garde. Celui de la Katche pouvait à peine passer
l’année. Ainsi celui que l’on appelait de bonne
qualité en Crimée était si inférieur, que la réputation
des vins de Crimée pouvait passer pour nulle.
D’ailleurs le peu de soin que l’on mettait à cette
fabrication contribuait beaucoup à cette infériorité.
Il fallait faire subir une révolution complète
à la culture de la vigne pour la mettre en
état de rivaliser avec succès contre les produits
étrangers (1).
Rien n’a arrêté les auteurs de cette noble entreprise;
le comte Vorontsof à la tête, n’a épargné
ni argent, ni conseils, ni encouragement.
On a fait venir de France, d’Espagne et des*rives
du Rhin les plants les plus renommés, et le
comte en a réuni 200 espèces en petites plantations
à Aloupka, pour y faire des expériences.
On a appelé de bons vignerons, consulté les
meilleurs ouvrages sur la vigne. Les meilleurs
terrains sur la côte ont été soigneusement défoncés
et couverts de belles plantations. On a
choisi les expositions les plus favorables. Des
tonneliers ont enseigné l’art de traiter les vins,
(1) Lisez dans le Voyage de Mourav iev- A postal en Crimée
, p. i64, édition allemande, sa critique sur la culture
de la vigne et sur les vins de Crime'e. Comparez avec celle
du marquis de Castelnau, Histoire de la Nouvëlle-Rus-
s ie , 111, 290.
e t on a bâti de vastes caves meublées de beaux
vases : en un mot, on a tout fait ; on n’a épargné
ni peine, ni dépenses. Mais l’on n’en était pas
plus riche, parce que les consommateurs habitués
s’en tenaient aux vins bon marché de Soudak
et de la Katche, et n’osaient se compromettre
avec les nouveaux vins, qu’une culture plus
soignée et des frais considérables rendaient plus
chers. Les mauvais vins se vendaient toujours ;
les bons restaient chez les propriétaires.
Ceux-ci conçurent alors le projet d’une association
qui porterait remède à ce fatal état de
choses. Au moyen d’un capital considérable,
la compagnie des vins, gérée par un directeur
(M. Larguier), devait se trouver à même d’acheter
des propriétaires des vins de choix, qu’elle
garderait dans ses caves, et se mettant en relation
avec les principales villes de la Russie, elle
devait par ses commis-voyageurs faire connaître
les différentes qualités de vins fins de la Crimée,
en avoir des dépôts dans ces villes, leur donner
la vogue, et détruire ainsi le préjugé qui régnait
contre eux. Ceci était d’autant plus urgent que
les marchands de vin par leur avidité, travaillaient
chaque jour à augmenter celte mauvaise
réputation. La majeure partie des vins faibles de
Soudak et de la Katche , achetés par eux aux
plus bas prix à l’époque de la vendange, et
transportés en moût rapidement dans leurs ca