C’est le même type que présente encore le crâne de l’île Muju ou de Woodlark (fig. 249), offert en 1849
par M. Marzioux, directeur de la Société Océanienne, au Muséum d’histoire naturelle de Paris. Ce crâne, qui
est celui d’une femme adulte, offre tant d’analogies avec celui de la femme Papoua de l’île Toud, dont
il a été question précédemment, que nous h’avons point hésité à insérer à la quatrième colonne de notre
tableau XXV une moyenne des mensurations de ces deux pièces. Muju, situé au nord des îles de la
Louisiade, renferme, outre les Papouas, à la race desquels appartient la tête
dont nous parlons, d’autres insulaires d’un type physique assez différent. A en
juger par ce que dit M. Salerio de la population de l’île, elle doit être, vue d’ensemble,
fort analogue à celle de l’extrémité sud-est de la Nouvelle-Guinée (1).'
A Rook aussi, et dans quelques autres îles des mêmes parages, on retrouve ce
peuple mixte, mais les renseignements anatomiques font défaut, et son étude
restera longtemps encore imparfaite (2)1 ■ > ;
Cr â n e s d e P a po u a s d ü golfe d e l ’A s t r o l a b e . — La description publiée par
M. Virchow en 1873 de deux crânes Papouas rapportés du golfe de l’Astrolabe
par la corvette russe Vitias, porterait à croire que les mélanges ethniques dont
nous venons de parler se poursuivent jusqu’en ce point de la côte Nord-Est. La
première de ces pièces, avec soh allongement et son étroitesse (d. a.-p. 0m,183,
d. tr. 0“,133, ind. céph. 72,78), le développement de ses insertions muscu-
laires^la forme subtriangulaire de sa moitié postérieure, son prognathisme
fort accusé, etc., parait bien exagérer les caractères Papouas, quoiqu'elle ■ ne soit pas absolument hy-
psisténocéphale, en donnant à ce mot l’acception précise que nous avons proposé de lui attribuer, puisque
la hauteur (0m,1325) n’est pas tout à fait égale à la largeur.
Le deuxième crâne est tout à la fois moins long, plus large et de moindre hauteur. Il est aussi moins
prognathe, et,ses molaires vont en augmentant de volume d’avant en arrière. Son indice céphalique
monte à 78,8, l’indice de hauteur-largeur égale 78,2, etc. M. Virchow se montre tres-frappe de ces
différences et semble assez peu disposé à admettre qu’il n’y ait de l’une à l’autre de ces têtes que des.
différences individuelles (3). Il lui paraît difficile, au contraire, d’admettre la pureté de la race, et le texte
consacré par M. Miklucho-Maclay aux crânes Papouas des mêmes parages ne contredit point cette
manière de voir. Tout en donnant une description générale qui s’appliquerait bien plutôt à des têtes de
Papouas purs, l’explorateur russe leur attribue un indice moyen de 77 et un indice de hauteur de 72,
qui sont fort en dehors des rapports observés chez les Néo-Guinéens purs (4).
A u t r e s c r â n e s P a po u a s d e l a N o u v e l le -G u in é e ou d e s e s d é p e n d a n c e s . ® Les détails abondants dans
lesquels nous venons d’entrer à propos d’une trentaine de tribus néo-guinéennes dont des pièces de provenance
certaine ont pu être étudiées dans les pages qui précèdent, nous dispenseront d examiner
longuement les documents isolés, d’origine vague et insuffisamment déterminée, qu’on rencontre dans
certaines collections.
La plus anciennement connue de ces diverses pièces est celle du Musée Senckenberg, brièvement
décrite et figurée de profil par M. Lucæen 1844 (5). C’est la tête d’un homme de vingt ans, soldat au
(1) C. Salerio. TJeber die Inselnim Osten von Neu-Guinea (Petermann's Mittheilungen, Bd. VIII, s. 341-344, 4862).
(2) Entre autres renseignements ethniques fournis par M. Salerio, nous mentionnerons la couleur de la peau qui, dit ce missionnaire,
« va du jaune pâle au bran châtain» (G. Salerio, Op. cit.). — Gf. Villibn, Ambrosoli et Mazzuconi, Sur l île de Rook
(Ann. Propag. delà foi, 4850, p. 405; 1855, p.' 363-371) et E.-T. Haut, Notes sur les Papouas Massims (loc. cit.).
(3) R. Virchow. TJeber Schàdel von Neu-Guinea ( Verhandl. der Berliner Gesellsch. für Anlhrop. Ethnolog. und Urgesch. 1873, s. 175).
(4) Miklucho-Maclay. Anthropologische Bemerkungen ttber die Papuas der Maclay-Küste in Neu-Guinea (Natuurkundig Tijdschrift
voor Nederlandsch Indie. D. XXXIII, z. 239,1873).
(5) J.-G.-G. Logæ. Zur organischen Formmlehre. Frankfurt am Main, 1844, in-4°, S. 46, Taf. XI. — Cf. Id. Zur Morphologie der
Rassen-Schâdel (Abhandl. herausg. von der Senckenb. Naturforsch. Gesellsch. Bd. III, s. 513, 1861).
service de la Hollande, mort au lazaret militaire de Ratavia. Elle présente au plus haut degré les caractères
essentiels à la race. M. Lucæ la dépeint comme ayant un front bas et étroit, des arcs surciliers épais, et
presque réunis sur là ligne médiane, des temporaux fort comprimés et le plan d’insertion des muscles de
même nom presque vertical, une protubérance occipitale externe et des lignes courbes très-accusées, etc.
Vue d’en haut, cette tête est symétrique ; mais un rétrécissement des plus notables s’y manifeste en arrière,
et l’occiput s’y termine en pointe. On remarque à la face des cavités orbitaires très-vastes, des os
propres du nez courts et triangulaires, des malaires gros et larges, une mâchoire supérieure proéminente
et armée d’une forte denture, enfin une mandibule longue et puissante, aux branches montantes
courtes et perpendiculaires.
Les trois crânes de Papouas recueillis par Peitsch et offerts par Siebold à l’Académie des sciences de
Saint-Pétersbourg n’ont pas une origine mieux établie que celle de la tête dont nous venons de parler.
Ces pièces ont appartenu à une fille eneore jeune, à un adulte d’âge moyen, enfin à une vieille femme, tous
de tribus inconnues (1).
Le premier se fait d’abord remarquer par sa petitesse et sa légèreté. Son front est globuleux et sans
arcs surciliers, sa voûte est allongée, à peine comprimée latéralement, et son occipital, saillant en arrière,
ne présente qu’une protubérance peu visible. La face se projette tout entière ; ses malaires proéminent
en avant, sans presque dessiner de reliefs latéraux, et la mâchoire supérieùré fait une telle saillie que les
os du nez, d’ailleurs médiocrement développés, restent sensiblement en arrière d’un plan que l’on mènerait
du fro n t au bord alvéolaire. Les dents, volumineuses, s’inclinent elles-mêmes en avant, et non-seulement
le prognathisme se manifeste sur les incisives, mais les molaires elles-mêmes se montrent quelque peu
obliques. Les os du nez, si peu développés qu’ils soient, forment un angle obtus au niveau de leur articulation
réciproque ; l’ouverture pyriforme est tout à la fois plus large et plus courte qu’à l’ordinaire, les
orbites sont petits et arrondis. Enfin la mandibule, faible et ramassée sur elle-même, se fait remarquer
par un menton en retrait et des branches montantes courtes et inclinées.
Le second et le troisième crânes de la collection russe n’ont point le même intérêt que celui dont nous
venons de résumer la description d’après M. de Raër et dont l’aspect pithécoïde a frappé les nombreux
lecteurs des Crama selecta. Ce qu’en dit l’auteur rentre dans les descriptions qu’on a pu lire ci-dessus et
nous nous abstiendrons d’y insister. Observons seulement qu’entçe ces trois pièces se manifestent de nouveau
les différences, occasionnées par le sexe et par l’âge, que nous avons déjà signalées. L’homme est
franchement dolichocéphale (d. a.-p. 0“, 177, d. tr. max. 0m, 127, ind. céph. 71,75), la femme est a la
limite de la sous-dolichocéphalie (d. a.-p. 0n,,176, d. tr. max. O“, 132, ind. céph. 75,00) et la jeune fille
devient presque mésaticéphale (d. a.-p. 0”, 162, d. tr. max. 0m,125, ind. céph. 77,16). Sur le premier,
la hauteur, un peu trop grande d’ailleurs, puisque le diamètre vertical est un maximum chez M. de Baër,
l’emporte sur la largeur (d. vert. 0m,132) et le crâne est hypsisténocéphale (ind. haut.-long. 74,57 ; ind.
haut.-larg. 103,93). Sur le second etle troisième le rapport eëtinverse (d. vert. 0“, 131 et0,122).
Nous trouvons deux autres Papouas de localités indéterminées dans le catalogue de Van der Hoeven(2)
et dans le premier mémoire de M. C. Swaving sur l’Archipel Indien. Van der Hoeven dit peu de chose de
sa pièce. Il fait seulement remarquer sa longueur (d. a.-p. 0m, 179 ; d. tr. 0m, 129; ind. céph. 72,06),
l’inclinaison de son front, la proéminence de ses arcs surciliers et de sa glabelle, 1 aplatissement de
ses os propres du nez, etc. La circonférence horizontale est de 0“\ 404. Comme sur la plupart dés pièces
précédemment décrites, le développement en hauteur dépasse quelque peu le développement en largeur.
Ce dernier caractère est des plus manifestes sur le crâne néo-guinéen du Musée de Batavia mesuré par
M. Swaving. La différence en faveur du diamètre vertical, qui est un maximum, est de 0,n,015 et 1 indice
(1) G.-E. de B aer. Op. cit.,% 6 -8 ,
(2) J. Van der Hoeven. Op. cit., n° 117, p. 42.