Les deux têtes de Lifous, Awita et Biat, que possède M. Davis (1), n’offrent rien qui doive particulièrement
attirer l’attention. Nous ne savons rien de précis des pièces de même provenance conservées au
British Muséum (2).
Crânes d ’Ouvéas. S ^ Ouvéa doit son nom à ces Polynésiens sortis de l’Ouvéa des Wallis, dont il
vient d’être question, et qui, suivant Deplanche (3), compteraient cinq ou six générations depuis leur
migration. La population se compose actuellement des descendants de ces émigrés, mêlés aux Mélanésiens
anciennement établis dans Elle. Les trois crânes qui ont été recueillis à Ouvéa par la Société
océanienne et donnés au muséum de Paris par M. Marzioux, ne présentent pourtant aucune trace de
croisement. Ce sont des crânes du type Papoua le plus franc. Leurs diamètres crâniens (d. a.-p. 0m,189;
tr. max. 0m,129; bas.-bregm. 0m,136), et les indices correspondants(68,23, 71,90, 105,42); leurs circonférences
et leurs courbes (circonf. médiane totale 0m,517 ; courb. front. 0m,131, pariét. 0m,133, occ. sup.
0m,69, inf. 0m,50, transv. sup. 0m,298, tôt. 0m,426, horiz. 0m,507), les diamètres .céphaliques (diam. iniaq.
0",178,j)itemp. 0m,125, biauricul. 0m,117, bimast. 0m,102, front, max. 0m,112, min. 0m,95), et faciaux
(biorb. ext. 0“,108, int. 0m,99, interorb. 0m,28, bimal. 0“,91, bizygom. 0m,129), etc., leur assignent une
place au nombre des Papouas les mieux caractérisés.
Crânes de Néo-C alédoniens (pl. XXIV, fig. 1 et 2 et dans le texte fig. 264, 265). — Les métis
Mélano-Polynésiens d’Ouvéa n’ont point tardé à se répandre sur les côtes orientales de la Nouvelle-
Calédonie, séparées des îles Loyalty par un canal de 40 à 50 milles seulement. Ils se sont principalement
fixés à Kanala, Ouagap, Hienguène, Tuo, où on les trouve formant un certain nombre de groupes plus ou
moins importants.
Les voyageurs ne sont point d’accord sur le degré d’influence qu’ils ont pu exercer sur la population
de ces diverses localités : Deplanche et M. Bourgarel ont notamment à ce sujet des opinions toutes
contraires (4). Aussi avons-nous cru devoir Jétudier séparément les crânes des Néo-Calédoniens appartenant
aux tribus de la côte Nord-Est, chez lesquels se sont établis ces immigrants et ceux des autres tribus,
et en particulier des tribus Occidentales. Nous avons donc examiné et mesuré d’abord cinquante et une
têtes des deux sexes (5), provenant des premières (fig. 264, 265), puis soixante-onze ayant appartenu aux
secondes (6). Les colonnes 1 à 4 du tableau XXVIII ci-après (p. 287) contiennent les résultats numériques
0m,425, èt pour indices, par conséquent, 77,35 et 80,64. L’un des deux, le moins jeune, a sa base intacte, et le diamètre basilo-breg-
màtique est 0m,127; comparé à l’antéro-postérieur, et au transverse, ce diamètre donne les indices 76,72 et 99,18 (Voir plus haut,
p. 253). | . '
(1) Principales mesures de deux crânes de Lifous d'après M. J.-B.Davis (Thés., p. 309). Awita, , 25 ans, cap. crân. 1462co, d. a.-p.
0”,177; d. tr. 0m,132; front, max. 0“,104 ; occ. max. 0“,104; vertical (max.) 0“,149; bizygom. 0m,129; courbe horizont. lot. 0m,502;
front, tôt. 0m,126; par. 0” , 142; occ. O",116. — Biat, è, 30 ans, cap. crân. 1631“ ; d. a.-p. 0” ,193;d. tr. 0m,126; front, max. 0*141 ;
occ.max. 0m,104; vertical (max.) 0m, 132; bizygom.J)“, 139; courbe horizont. tôt. 0m,527; front, tôt. 0“,134; par. 0m,144; occ. U“ .124.
(2) Catal. cit., p. 1-2.
(3) Deplanche. Op. cit., p. 8 et notes manuscrites.
(4) Id. Ib id ., p. 10.' — A. Boubgarol. Loc. c it., p.254.
(5) Ces. cinquante et une têtes se décomposent en deux séries principales, l’une de 20 hommes et 22 femmes Kanalas, recueillis par
Verreaux, Deplanche, MM. Vinson et Bourgarel, sur la Montagne-des-Morts, à l’entrée de la rivière de Kanala ; l’autre de cinq hommes
et dune femme Tuos, rapportés par Deplanche et M. Balansa, des villages de Tuo et Puanghé. Nous avons joint à ces pièces
deux crânes de femmes de Hienguène et un crâne de femme de Nékéty, delà collection Deplanche, et un crâne de femme Bondé exhumé
au village des Paàcs sur le Diahot par M. Braguy (fig. 265). Toutes ces pièces, sauf douze crânes de Kanalas déposés au musée de Caen,
font partie de la collection du Muséum d’histoire naturelle de Paris.
(6) Voici les provenances de ces soixante et onze crânes : Tribu des Poumas : village de Balade, 6 hommes, 3 femmes ; Poebo,
6 hommes, 4 femmes ; Baio, 1 homme, 4 femme. Tribu des Nénémas, 1 femme. Tribu des Gomens : Gomen, 4 homme, 4 femme ,
Coumac, 4 homme. Tribu des Koneys: Pindhiana et Koney, 4 hommes, 2 femmes. Tribu des Mandous : Ouarai, 4 homme. Tribu des
Kouindos: Koûindo, 1 femme.Tribu des Manoncoes: Ndoumbea, 4 hommes, 4 femme; Païta, 4 femme. Tribu des Manewatas, 2 hommes,
3 femmes. Tribus des Nouméas et des Bekes : 7 hommes,19 femmes. Tribu des Touaourous, 4 hommes. Tribu de lTle Uen ;
5 hommes, 4 femme. Tous ces crânes, sauf ceux de Poebo et un des Manewatas qui appartiennent à la faculté de Caen, sont au Muséum
d’histoire naturelle qui les a reçus, ainsi qu’un certain nombre d’autres sans provenances détaillées et quelques crânes d’enfanls,
de Deplanche, de MM. Bourgarel, Pauchet, Vieillard et Ponty.
dé ces deux longues séries d’opérations. La comparaisoo, sexe à sexe, des collections ainsi mises en présence,
montre chez les Kanalas, etc., de légères différences dans les proportions, qui se traduisent par divers
changements dans les indices céphaliques ; le crâne est chez eux un peu plus court, un peu moins aplati,
surtout dans la région temporale, et un peu moins élevé ; la face est un peu plus développée en largeur,
le nez est proportionnellement plus long et moins large; etc. Le type se modifie donc à Kanala, dans le
même sens qu’àLifou (1), et l’on ne saurait douter que cé soit sous la même influence ethnique qu’ont surgi
ces variations, bien moins étendues d’ailleurs que M. Bourgarel les avait faites.
Nous retrouvons, en outre, parmi les cinquante et un crânes de Kanala, Hienguène, etc., ce que nous
avons signalé déjà plus haut chez les vingt-neuf insulaires de Lifou.
Sur un certain nombre des sujets mis en observation se manifeste
nettement l’action du métissage Polynésien que vient atténuer dans
le calcul des moyennes la juxtaposition d’autres.individus présentant,
comme celui de notre planche XXIV, l’aspect Papoua le plus
accentué.
A ces détails près et en tenant compte d’ailleurs d’un certain
nombre d'exagérations morphologiques qui sont communes aux
Néo-Calédoniens et aux autres Mélanésiens orientaux, ces insulaires
rentrent très-aisément dans la description générale de la
race, telle qu’elle a été formulée précédemment, à propos desu
Néo-Guinéens du Nord-Ouest : ils offrent le même développement,
les mêmes synostoses, etc., et les anomalies d’ossification
signalées plus haut se retrouvent chez eux proportionnellement
aùssi nombreuses. Nous avons noté; dans les séries qui ont servià Fig. 26i .—Buste dejeune Néo-calédonien deYaté,
T1 • . . . s ' . . . tribudes Touaourous (Mus. flisf. Nat.). tonner notre tableau, trois cas où la medio-frontale était encore entièrement
visible, cinq où l’écaille du temporal se prolongeait plus ou moins large jusqu’au frontal des
deux côtés à la fois (2), sept présentant seulement à droite la même anomalie, quatre l’offrant du côté
gauche, un bon nombre enfin où l’intervalle entre le sphénoïde atrophié , et l’angle antéro-inférieur du
pariétal était comblé par des os wormiens tantôt d’uù 'seul côté, tantôt d’une façon plus ou moins symétrique.
Destraces d’épactal se suivent sur deux sujets, dans une longueur de près de 3 centimètres à droite
et àfgauche. Enfin nous avons constaté un exemple de troisième condyle médian.
Les caractères tirés de l’étude du maxillaire inférieur sont plus frappants. Cet arc osseux exagère, en effet,
chez les Néo-Calédoniens, les caractères spéciaux que nous lui avons vu offrir chez les Papouas. Nous
avons déjà signalé (3) plus haut quelques-uns des traits les plus saillants de cette ossature mandibulaire, la
tendance au parallélisme des deux branches horizontales, l’épaisseur et surtout la largeur des branches
montantes, et la diminution de leur angle d’inclinaison, le peu de saillie du menton, la proclivité
des alvéoles antérieurs, etc. ; chacune de ces particularités se retrouve plus accentuée chez les Néo-Calédoniens.
Nousnepouvons que renvoyer le lecteur aux quelques pages que M. Bertillon a consacrées à la description
de la mâchoire inférieure dans sa monographie des crânes du Musée de Caen (4) et aux mensurations
détaillées consignées ci-dessous.Nous nous bornerons à faire remarquerque chezplusieurs des sujets que
nous avons examinés, la largeur transverse de la branche montante atteignait 0“,048, que l’épaisseur de
la branche horizontale s’élève parfois jusqu’à 0m,017 et 0m,018, qn’il n'est point très-rare de rencontrer des
(1) Voyez plus haut, p. 282.
(2) Notons en outre sept à huit observations dans lesquelles le temporal et le frontal ne sont plus séparés que par 2 à 3 millimètres.
;(3:) Voy. p. 252,-etc.
(4) B ertillon. Loc. cit., p.275-278.