Crânes de Papouas Polynésiens. — On rencontre encore quelquefois des Papouas au delà du groupe
oriental dés Viti, mais ces noirs ne se montrent plus qu’à l’état sporadique.
Les relations fréquentes et déjà anciennes des Tongans avec les Vitiens et le rôle joué par ce peuple
dans les migrations polynésiennes suffiraient à expliquer, dans une certaine mesure, cette dissémination
de l’élément mélanésien à travers les îles du Pacifique, où nous.le rencontrons extrêmement clair-semé,
mais encore reconnaissable, dans quelques îles, comme Tikienitri (1), Niue, Penrhyn, Rarotonga (2),
Vahiou, enfin, ou l’île de Pâques, la plus reculée dans l’est des terres habitées par les Kanakes.
Le peu de crânes tongas que nous avons pu étudier ne nous a rien appris de la présence de Papouas
dans cet archipel, où cependant on a quelquefois signalé des métis viti-tongas. Nous n’avons rien trouvé
qui se rapportât aux Mélanésiens dans les petites séries de crânes des îles Samoa, Ouvéa, que nous devons
à Dumoutier et à M. Marzioux. L’examen des collections des Marquises, formées par MM. Le Bastard, Bour-
garel, Schneider, Serre ne nous a rien fait découvrir. Taïti, où il semble que l’élément noir avait encore au
temps de Cook quelques représentants (3), n’a montré dans les nombreux sujets que nous en avons étudiés
aucune trace de sang mélanésien. Il en est de même pour Moorea, dont M. Pinart nous a procuré vingt et
un crânes. Les îles Basses, dont la population est donnée comme plus foncée que celle des îles occidentales,
n’ont pourtant pas subi, du moins à notre connaissance, l’influence papoua d’une manière bien manifeste.
Du moins les. 53 crânes de Mangarewa, Anaa, Raioha, Kaoukoura, Makatea, que le Muséum de Paris doit à
Dumoutier, à MM. Bouvier, Carey et Pinart, ne présentent-ils pas de trace bien apparente de mélanisme.
Mais ce dernier Voyageur a exhumé, sur l’île de Pâques, de sépultures anciennes qui pourraient bien être
en partie contemporaines des grandes statues qui ont rendu cette petite terre si célèbre, un crâne
qui offre avec celui de la femme Rivoua précédemment décrit (4) une ressemblance bien inattendue. La
face est presque exactement la même, et le crâne ne diffère que par l’accentuation des proportions si
souvent déteminéesjdans les paragraphes qui précèdent (5), (d. a.-p.,Om, 190; d. tr ., 0“, 4 28; d. bas.-bregm.,
0m,136; ind. 66,36; 71,57; 106,25). Deux ou trois crânes plus modernes de la même île offrent passablement
d’analogies avec celui dont il vient d’être parlé.
M. Ballieu, formant aux îles Hawaii, pour le Muséum, l’intéressante collection crânologique aujourd’hui
déposée dans cet établissement, s’est aussi procuré à Oahou un crâne presque tout semblable à ceux
des Mélanésiens noirs (6). 11 est probable que, si l’on poussait plus loin que nous ne pouvons ici le
d. tr. 0m,128 ; d. bas.-bregm. 0m,141) et relatives (ind. 66,32, 73,05 et HO,15) sont exactement papouas. On peut voir au Muséum de
Paris un autre crâne' un peu moins accentué (d. a.-p. 0m,188, d. tr. 0m,129; d. bas.-bregm. 0m,136 ; ind. 68,61 ; 72,34 et 105,42) qui
vient de M. de Rochas et dont il est question dans les Bulletins de la Société d'anthropologie de
Paris pour 1860 (T. I, p. 391 et 400). Nous mentionnerons enfin la pièce du Collège Royal des chirurgiens
de Londres, n° 5388, figurée par Martin [op. cit., fig. 228, p. 310), dont nous reproduisons
ci-contre la gravure (fig. 270) et qui a appartenu à un Vitien, mort à l’hôpital de Hobart-Town.
Cette tête présente un certain nombre de caractères qui l’éloignent considérablement des Mélanésiens
purs, sa capacité étant de 1425e®, et sa circonférence de 0m,503, ses diamètres mesurent
d’avant en arrière 0“ ,179, transversalement 0m,140, verticalement 0m,139, et les indices correspondants
égalent 78,21; 77,65 ; 99,28. Les orbites circulaires ont 0m,038 en tous sens, mais la
hauteur du nez étant 0m,054, sa largeur monte à 0m,029, et l’indice nasal s’élève à 53,70. La face
entière est sur un même plan obliquement dirigé en avant et en bas, du front à la pointe du
menton, et le maxillaire inférieur présente au plus haut degré la courbure en quart de cercle
que plusieurs anatomistes, Rérard en particulier, ont considérée comme caractéristique chez les
Polynésiens.
(1) H amilto.n Smith. Op. cit., pl. XIX.
Fig. 270. — Vitien mort à Hobart-
Town [Mus. Coll. Roy. des Chir.
d’Angl.i n° 5388). * ;.
(2) W . L. R anken. The South Sea Islande [The Journ. of the Anthrop. Instit. Vol. VI, p. 223, 1877).
(3) J. Cook. Ed. cit., t. 1, p. 259, pl. 12.
(4) Voy. plus haut, p. 290.
(5) Un seul trait différentiel offre un réel intérêt, c’est le raccourcissement considérable de la sagittale qui descend à 0m,107.
(6) Nous devons aussi à ce laborieux correspondantdes photographiés qui prouvent jusqu’à l’évidence lapermanence du type papoua
plus ôu moins altéré dans l’archipel Hawaiien.
faire, les. recherches sur le métissage du Polynésien par le Noir dans les îles du Pacifique, on multiplierait
considérablement les observations^comparables à celles.que nous venons de résumer.
Crânes de P a po u a s * N-éo-Zélandais (pl. XXV, fig'., 1 et 2,
et dans le texte, fig. 272 à 276).— L’existence d’un élément;
nigritique à la Nouvelle-Zélande avait été constatée des le
dernier1 siècle. L’historiographe de la malheureuse expédition
de Marion, Crozetp), distinguait, avec beaucoup de
netteté, en 1 772 ,rlesj « Nègres & têtes cotonnées » du rèste
de la population de la baie des lies' composée de ce qu’il
appelait lé|ess vrais indigènes... d’un blanc tirant sur-légl
jaune ii iet d’individus « basanés*?) qui lui paraissaient résulter
de l’alliance de ces deux types:(2). La plupart dès vo^WI
géursiont confirmé, dans-ce ■ qu’ils avaient d'gsentiélgles
dire» de Crozet, en atténuant ce qu’il pouvait y avoir d®xâ-.‘
géré dans sa manière de voir. L’interprétation des faits
constatés est d’ailleurseistrêmement variée ehez eux SB, mâisv
les considérations auxquelles ils se livrent, d’ailleurs fort intéressantes
, ne, sont presque jamais d | | ’ordre anatomique.
. 271. —Portrait de Te Kewiti, chef Maori noir
d’après Hamilton Smith (pl. XX).
Dieffenbach décrit cependant de la manière suivante un crâne masculin qu’il s’était procuré d une
tribu de l'intérieur de Roturua, et qui présente la plupart des traits; qui caractérisent la tête papôpa.
4t{ (l i e s sbjfS.!..;frontaux6j,ont très-développés, le crâne est allongé,: le front
quelque;peu fuyant ; le squelette nasal est très-déprimé et les os propres du nez
g®nt beaucoup plus inemyés q ue/cbeiî’Européen ; le maxillaire supérieur sé
.projette fort en avant,, spécialement dans sa portion incisive j l l | | s de la tê t|f |
sont épais et lourds en comparaison d ê ;é® d’un Européen, etc. (4); fs.
Le crâne que,, nous avons représenté (pl. XXV, fig. 1 et 2 et ci-contre
fig. 272), et que Ar,nqux offrit en 1847 au Minium de Paris, comme un bon
type de la race noire de la Nouyelle-Zélande (5), répond très-exé4|èment S la.
description que l’on vient de lire. Il a du PapoualjËplupart des ca|fittêres' crâ- ;;
nions et. faciaux. Ses diamètres sont : 0",198, 0m,136 et (V, 144; scs indices
atteignent par conséquent 68, 68; 72, 72 et 105,92. Les circonférences égalent.
l’horizontale 0m,548, l’antéro-postérieure 0m,553; la transverse, 0m,452. La
hauteur de la face est de 0“,091, le diamètre bizygomatique a 0",J39. La,,
■largeur niaxima du nez atteint 0,028, sa hauteur reste â.0”,049, SSidice. nasal égale 5,7, 16, etc.
,'1(1 ) Nouveau Voyage à la mer du Sud, commencé sous les ordres de M. Marion, et achevé, après la mort de cet officier, sous, ceux de M. le
ChtT Duclesmeur, relation rédigée d’après les plans et les journaux de M. Crozet. Paris, 1783, in-8°, P- 51. -
(2) Md., p. 139. . JTT ‘ TT
• (3)-J.-L. N icholas. Narrative of a voyage to the Neio-Zealand. London, 1817, in-S°,voli. II, p. 262-267. — Dumont d Urviixe. Voyage
de l’Astrolabe. Hist. T. II, p. 387. Paris, 1830, in-8”. — E arle. A Narrative of a nine month's Residence in Nm-Zealand. London, 1832,
in-8”, p. 122. - J .-S . P olack. Manners and Customs ofthe New Zealanders, 1840, 2 vol,in-8”. — D ieffenuacii. Travels m New Zealand.
London, 1843, in-8°, vol. II, p. 7. — Hursthouse. New-Zealand or the Britain of the Spulh. London, 1857, in-8°, vol. 1, ch. | | i . —
F. von H ochstetter. Hew Zealand, its physical Geography, Geology and Natural History., trad, angl.— Shortlano. Short Sketch of the,
MaoriRaces [Transact, and Proceed. oftheNew Zealand Institute. 1868, vol. I,Wellington, 1869, in-8°—W. Colenso. On the Maori Races of
New Zealand [ibid.), — etc, -
(4) DlEPFENBACH. Op. cit., vol. II, p. 7. _ . :3 :;i:n 11-CLèt.'l} c' ..
(5) Arnoux rapportait en même temps un crâne maori pur. Cet excellent observateur avait choisi avec beaucoup de tact ces pièces,
parfaitement caractéristiques des deux races dont il constatait la coexistence.