D’autres modifications sont encore le fait du sexe. Les arcs surciliers s’annulent, ou bien peu s’en
faut, le front devient plus saillant, les bosses en sont plus manifestes, toutes les crêtes s’adoucissent,
l’aplatissement latéral fait place à un léger renflement de la région pariéto-temporale ; enfin la face,
dont les proportions n’ont guère changé, se projette en un prognathisme total d’autant plus apparent
que le crâne qui la surmonte offre lui-même moins de saillie antérieure. Les
mesures angulaires du tableau en expriment d’une manière assez frappante
la proclivité générale, mais sont impuissantes à rendre la différence qui existe
d’un sexe à Fautre à ce point de vue spécial. Si, en effet, le sommet des
angles faciaux est bien plus porté en avant chez cette femme que chez les
hommes de la même race, leur côté supérieur, appuyé sur le front, suivant
la méthode que nous employons pour la détermination des aDgles faciaux,
au point d’intersection de la ligne frontale minima avec le plan antéropostérieur,
est rendue plus oblique par l’absence complète de relief surcilier,
et l’on constate une sorte d’inversion dans les chiffres qui dénonceraient
Fig. 246. — Crâne de Lobo de moins de prognathisme, tandis qu’il y en a plutôt davantage.
la baie du Triton ? (Mus. Hist. u . * °
Nai, Coll. Dumouiier, n* 8). Nous n insisterons pas sur les autres variations dont les colonnes 1 et 2
de notre tableau XXV mesurent l’amplitude (1). Nous dirons seulement quelque
chose sur la morphologie des dents et de la mandibule, et cette brève description sera d’autant
moins déplacée que, tandis que les premières étaient en partie absentes dans les pièces ci-dessus examinées,
la seconde faisait constamment défaut jusqu’ici.
Aux deux mâchoires, les dents fort bien rangées sont remarquables par la beauté de leur émail, qui
n’a point cependant empêché les deux incisives médianes d’être attaquées par la carie latérale, et
la seconde grosse molaire gauche d’être frappée du même mal à son centre. Sauf les incisives à la fois
très-saillantes et fort volumineuses (larg. 0m,010, haut. 0m,012), le reste de l’appareil dentaire n’offre pas
un développement exagéré. Les molaires en particulier sont plutôt petites par rapport à l’arc qui les porte ;
elles sont même relativement espacées dans leur sériation ; leurs tubercules n’ont rien de particulièrement
accusé. Les mêmes observations s’appliquent à la mandibule, et la même disproportion y
existe entre les dents du devant et celles du fond de la bouche. Les grosses molaires affectent une
décroissance de taille bien accusée d’avant en arrière, les premières seules ont cinq tubercules. L’arcade
dentaire, étroite et longue, est assez robuste, quoique les empreintes musculaires y soient peu
accentuées, et ’que tout l’os se montre fort lisse. Le menton triangulaire est petit, peu saillant et surmonté
d’une proclivité alvéolaire assez accusée pour que l’angle alvéolo-mentonnier dépasse l’angle droit
et s élève à 93°. La branche montante est épaisse, relativement large (larg. transv. 0m,038, oblique, 0n'03o),
introversée du condyle et de l’angle, et forme avec l’horizontale un angle de 101°
Crânes de Papouas Néo-Guinéens du su d . Nous avons suivi dans les pages qui précèdent les contours
septentrionaux de la Nouvelle-Guinée depuis le golfe du Geelvink jusqu’à la baie du Triton, et décrit
en passant les populations des côtes de la grande terre et des îles qui en dépendent directement.
A partir du canton de Lobo, les documents crâniologiques vont nous faire subitement défaut dans la
direction du sud-ouest jusqu’au détroit de Torrès. Pour les populations de l’Oetanata et du détroit de la 1 2
(1) Il n est pas sans intérêt d’observer que sur ce crâne de Lobo, comme sur quelques autres de Mansinam, Rubi et Kordo examinés
ci-dessus, les deux temporaux viennent au contact du frontal. C’est déjà le sixième exemple que nous citons de cette anomalie coexistant
des deux côtés à la fois.
(2) Mesures de la mâchoire inférieure delà femme de Lobo : diam. bicondyl, 9 4 ; biangul., 80; écart, des 2e* mol., 3 9 ; des can.,
17, dist. angul. symph. 8 7 ; branche mont. : haut. 46, larg. transv. 38, obliq. 3 5 ; branche horizont. : haut, symph. 32, 2e mol. 24 ;
épais, symph. 13,5; 2e mol. 16; angle mand. 101°; alv. ment. 93°.
T a b lea u XXIY.
Crâne s de P a p o u a s du No r d -Ou e s t .
Princesse-Marianne, nous aurons encore les planches de l’ouvrage de la commission hollandaise, qui nous
les montreront sous l’aspect de vrais Papouas (2). Mais les insulaires de l’île du Prince Frédéric-Henri
et de la côte sud tout entière nous demeuront complètement inconnus, et il nous faudra arriver aux îles
du détroit de Torrès pour rencontrer de nouveau des renseignements détaillés. -
Crânes de Papouas des îles du détroit de Torrès. — Ces îles sont habitées par des tribus au nombre
de huit à neuf, dont Mac-Gillivraÿ a le premier fait connaître presque complètement la distribution géographique
(3). « Les Kowraregas, dit cet ethnologue distingué, habitent le groupe du Prince-de-Galles,
(Narupai, etc.) ; les Muralegas et les Italegas se partagent l’île de Banks (Mua, Ita), les Badulegas possèdent
l’île Mulgrave (Badu) et les Gumulegas les îles entre cette dernière et la Nouvelle-Guinée; les Kulka-
legas ont Mont-Ernest et les Trois-Soeurs (Nagir, etc.) ; les Massilegas résident sur les îles d’York (Massid
(1) On n’oubliera pas que ces diamètres basilo-bregmatiques obtenns par des méthodes différentes ne sont pas exactement comparables
et montent souvent un peu trop haut.
(2) On remarque que l’un des Papouas de l’CEta, représenté pl. YI, fig. 4 de cet atlas, a toutes les dents incisives et canines découpées
en lame de scie.
(3) J. Mac-Gillivray. Narrative of the Voyage of H. M. S. Rattlesnake. London, 1852,, in-8°, vol. H, $. .23. - Nous avons: rétabli,
entre parenthèses, dans cette citation, la nomenclature indigènne qu’il faut toujours suivre de préférence.