Péron, Martin, Hombron et M. Blanchard, à des. conclusions tout opposées. Malgré les.causes d'erreur .qui
ont entaché les.moyennes de ces deux observateurs (1), lès différences profondes qufeséparent les deux
races se. sont hautement manifestées dans leurs tableaux de mensurations;®. Elles ne ressortent pas:
moins clairement des recherches de M. B. Davis (3). L'intéressante monographie de;cet.anthropologiste.a
ajoutéde nouveaux et solides arguments à ceux que renfermait déjà son Thésaurus à l'appui dediisolement
ethnique des Tasmaniens. « Les Tasmaniens ne. sont pas Australiens,, dit M. B, Davis, à la 'fin de son
«.mémoire, et il ajoute aussitôt qu’ils ne sont non' plus ni Papouas ni Polynésiens (4).. », Cette dernière
affirmation s’adresse à M. Topinard, qui s’est cru autorisé par ses recherches crâniologiquesi à-émettre
l’hypothèse d’une ;« origine multiple ». pour jÿs Tasmaniens; qui. seraient alors «.le produit fixe. d’un,
croisement » entre une race noire autochthone et l’un des groupes envahisseurs de la grande famille
«.polynésienne. » Cette manière de voir nous parait, comme-àM. Davis, absolument inacceptable;, à quelque
point de vue que nous nous placions, et pour nous en teninà celui/de nos éfudes actuelles, il nous
semble tout à fait inadmissibleque lès formes crâniennes qui résultent du rnétissage des Mélanésiens par
les Polynésiens puissent être aisément confondues avec celles.que nous venons d’examiner. Nous;aurons
l’occasion de revenir sur cette question, quand nous étudierons plus loin les métis Mélano-Polynésiens;
de la Nouvelle-Calédonie, etc. (5).
Chapitre VI. — Race papoua:
, ■ v ;,§ 1. — Historique.
Le nom de Papouas est appliqué depuis dgj,siècles par les Malais aux Nègres océaniens en.générai.
dont,il caractérise une des. apparepçM les.plus frappantes. Papoua signifie en effet crtpu et rien
,n est pliis remarquable que l’aspect que donne à ces noirs leur chevelure ébouriffée.
Employé, tout d’abord.pour, désigner l’ensemble dçs. terres Océaniennes, sur lesquelles l j f Européens
avaient.rencontré des Nègres, .et plus particulièrement celle que l’on nomme depuis Saayedra (7) la Nouvelle
Guinée.®, le mot Papoua n’a guère commencé à prendre de valeur ethnologique avant la publication
de Valentyn.(9) qui nommait Papoewas les noirs établis àCéram (10). Vers la même époque, Cornelis de
qu’il repousse avec celles auxquelles devait conduire l’élude des crânes dont il avait les ligures sous les yeux dans I’AUas sus-menr
tionné, mais que n’avait pas connus l’auteur qu’il .critique.
(1) M. Primcr-Bey a lait entrer dans ses tableaux, comme son successeur, huit têtes de Tasmaniens, quand la collection n’en,
comptait que sept. Le crâne de Hobart-Town n° 2 était encore à cette époque recouvert de ses,parties molles, et conservé dans un
bocal à l’Anatomie comparée. M. Prüner-Bey a dù mesurer avec le moule de cette pièce les antres crânes de Hobart-Town, ceux du
port Dalrymple et de Launceston, une tête du lac Saint-Clair, et enfin le faux Tasmanien de M. Bodd, qui est, comme on l’a delà dit
un Néo-Zélandais. J '
(2) P runer-B ey. Résultats de crdniométrie (Mém. Soc. d’Anthrop. de Paris. T. II, tabl.i2J( —-P. Topinard. Loc.cit.
(3) J.-B. Davis. On the OSUolofn) and P&mliirikès of thé Tasmanians (Xatuurk. Vcrhaadd. der Ihlhmdsch. H H der Wetnsch
3dc Y. D. II. Haarlem, 1874, in-4®.
(4) Id. Ibid., p. 18,
(5) Est-il besoin de rappeler,.en terminant ce chapitre, les prétendues affinités des Tasmaniens avec les insulaires de la Terre de
Feu, dont d’Orbigny a fait justice (A. b’Orbigny. L'homme américain. T. I, p. 416. Paris, 1839, iii-8®)?
m EAnt- P- B R -G. Lathak. On U t fagan (non Mahomelan) Papulations ofthc Indien Anhipelaùo ITr’anm t of.
the Etlm. Sac of Undon.-New. ter., vol. I, p. 202; lSGl).-éf»sCc Vroia. P. 65; _ e t c . - D’après Gaivaom, suivi en cela par Argen-
sola et quelques modernes, ce nom viendrait d’une corruption du mot Pua-pua, qui chez les Néo-Guinéens signifierait noir (J. Bontoev.
A Chronological History of the Discoveries in the South Sea or Pacific Océan, vol. I p. 145 1803 in-4®).
(7) 16'. Ibid., p. 151.
(8) Ce nom a été donné à cette terre par Saavedra en 1528, à canse de la ressemblance générale de ses habitants avec les nègres dela
Guinée (J. B drnev. Op.cit. ; p . 152). i °
(9) Valentyn. Beschryvinge van Amboina. Dordrecht, 1724, in-f®, p. 53, 578, 6.
(10) Earl. Op. cit., p. 114-116.
Bruyn publiait dans ses Voyages le premier portrait connu d’un Papoua, de Lange-Eiland, enlevé de ce
qu’on appelait encore alors la Côte méridionale et transporté à Batavia avec cinq de ses compatriotes (1).
Les voyages de Grijalva, de Saavedra, de Mendana, de Quiros, de Torrès, de Le Maire, de Tasman, de
Dampier, pour ne citer que les plus importants au point de vue de nos études (2), avaient déjà procuré un
certain nombre de renseignements intéressants sur diverses tribus des archipels collectivement désignés
aujourd’hui sous le nom àe Mélanésie. Sonnerai, Forrest, Carteret, Bougainville, Surville, Cook, Forster,
d’Entrecasteaüx, Labillardière, etc. (3), ont plus ou moins ajouté à ce que leurs prédécesseurs avaient
fait connaître.
Mais c’est surtout aux explorateurs qui ont parcouru la Mélanésie depuis -1817 que l’on a dû les progrès
les plus marqués de l’ethnologie Papoua. Nous avons analysé, dans un précédent chapitre, les travaux
exécutés par les marins et les naturalistes de l ’Uranie et de la Physicienne (4). Les documents de toute
•nature,[recueillis par l’expédition de la Coquille, confirmèrent en ce qui concernait les Papous et les Papouas
les résultats ethnologiques acquis pendant ce premier voyage; par la publication des trois figures de la
planche I de son atlas zôologiqüe, R. Lesson a précisé, en outre, les caractères crâniologiques de
la race que Forster avait le premier nettement distinguée, et les descriptions qu’il a tracées des insulaires
de Waigiou, du portPraslin à la Nouvelle-Irlande, de ceux d’York et de Bouka, enfin des habitants de
Port-Doréi sont encore aujourd'hui avantageusement consultées.
Malheureusement quelques observations superficielles ou mal interprétées, recueillies dans la dernière
de ces relâches, ont inspiré à Lesson dès idées fausses sur les populations de l’intérieur de la Nouvelle-
Guinée. Il a cru pouvoir distinguer des Nègres laineux divisés en Papouas proprement dits et Arfakis,
certains Noirs à cheveux raides (5) qu’il nommait Endamènes et rapprochait des Australiens, sous le nom
commun d’Alfourous (6). Cette classification, adoptée par nombre d’auteurs, a.longtemps prévalu en ethnologie,
et ce n’est qu’à une époque toute récente que l’erreur qu’elle sanctionnait a disparu de la science.
L'Astrolabe a visité une partie des îles Viti ou Fidji, la Nouvelle-Irlande, la Nouvelle-Guinée, le
groupe de Vanikoro, et Dumont d’Urville* dé Sainson, Quoy et Gaimard ont réuni sur les insulaires de
ces diverses terres des matériaux d’études abondants et variés (7). Pendant ce temps l’amiral Lütke,
(1) Corneille Le B run. Voyages..... par la Moskovie en Perse et aux Indes orientales. Trad. fr. T. II, p. 338, pl. 197. Amsterdam,
1718, in-f®.
(21 Dalrymple. Voyages dans la Mer du Sud par les Espagnols et les Hollandais, tr. fr. Paris, 1774, in-8®, p. 71, etc. — D. F leurieu.
Découvertes des Français en 1768 et 1769 dans le Sud-Est de la Nouvelle-Guinée, Paris. 1790, in-4®, p. 5, 18, 26, 43, 50; — J. B urney.
Qp. cit., vol. I, p. 151, vol. II, p. 309, 315, 417, 421, 426, etc., vol. III, p. 98, etc., vol. IV, p. 411-418, etc. — T gmminck. Coup d'oeil
général sur les possessions Néerlandaises dans l'Inde Archipêlagique. T. III, p; 334 et suiv. Leyde, 1849, in-8®.
(3) Sonnerat. Voyage à la Nouvelle-Guinée. Paris, 1776, in-4®, p . 153. — F orrest. Voyages aux Moluques et à la Nouvelle-Guinée faits
sur la galère la Tartare, en 1774, 1775 et 1776, trad. fr. Paris, 1780, in-4®, passim. — Croizet. Nouveau voyagea la Mer du Sud. Paris,
1783, in-8®, p . 272. — P h . Carteret. Relation d’un voyage fait autour du monde dans les années 1766-1769 (ap. H anvkesnvorth. Relation
des Voy., etc., trad. fr. Paris, 1774, vol. I, p. 243, etc. —D e B ougainville. Voyage autour du monde par la frégate la Boudeuse et
la flûte l’Étoile, en 1766, 1768 et 1769, ch. Y et VI. Paris, 1771, in-4®. — J. Cook. Voyage dans l’hémisphère austral et autour du
monde, trad. fr. T. III, ch. III à X. Paris, 1778, in-4®. — F orster. A Voyage round the World. London, 1777, in-4®, vol. II, Bk 3. —
F orster le père. Observations faites pendant le second voyage de M. Cook, trad. fr. Paris, 1778, in-4°, p. 207 et suiv. — B. d’Entre-
casteaux. Voy. cit., vol. I, ch. Yl, VIL — L a B illardière. Voy. cit., vol. Il, ch. XIII, etc.
. (4) Voir plus haut.
(5) Tnan-Hadji, l’un des officiers Batchians qui accompagnaient Forrest, lui disait déjà que « parmi les Haraforas (de Dorei) plusieurs
ont de longs cheveux, mais que la plupart sont noirs comme les Papouas (Forbst. Trad. cit., p. 127).
(6) B . Lesson. Considérations générales sur les iles du grand Océan et sur les variétés de l'espèce humaine qui les habitent (Voyage autour
du monde sur la corvette la Coquille. Zoologie. T. I, p. 84-105. Paris, 1826, in-4®). — Id. Complément des oeuvres de Buffon. Races Humaines.
T. II, p. 112-141. T. III, p. 1-67. Paris, 1828-1829, in-8®. — Cf. Dumont d’Urville. Voyage de la corvette l’Astrolabe. Histoire
du voyage* T. IV, p. 605. Paris, 1832, in-8®.
(7) Voyage de la corvette l’Astrolabe. — J. D umont d’Urville. Histoire du voyage. T. IV et V, ch. XX.V à XXVIII, XXXIV, et
notes. — D e S ainson, Atlas Historique, etc., pl. 98 à 100, 106, 114. 117, US, 123, 128, 129, 136, 144, 167, 176 et 185; — Quoy et
Gaimard. Zoologie. T. I, p. 17, 29, etc. Paris, in-8®.