Maritimes), dans un ancien tombeau fouillé par M. Bourguignat en 1866, que la deuxième race de
Furfooz, la race de Presle et d’Orrouy, vient se montrer de nouveau, représentée par un crâne féminin
peu différent de notre crâne (1). Nous la retrouvons ensuite au Cabeço d’Arruda, dans ce curieux dépôt
dont nous nous sommes occupés déjà vers la fin de notre second chapitre (2). Un premier examen
des fragments osseux trouvés dans ce gisement, nous avait fait soupçonner des mélanges, dont le crâne
n° 2 de la collection préhistorique portugaise a déjà permis de découvrir l'un des facteurs. Reprenant
l’étude de cette même pièce à un nouveau point de vue, nous remarquerons que les caractéristiques
relevées sur les os de la voûte dans les pages qui précèdent, se rencontrent ici de nouveau, associées cependant
à une conformation des sinus frontaux qui nous a paru empruntée à un autre type ethnique (3).;
Le crâne assez défectueux asubi, nous lavons dit, un certain degré de déformation posthume, tendant à
raccourcir son grand axe et à rejeter sur les côtés les pariétaux. Les mesures qu’il pourrait fournir seraient
donc entachées d’erreur (4). Nous nous bornerons à faire observer que les courbures antéro-postérieures
des pariétaux et surtout de l’occipital, le rejet des bosses pariétales en arrière et siir les côtés, et l’enfoncement
qui correspond aux angles externes de l’écaille occipitale rappellent ce que nous avons dit des
têtes de Furfooz, d’Orrouy, etc. Cet enfoncement susmastoïdien avait attiré spécialement l’attention de
M. Pereira da Costa, qui le comparait à la dépression « qu’on ferait avec le bout du doigt sur un corps
mou » et se demandait s’il ne pouvait pas « avoir été produit artificiellement sur le sujet quand il était
encore jeune (5). » Nous avons eu déjà l’occasion de nous expliquer à ce sujet.
C’est ce même petit caractère qui a mis M. Broca sur la voie d’une identification entre le crâne de
Judge-Cave et ceux d’Orrouy, à la suite de l’examen attentif de cette pièce, fait par cet anthropologiste au
Musée des Chirurgiens de Londres.
« Les arcades sourcilières, nous dit-il, sont peu saillantes, le front est élevé et un peu fuyant... L’écaille
occipitale, peu saillante et très-relevée, est très-courte; au-dessous d’elle on trouve, à la place de la protubérance
occipitale, qui fait entièrement défaut, une dépression manifeste, que traverse la ligne courbe
occipitale supérieure. Au-dessous de ce point, la région cérébelleuse, très-développée, décrit une courbe
convexe très-prononcée. Les apophyses mastoïdes sont très-petites. Au-dessous et en arrière de ces apophyses,
au niveau de l’angle inférieur et postérieur des pariétaux et delà partie adjacente de l’occipital,
existe un large aplatissement des plus manifestes, et tout à fait semblable à celui qui caractérise les crânes
de la sépulture d’Orrouy. La face est petite et tout à fait orthognathe jusqu’au bord inférieur du nez; mais
au-dessous del épine nasale l’arcade alvéolaire est sensiblement oblique (6). » Si l’on compare cette description
avec celle de notre second type de Furfooz, on voit que les deux textes concordent admirablement.
Nous sommes ainsi en mesure d’affirmer que la race à laquelle ils se rapportent s’est étendue, pendant les
temps néolithiques, jusqu’à l’extrémité la plus méridionale de l’Europe occidentale.
L examen des têtes de Furfooz et d'autres têtes plus ou moins voisines que nous en avons rapprochées, a
fourni les bases les plus solides d’une théorie dite mongoloïde, qui a fait beaucoup de bruit dans ces dernières
années et que nous ne pouvons pas nous dispenser d’examiner ici avec attention.
Serres, qui fut le père de cette théorie, après l’avoir longtemps développée oralement en lui donnant
même parfois un aspect quelque peu fantaisiste, s’était décidé enfin à la publier aux Comptes rendus de
l Académie des sciences en 1853. Dans l’allée couverte de Meudon, qui lui avait fourni ses premiers matériaux
dès 1845, il avait déjà distingué deux types bien distincts ; mais sous l’influence des idées ethnogéniques
(J) Prüner-Beï. Élude et description de plusieurs crânes ligures. {Bull. Soc. d’Anthrop. 2e série, i. I, p. 145, 1866.)
(2) Voyez plus haut, p. 34.
(3) Voyez plus haut, p. 33.
(4) Pereira da Costa. Op. cil., p. 14-15, 25.
(5) Id. Ibid., p. 25.
(6) P. Broca. Remarques sur les ossements des cavernes de Gibraltar. {Bull. Soc. d’Anthrop. de Paris, 2« série, t. IV, 1869, p. 153-154.
RACES HUMAINES FOSSILES DE FURFOOZ, DE LA TRUCHÉRE, ETC.
qui régnaient alors en France presque sans contestation, il avait appelé l’un de ces types type Gall (fig. 148
et 149), réservant à l’autre le nom de type Kimry{$%. 146 et 147) (1).
Les fouilles de Précy-sur-Oise, qui eurent lieu en 1846, mirent au jour, en même temps que des crânes
gallo-romains, teutons, etc., une variété de type que Serres, averti cette fois par des comparaisons plus nombreuses,
a qualifiée sept ans plus tard, de
mongole, ajoutant qu’elle se rapprochait
« du type Kalmouk » qu’il avait « vu à
Paris en 1814 (3). »
L’année suivante le même auteur signale
dans le dolmen du Val qu’il vient
de vider, un crâne qui « par la configuration
de sa face, se rapproche beaucoup
du type mongol (4).»
Ce type, pur à l’origine, se serait graduellement
atténué dans nos contrées.
A Agnès, en effet, près Clermont (Oise),
dans des sépultures postérieures de bien
des siècles aux précédentes, Serres
trouve des crânes sur lesquels « il ne
restait du type kalmouk que des empreintes
profondes qui se décèlent par
l’avancement des arcades alvéolaires,
par la forme quadrilatère de l’ouverture
nasale, par l’aplatissement des os propres
du nez, par l’abaissement du pédicule
nasal du coronal, par l’élargissement
de l’unguis et la largeur de Tou -
Fig. 146. — Crâne brachycéphale mascu- Fig. 148. — Crâne dolichocéphale féminin
lin du dolmen de Meudon. {Type Kimry du dolmen de Meudon. (Type Gall de
de Serres, vu de profil.) Serres, vu de profil.)
verture du canal nasal (5). s>n’ !
Fig. 147. — Noitna verticalis du crâne
Fig. 149. — Norma vertica/is du crâne
Toute la théorie mongoloïde est
brachycéphale, de Meudon. {Moulage
dolichocéphale de Meudon. [Mus. Ilisf.
Mus.Hist. Nat.)
Nat. Coll. E. Robert.)
dans les citations que nous venons de
Dessins réduits au quart d’après J. Thurnam (2).
rappeler. L’existence d’une ancienne
couche de races réputées mongoliques
dans nos contrées, la présence, au sein des populations ac
tuelles, d’individus offrant adoucies les formes spéciales à ces races dont ils seraient les descendants plus
ou moins mêlés ; tels sont les deux ordres d’idées qu’ont développées le plus souvent les naturalistes qui
ont adopté cette manière de voir, à laquelle nous nous rattachons dans une certaine mesure, en faisant des
réserves sur ses applications. Ce n’est plus, il est vrai, aux Mongols proprement dits que 1 on compare
les brachycéphales préhistoriques et fossiles. M. S. Nilsson avait montré depuis longtemps que
les individus à têtes globuleuses, que l’on rencontre dans les sépultures néolithiques ou dans les tourbières
de Scanie, présentent avec les Lapons bien des affinités (6) et ajouté l’argument anatomique à
des preuves ethnologiques déjà si nombreuses que, suivant l’expression de Retzius, « il serait difficile
(1) Compl.-rend. Acad. Sc., I. XXI, p. 618, 1845.
• (2) J. Thornam. On the Two Principal Forms of Ancient British and Gaulisli S/cull. {Mem. readbefore the Anthrop. Soc. of London, l. I,
p. 136-137. London, 1863, in-8.)
(3) Serres. Note sur la Paléontologie humaine. {Compt.-rend. Acad. Sc., I. XXXVII, p. 519, 1853.)
(4) Id. Compl.-Rend. Acad. Sc., t. XXXIX, p. 318, 1854.
(5) Id. Ibid., t. XXXVI, p. 520, 1853.
(6) S. Nilsson. Trad. cit., p. 155 et 244, et fig. 230-235,239, etc.