de la Péninsule Scandinave. M. Woldrich, de Vienne, a été amené à des conclusions presque identiques
aux nôtres par l’étude comparée du crâne de Nagy-Sap et des crânes Lapons (1).
• Ce type Laponoïde, si l’on peut s’exprimer ainsi, qui se confond, suivant nous, avec celui qu’Eschricht,
Masch et Nilsson ont les premiers fait connaître, a été considéré par ce dernier auteur comme franchement
Lapon (2), On peut voir dans son ouvrage sut les Habitants primitifs de la Scandinavie, les preuves
qu’il fournit à l’appui de son opinion. L’identité qu’il a constatée entre des Lapons de Stensele et de
Lycksele et certains individus des sépultures à galeries de la Suède et du Danemark, n’était pas admise
comme complète par Retzius, qui relevait en 1842 des différences, toutes secondaires d’ailleurs, entre
les brachycéphales anciens de la Scandinavie et les Lapons modernes (3), mais le célèbre crâniologue
suédois s est rangé plus tard sans réserve à l’opinion de M. Nilsson, qui prédomine d’ailleurs encore en
Suède. Au congrès d’anthropologie de Stockholm, le successeur de Retzius, M. Von Düben a très-
nettement exposé ses idées sur l’identité ethnique des brachycéphales des monuments mégalithiques
avec les Lapons actuels. MM. Gustave Retzius et Montelius partagent cette
manière de voir à laquelle se rattachent d’ailleurs plusieurs naturalistes Danois,
et M. Steenstrup en particulier.
Les fouilles exécutées par ce dernier dans plusieurs sépultures néolithiques,
lui ont mis entre les mains des crânes brachycéphales et dolichocéphales,
dont quelques-uns figurent aujourd’hui dans nos collections du Muséum
d’Histoire Naturelle. Le type brachycéphale du Steenkammer de Oroë
Grydehoï, dont nous reproduisons ci-contre la norma verticalis (fig. 158), répète
x Steenkam- celui de Stege dans l’île de Moën, que M. Steenstrup considère avec Eschricht,
Fig. 158. — Cran
Z k y c Z ^an ^er Hoeven (4). etc., comme absolument Lapon. M. Worsaae est d’opinion 1 2 3 4 5 6
contraire, et M. J. Lubbock paraît s’associer à cette manière de voir négative
(5), mais les arguments que ces archéologues invoquent ne sont pas de l’ordre anatomique et nous
ne pouvons pas nous y arrêter.
La race dont nous nous efforçons de délimiter l’aire géographique était relativement peu répandue
dans la Suède néolithique. D’après les recherches que nous avons faites dans les collections anthropologiques
de Stockholm et de Lund, elle ne figure que pour un dixième environ^) dans la population
dont les monuments mégalithiques nous ont conservé les restes. Elle est plus largement représentée
dans les îles Danoises, où, suivant MM. Davis et Thurnam, elle prédomine sensiblement pendant l’âge de
la pierre polie (6).
Retzius étendait l’habitat de cette race brachycéphale beaucoup plus loin vers le sud. L’Allemagne du
Nord, les îles Britanniques, une partie de la France, etc., lui devaient leur première population. Chacun
de ces pays a fourni, en effet, qiioiqu’en petit nombre, des documents à Fappui de l’idée de la
permanence sur place du type ethnique dont nous achevons l’étude. Ce type s'est rencontré quelquefois
(1) Woldrich, Bemerkungen über dm Schädel von Nagy-Sap {Mittheil, der Anthrop. Gesellsch. in Wim. Bd. II, s. 102, 1873.)
(2) Eschricht, Danske Folkeblad, 1837, p. 111 et fig. — Prichard, Researches into the physical history of Mankind, vol. I ll, p. xvm,
1841, in-80. — S. Nilsson, Les Habitants 'primitifs de la Scandinavie. Paris, 1868, in-8°, p. 155 et pi. XII et XIII. Cf. On the primitive
Inhabitants of Scandinavia (Rep. of the British Associât. Oxford 1847.) London, 1848, in-8°, p. 31. — Jahrb. des Vereins für
Mecklenburg. Geschichte und Alterthumskuhde, herausg. von G. F. Lisch. Bd. IX, s. 361, 1844.
(3) A. Retzius. Mémoire sur les formes du crâne des habitants du Nord (Ann. Sc. Nat. Zoologie, 3° série, t. VI, p. 160, 1846).
(4) Van Der Hceven, Catalogus craniorum diversarum gmtium. Lugd. Batav., 1860, in—8, p. 63.
(5) J. Lubbock. Prehistoric Times. London, 1865, in-8°, p. 117. L'Homme avant l'histoire. Paris, 1867, in-8°, p. 121.
(6) J.-B. Davis et J. Thurnam. Crania Britannica, p. 18. — Cf. Memoirs read before the Anthrop. Soc. of London, vol. I, p. 130 et
508, 1865. — Lubbock, Op. cit., p. 108 et suiv. —Il ne faut cependant pas oublier que, môme à Moën, le. type dolichocéphale
néolithique accompagnait le brachycéphale. Il en était de même à Oroe Grydehoï, dont nous avons les crânes dans notre collection.
Nous ne savons malheureusement pas si ces tôtes, aux types si distincts, appartenaient à une môme couche de sépultures
ou si leur inhumation ne remontait pas à des périodes différentes.
RACES HUMAINES FOSSILES DE FURFOOZ, DE LA TRUCHÈRE, ETC.
dans le nord de l’Allemagne où MM. Schaaffhausen, Lisch, Virchow, etc., ont signalé sa présence.
Le spécimen le plus caractéristique que l’on ait jusqu’à présent publié dans ce pays est ce crâne de
Plau, dont il a déjà été fait mention précédemment (1), crâne découvert par M. Lisch dans des conditions
qui permettent de croire qu’il remonte à la période néolithique et que cet archéologue considérait
comme appartenant probablement à la population autochtone du Mecklembourg (2). M. Schaaffhausen a
décrit ce crâne (3) en même temps qu’il faisait connaître celui du Neanderthal, avec lequel il lui trouvait
une grande similitude dans la conformation des régions antérieures. Nous avons fait remarquer
précédemment que le n° 3 de la carrière Elie avait donné lieu à un rapprochement semblable. Il s’est
malheureusement glissé dans le travail de M. Schaaffhausen une erreur de chiffres (4) qui jetterait le
naturaliste dans l’incertitude si de bonnes figures ne venaient pas rectifier cette transcription fautive.
Quoi qu’il en soit, ce crâne de Plau offre dans sa voûte une reproduction exacte de celui de l’homme
de Grenelle que nous avons représenté plus haut (p. 120). Le savant anthropologiste de Bonn le range
dailleurs dans le même type que ceux de Moën, etc., que nous venons de rapprocher de nos
brachycéphales quaternaires du bassin de Paris. M. Schaaffhausen groupe autour du crâne de Plau ceux
de la. couche inférieure du Herberg, dans le Mecklembourg; celui de Fehrbellin, Brandebourg; un
frontal trouvé à Schwaan (5). M. Virchow en rapproche (6) une autre tête ancienne, découverte dans des
tourbières, près de Doemitz, et dont il a donné la description dans les procès-verbaux de la Société
d'Anthropologie de Berlin en 1872 (7). Nous ne croyons devoir accepter ce dernier rapprochement
qu’avec une grande réserve.
Le type ethnique dont nous cherchons à déterminer, au moins provisoirement, l’extension géographique,
vient de se rencontrer à plusieurs reprises dans l’Ouest de l’Allemagne. M. Schaaffhausen,
reprenant tout récemment ses recherches au sujet de cette race, qu’il assimile avec les savants Scandinaves
à la race Laponne, a constaté sa présence dans plusieurs sépultures anciennes de la Westphalie.
Son mémoire, encore inédit, va paraître dans les actes du Congrès de Stockholm. Il serait difficile, dans
1 état actuel de nos connaissances, de déterminer jusqu’à quel point cet élément brachycéphale a
influencé la population de l’Allemagne, du Sud et de la Suisse. Les publications de MM. Al. Ecker, His
et Rutimeyer permettent cependant de soupçonner son existence dans la forêt Noire, les Grisons, etc.
Les îles Britanniques étaient occupées, dès l’âge de la pierre polie, par des hommes de la même race,
mais ils n y formaient, comme en Scandinavie, qu’une infime minorité dans la population. Les Crania Britannica
Davis et Thurnam n’en renferment qu’un très-petit nombre, parmi lesquels nous citerons
celui faibarrow deCodford, Wiltshire (8). M. Davis n’y veut voir qu’un exemple de l’étendue des variations
dont est susceptible le Breton ancien, mais ce crâne ressemble trop à ceux que nous venons d’étudier poui
que nous le traitions autrement que Nilsson, Retzius, etc., ont traité les brachycéphales Scandinaves
découverts dans des conditions identiques. Le crâne de Codford appartient à une race différente de celle
des vrais Bretons des longs barrows et doit prendre place dans le groupe où figurent les hommes
(1) Voyez plus haut, p. 28.
(2) Jahrb. des Ve reins für Mecklemburg. Geschichte und Alterthumskunde. herausg. von G. F. Lisch. Bd. XII, s. 400, Schwerin, 1847.
(3) Sghaafhagsgn, Zür Kmtniss der âltestm Rassenschâdel (Archiv. für Anatomie von Millier, 1858, p. 453-477 et pl. XVII).
(4) Le diamètre bi-mastoïdien du crâne de Plau avait 0m,155 et remporterait par conséquent de 0m,017 sur le pariétal (0m,138).
Si 1 on cherche l’indice céphalique à l’aide du plus fort de ces nombres, comparé au diamètre antéro-postérieur (0m,168), on trouve
le rapport invraisemblable 98,21. M. Virchow (loc. cit., p. 314), considère le chiffre 0m, 138 comme représentant le diamètre transverse
mesuré d’une bosse pariétale à l’autre, suivant la méthode de M. Welcker. M. Schaaffhausen ne se sert pas ordinairement de
ce diamètre, fort rarement cherché ailleurs, et dont, disons-le, l’introduction dans la science n’a produit que de fâcheux résultats.
C est le diamètre mastoïdien qui est erroné, le bi-pariétal est juste et représente la plus grande largeur du crâne qui, comparée
à la plus grande longueur, donne l’indice très-acceptable de 82,14.
(5) Schaafhausen, op. cit. passim.
(6) Virchow, loc. cit., p. 314.
(7) Verhandl. der Berliner Gesellsch. für Anthrop., s. 72, 1872.
(8) J.-B. Davis et J. Thurnam, Cranta Britannica, pl. XIV.