Les traits les plus saillants de la description que l’on vient de lire sont rapidement mentionnés dans le
mémoire* de Quoy et Gaimard sur les crânes de Rawak, mais c’est principalement sur la morphologie
faciale que ces naturalistes ont insisté. La face du Papou de Rawak est en effet fort remarquable. Tres-
vaste dans toutes ses dimensions (haut. tôt. 0m,098), mais surtout en largeur, elle offre au plus haut degré
cette saillie des jugaux (diam. bizyg. 0“, 147) qui a frappé tous les observateurs (2) et qui, en rapport
avec un développement relativement faible du haut de la face (diam. front, min., 0m,094; biorb. ext.
0“,1075; biorb. int. 0m,098; interorb. 0“,0225), fait prendre à l’ensemble du visage un type lozangique
des plus caractérisés, l’indice fronto-jugal descendant à 63,94.
Tout est dilaté' dans cette région moyenne de la face. Le nez atteint une largeur de 0m,0285, et, malgré
son développement vertical (0m,0545), son indice monte à 52,29. Les trous sous-orbitaires s écartent de
0“,059, les pommettes de 0m,118, le diamètre bimalaire s’élèveà 0m,112, etc. Les os malaires sont très-;
obliquement dirigés en dehors, en avant et en bas, quoique un peu déprimés dans leur moitié supérieure.
Les orbites sont grands (haut. 0m,035, larg. 0m,040), carrés, à peine inclinés en dehors, et leur indice
égale 87,50. La région nasale, un peu surélevée le long du plan médian antéro-postérieur, forme au-
dessus de l’ouverture pyriforme une voussure seulement un peu moins régulière que nous ne 1 avons vu
chez les Négritos, et dont les détails rappellent d’ailleurs ceux que nous avons mentionnés en parlant de
ces derniers.*
Le plancher des fosses nasales se termine en une pente relativement raide qui descend jusqu’au voisinage
du bord alvéolaire assez fortement porté en avant. La voûte palatine, fort étalée ét peu profonde,
présente dans son quart antérieur une proclivité des plus manifestes. Toutes lés dents sont tombées,
mais leurs alvéoles sont en rapport avec une volumineuse dentition.
Le crâne que nous venons de décrire est de tous ceux de Rawak celui qui accentue le plus les caractères
propres au type auquel il appartient. Les trois autres têtes semblables atténuent dans une assez large
mesure ce qu’il peut avoir d’exagéré, et la moyenne des quatre-pièces combinées produit la série de ’
chiffres que l’on peut lire à la cinquième colonne de notre tableau XX .
La déformation est partout la même (fig. 222, 223, 224), et ne diffère que par son intensité et sa
direction qui peut devenir fort oblique, comme Quoy et Gaimard l'ont remarqué sur une des têtes de
Rawak (1).
Le crâne n° 2 figuré plus loin (fig. 225) et dont les Annales des Sciences naturelles et le voyage de Y Uranie
ont déjà donné le dessin (2), a les sinus ouverts par suite d’une large perte de substance ; on peut ainsi
constater que ces cavités ont ensemble 0“,07 de largeur et plus de 0m,05 de hauteur. Les caractères
crâniens ne présentent par rapport à la pièce que nous venons de décrire, que des différences de détail ;
les caractères faciaux sont tout à fait semblables, plus accentués même dans la direction de ceux des
Négritos.
Le crâne n° 1 de là collection Quoy et Gaimard (fig. 223) offre, au contraire, une ossature faciale ayant
plus d’analogies avec celle des Papouas, c’est celui qu’on peut voir sur la planche I du voyage sus-mentionné.
Quant au crâne n° 3 de la collection, il n’offre à remarquer, outre la déformation oblique mentionnée
déjà plus haut, que la présence d’un os wormien de 0,033 de haut sur 0,030 de large en voie de
Soudure dans l'angle du lambda.
Tous ces crânes ont les sutures ouvertes, mais plus serrées en avant qu’en arrière ; l’oblitération
commence à se montrer sur un seul de ces suj ets dans le bas des coronales. Aucune anomalie ne s’y remarque
dans les rapports des os les uns avec les autres. Le temporal, en particulier, que nous avons vu plus haut
(1) L. de F reycinet et Pellion. 0p. cit., t. II, p. 47. — Qooy eT Gaimard. Op. oit.., p. 8, etc.
(2) Quoy et Gaimard. Loc. cit., p. 9;
sé mettre parfois en rapport direct avec le frontal en est toujours séparé par 5 centimètres au moins et
quelquefois par 10, 11, 12 et même 13 centimètres.
Aucune de nos pièces de Rawak n’a malheureusement de mâchoire inférieure; nous ignorons par
conséquent quels sont les caractères que peut offrir cet arc' osseux chez les Papous. G. Sandifort a pu seul
donner une figure et une description de cet os que nous nous efforcerons d utiliser tout a 1 heure.
Crânes de Papous de Waigiou. — Tout ce que l’on vient de lire paraît devoir s appliquer fort exactement
à l’une des formes crâniennes observées à Waigiou par les naturalistes de la Coquille. Garnot, qui
avait recueilli sur les tombeaux des naturels de la côte de cette île des crânes perdus dans le naufrage du
Castle Forbes avec le reste des collections qu’il ramenait en France (1), Garnot, disons-nous, considérait
ces têtes comme analogues à celles que Quoy et Gaimard avaient fait les premiers connaître et en donnait
la description suivante : «Le crâne des Papous (de Waigiou) est remarquable par un aplatissement considérable
à sa partie postérieure : cet aplatissement est tel, qu’il forme une surface carrée, dont les angles
seraient arrondis. » Cette disposition ne rend pas pour cela, ajoute-t-il, le diamètre occipito-frontal
beaucoup plus petit comparativement aux têtes d’Européens, d’Alfourous etdeMozambiques qu il rapproche
de celles des Papous; «mais il n’en est pas de même du diamètre bipariétal, qui est beaucoup plus grand,
ce qui est dû au développement plus considérable des bosses pariétales. » Le coronal, quoique un peu plus
large que celui d’un Européen, ne présente pas, dit-il, de différences assez tranchées pour qu on puisse les
indiquer. « La face a également plus de largeur, ce qui.provient de la plus grande étendue du diamètre
transversal de la cavité orbitaire, et d’un léger aplatissement de la voûte nasale. » L ouverture des fosses
nasales est, pour Garnot, en tout semblable à celle d’un Européen, mais la distance d une apophyse mas-
toïde d’un côté à celle du côté opposé est plus grande (2).
A la suite de ces quelque^ lignes de description, Garnot donne un petit tableau de mesures, de 1 examen
duquel il ressort que ses crânes de Waigiou étaient sous-brachycéphales à 81,81 (d. a. p. 0 ,176, d.
transv. max. 0m,144). Comme sur les crânes de Rawak le développement vertical est considérable ; le
diamètre mesuré par Garnot « du corps du sphénoïde au bregma », sensiblement inferieur cependant à notre
diamètre basilo-bregmatique, atteint (T,142. La face a tout à fait la même largeur en haut (diam. biorb.
ext. 0,108) et ses dimensions transversales accusent seulement 3 millimètres de moins à la hauteur des
arcades zygomatiques (diam. bizyg. 0m,135); cette réduction minime porte sur l’ouverture des fosses nasales
qui mesure 0”,025. La largeur postérieure de l’arcade maxillaire est semblable dans les deux séries.
(!) Voyage autour du monde... sur la Corvette la Coquille, 1822-1825. Zoologie 1.1, préface. Paris, 1826, in-4«, p. HI.
(2) Garnot. Détails anatomiques relatifs aux crânes de quelques-uns des peuples, etc. [Voy. de la Coquille, Zoologie, t. , p. ,
in-4°).