à 0m, 005.
La mandibule composée seulement de la moitié gauche de sa branche horizontale porte une dent, la
seconde prémolaire, obliquement usée en bas et en dehors, et réduite à 0“, 005 seulement de hauteur
au-dessus de son collet. Elle se termine par un menton triangulaire et pointu, comme nous en avons rencontré
plusieurs dans le cours du présent chapitre. Les apophyses géni, sans être très-robustes, sont
bien dessinées; la ligne myloïdienne est robuste. Les dimensions en hauteur se chiffrent par 0m,031 à
la symphyse, 0", 027 à la deuxième molaire; en épaisseur elle atteint au premier point 0“, 015 et près
de 0m,013 au second.
Maxillaire inférieur d’Aurensan. — Ce n’est qu’avec la plus grande réserve que nous inscrivons le
(1) Piette. Découverte d'une caverneaux environs de Montréjeàu. (Gompt.Rend. Acad. Sc., t. LXXIII,p. 350. 1871. —Bull. Soc. d'An-
throp. de Paris, 2« série, t. VI, p. 247, 1871, t. VIII, p. 3.84, 1873.)
(2) Remarquons en passant que, depuis l’impression des pages de notre livre consacrées à notre première race quaternaire,
M. Piette a trouvé dans la couche profonde de la grotte de Gourdan, deux maxillaires supérieurs presque entiers, et la branche
horizontale d’une mandibule dont tous les traits se rapportent à notre description de la race de Canstadt. Les ossements décrits
ci-dessus et que nous rapportons à la race de Cro-Magnon, sont enfouis dans des couches plus récentes de' la môme grotte.
nom d’Aurensan à côté de celui de Montréjeàu, dans la nomenclature des stations quaternaires occupées
par la race de Cro-Magnon. MM. Frossard n’ont, paraît-il, recueilli dans cette intéressante station qu’un
seul fragment de la tête susceptible d’être étudié. Et cet os, un maxillaire inférieur, ayant appartenu
vraisemblablement à un individu adulte du sexe masculin, est si malheureusement brisé, qu’il est fort
difficile, pour ne pas dire impossible, de lui assigner une place quelque peu sûre dans un des groupes
humains paléolithiques. L’usure tournante des trois molaires qu’il porte, le volume relatif de ces dents,
l’épaisseur du bourrelet prémassétérien, la direction du bord antérieur de la branche montante tout
entier conservé, tout cela peut porter à rapprocher ce fragment de mandibule de ceux que nous avons
déterminés plus haut; mais il est interdit d’aller plus loin dans un diagnostic qui ne repose que sur
l’examen d’une pièce aqssi incomplète que celle qui est en ce moment sous nos yeux. Notons en passant
qu’une des dents d’Aürensan est profondément cariée (1).
Crâne de Menton, n° 1. — L’un des auteurs de cet ouvrage, en appréciant la valeur de la découverte
qui a valu aux galeries du Muséum le curieux fossile de Menton, avait appelé l’attention d’une manière
générale sur les affinités qu’il présente avec le squelette du vieillard de Cro-Magnon (2). Ces affinités sont
très-étroites, et il ne semble pas que M. Rivière les ait fait suffisamment ressortir dans la description
qu’il a publiée (3). Il est vrai qu’un certain nombre de ces traits de ressemblance ne peuvent pas être rigoureusement
précisés. Outre que le crâne est encroûté en partie et couvert des coquilles et des dents
perforées, qui faisaient l’ornèmentation du défunt, l’écrasement qu’il a subi en projetant en arrière une
partie de l’occipital brisé à 0“, 02 au-dessus du lambda, a horizontalement éclaté le frontal vers son
diamètre minimum, et la face séparée de la voûte par une fente d’un demi-centimètre au moins est latéralement
renversée. Malgré ces dégâts, on peut constater que la voûte crânienne est un peu plus dolichocéphale
que celles dont nous avons parlé jusqu’ici, le diamètre transverse demeurant égal à 0“, 140, tandis
que le diamètre antéro-postérieur se développe un peu plus en longueur; la région pariétale restant la
même, la région frontale le cède un peu en largeur à celle des crânes de la Yézère (0m, 93). Les bosses
frontales ne sont guères distinctes, les bosses pariétales, tout effacées qu’elles soient, se montrent fort loin
en arrière, comme sur les pièces plus haut décrites. A la région occipitale, au-dessous de lignes demi-circulaires
supérieures bien dessinées, le plan cérébelleux se porte directement en avant, comme on le voit
sur notre planche III. Enfin les sutures effacées en avant réapparaissent graduellement en arrière. Toute-
cette morphologie crânienne concorde donc avec celle de la race de la Yézère. Nous ne voyons à signaler
que des différences minimes : une courbe temporale plus arrondie, l’apophyse mastoïde plus courte, efc.
Il en est de même pour la face très-large que surmonte ce crâne allongé. Ses os sont développés latéralement
dans les régions faciale, supérieure et moyenne, de façon, cependant, que le centre de la figure
prenne peu de part à cette dilatation. Ainsi l’espace interorbitaire est étroit (0°, 026) et le nez mince (larg.
max. de l’ouverture 0m, 026) en même temps qu’allongé (0“, 052), tandis que les diamètres biorbitaires
externe et interne, sont représentés approximativement par 108 et 100, et que les orbites, reproduisant
la curieuse forme des mêmes cavités dans notre vieillard de Cro-Magnon, atteignent 0“, 043 en largeur, et
se restreignent à 0m, 028 de hauteur, ce qui leur assigne un indice de 65,11. La pommette est encore saillante,
mais au-dessous la face s’étrangle, et de 0“, 108 (bimal. inférieur) sa largeur se réduit à 0", 066
(bimaxill. minimum). La hauteur de la pommette est un peu plus grande que nous l’avons vue plus haut
(1) E. et Ch. Frossard. Note sur une grotte renfermant des restes humains de l'époque paléolithique, découverte à Bagnères-de-Bigorre,
Bagnères, 1870, in-8°, p. 11.
. (2) E.-T. Hamy. Observations à propos du squelette humain fossile des cavernes de Baoussé-Roussé, dites grottes de Menton. (Bull. Soc.
d'Anthrop. de Paris, 2° série, t. VII, p. 589-593,1872.)
(3)E. R ivière. Sur l'homme fossile des c&vernes de Baoussé-Roussé (Italie), dites grottes de Menton. (Gompt.Rend. Acad. Sc., t. LXXIV,
p. 1597. — Découverte d'un squelette humain de l'époque paléolithique dans les cavernes de Baoussé-Roussé, dites grottes de Menton,
br. in 4°. Paris, J.-B. Baillière, 1873, p. 26 et süiv. \