débris osseux de cette nécropole n’ont pas de date précise, mais remontent cependant à des époques
relativement anciennes. A côté de crânes analogues à ceux de Furfooz dont nous parlerons plus tard, il
s’en trouvé d’autres qui ressemblent à ceux de Cro-Magnon, sans cependant offrir une identité parfaite,
et qui, s’ils n’ajoutent rien à la démonstration de l’existence de cette race en Mâconnais aux temps préhistoriques,
attestent du moins qu’elle a persisté dans les lieux où elle avait primitivement fleuri.
Qu’est devenue cette race au milieu des "envahissements qui ont marqué les temps préhistoriques
postérieurs à la période quaternaire? M. Piette, qui a fouillé avec soin le grand cimetière gaulois de
Chassemy (Aisne), paraît disposé à croire, d’après une observation remarquable qu’il a pu faire dans cette
localité, que les anciens troglodytes quelque bien doués au point de vue de la conformation cérébrale
que nous les aient montrés les recherches dans les cavernes du midi de la France, auraient, en descendant
dans la couche inférieure de la société, laissé la place aux races nouvelles plus énergiques qui leur
succédaient (1). Quoi qu’il en soit, l’âge de la pierre polie a encore connu quelques-unes de leurs tribus
dans un état relativement prospère. La caverne d’Hamoir, à quelques lieues d’Engis et d’Eugihoul, et qui
d’après les renseignements qui nous ont été fournis, se rattacherait à cette époque, renfermait des squelettes
du type des troglodytes de ces stations. L’un de nous en a vu les débris au Musée de Liège. Certains
crânes néolithiques que l’on trouve dans les tourbières, et dans quelques dolmens, comme celui des
Vignettes à Léry (Eure), fouillé par M. le baron Pichon, ont une conformation anatomique analogue. A Grenelle,
plusieurs crânes humains des alluvions supérieures retiennent une partie des caractères des fossiles
T a b l e a u IX
C r â n e s d e G r e n e lle , 2° s é r ie .
(i) « Sur plus de quarante squelettes complets, dit M. Piette, que je soumis au docteur Prüner-Bey, un seul présenta des détails
de conformation rappelant de près celui de Cro-Magnon, et ce squelette était celui d’un pauvre ou d’une sorte de sauvage enterré
comme un chien, dans une fosse trop courte, les genoux à demi repliés, les pieds écartés, la bouche béante, circonstances tout à fait
exceptionnelles dans un cimetière gaulois. A peine le cadavre avait-il été recouvert d’une couche de terre de quelques centimètres;
aucun ornement, aucune urne, aucun vase n’avait été déposé près de lui. » M. Piette ajoute que ce squelette ne pouvait pas appartenir
à une époque plus ancienne, parce que « sous sa sépulture était celle d’un Gaulois de l’âge du fer, portant un torque de
bronze. » Ed. Piette. Sur la grotte de Gourdan, etc. (Bull. Soc. d’Anthrop. de Paris, 2e série, t. VIL1, p. 401. 1873.)
DEUXIÈME RACE HUMAINE FOSSILE OU RACE DE CRO-MAGNON.
que nous avons décrits. Sur dix crânes recueillis par M. Émile Martin dans les dépôts de transition des
carrières Hélie et Coulon, rue Saint-Charles, à Grenelle, quatre appartiennent à la race de la Vézère, trois
sont des crânes d’hommes et rappellent plus- ou moins ceux dont on a pu lire la description ci-dessus,
le quatrième, un crâne féminin (carr. Hélie, n° 2), a des analogies frappantes avec celui de Laugerie-
Basse (tabl. VII). Nous donnons ici le tableau des mensurations auxquelles se prêtent ces quatre pièces
(tabl. IX). ;r i
Mais c’est surtout dans la caverne de l’Homme-Mort, à Saint-Pierre des Tripiés (Lozère), que l’on
a pu se convaincre de la permanence du type de Cro-Magnon. Dans un mémoire fort développé, récemment
inséré dans la Revue dAnthropologie (1), M. P. Broca montre que les crânes des dix-neuf
troglodytes de cette caverne de l’Homme-Mort ont beaucoup de caractères communs avec ceux de Cro-
Magnon et de Grenelle. Il insiste spécialement sur leur grande capacité, leur dolichocéphalie inaccoutumée,
Norma verticalis comparée des crânes de Sorde, de l’Homme-Mort, de Grenelle et de Gentoud (V* grand, nat.).
le grand développement de leur région occipitale, etc., etc. L’examen de cette remarquable série nous a
suggéré l’idée que ces troglodytes, que leurs moeurs et leurs usages, aussi bien que leurs traits, rapprochent
tant de ceux de la Vézère, doivent en partie au croisement avec l’une des races nouvelles, que la
période néolithique voit surgir, les modifications morphologiques que M. Broca met en relief à côté des
analogies si considérables qu’il signale entre eux et leurs ancêtres des abris sous roche de la Vézère, ou
(i) P. Broca. Sur les crânes de la caverne de l'Homme-Mort (Lozère). (Revue d'Anthropologie, t. Il, p. 1-53. 1873.)