qu’il ne put jamais aborder la côte de Taman,
et que pour pouvoir dire qu’il avait été en Asie,
il fut obligé de se contenter de mettre le pied
sur la langue de terre sablonneuse du cap
Tusla.
Kertche moderne.
Kertche, ou plutôt Ghersete, est le nom turc
du château que les géographes des quatorzième
et quinzième siècles appellent Bospro, Vospro
et Pandico : il fut bâti selon toute vraisemblance
par les Génois sur la plage du port de Panti-
ticapée, au pied de la montagne qui en portait
les ruines.
Lorsque les Russes en prirent possession en
4771, 5 à 600 chaumières entouraient le château
construit en moëllon, sur un plan circulaire
avec des angles saillants : les nouveaux
maîtres détruisirent la plupart des maisons, et
cherchèrent à donner quelque relief à la forteresse
en y ajoutant un ouvrage en forme d’étoile,
revêtu de pierres de taille, pour défendre
le port. Mais ce fut inutilement; quelle importance
pouvaient avoir des fortifications que la
montagne de Mithridate dominait comme une
tour? Kertche fut donc condamné à l’oubli et à
la pauvreté. La forteresse de Iénikalé, dans une
position plus opportune, eut le pas sur Kertche,
dont on ne fit aucun cas jusqu’à ce que, en 1821,
l’empereur Alexandre, appréciant sa position
commerciale, le déclara port maritime et 1 eleva
au rang de ville d’arrondissement.
Depuis cette époque, Kertche a fait de lents
progrès; insensiblement sa population s’est augmentée
: quelques particuliers sont venus y
fonder des établissements de commerce, et y
bâtir des maisons commodes. On s’est habitué à
ce petit gouvernement dans lequel on a compris
Kertche comme chef-lieu avec Iénikalé et
13,ooo arpents de terre qui forment la pointe
orientale de la presqu’île de Kertche (1).
Cependant cette nouvelle création aurait langui
encore longtemps, si une nouvelle mesure,
déjà proposée depuis 4° ans par Pallas (2), n’était
venue donner un nouvel essor a son commerce
et ajouter à son importance.
Sur la proposition du général-gouverneur de
la Nouvelle-Russie, comte Yorontsof, la quarantaine
de Kertche fut, en 1833, déclarée quarantaine
générale pour la Mer d’Azof, et aucun
bâtiment ne put plus passer le Bosphore sans
avoir fait sa purification à Kertche. Cette mesure
Ci) Voyez les limites de ce petit gouvernement marquées
sur la carte du royaume du Bosphore, Ire série, pl. 2.
C2) Pallas, Voyages dans les gouvernements méridionaux,
II, p. 298. Qu’on lise ses réflexions laissées pendant 4oan®
dans l’oubli.